Quelque 250 employés du secteur des technologies ont été licenciés par le parc d’attraction Walt Disney World d’Orlando en Floride, remplacés par des immigrés bénéficiant d’un visa temporaire, dit H-1B. C’est le cas de Leo Perrero, 42 ans, qui a formé son remplaçant, un immigré indien, pendant les derniers mois avant son licenciement. C’est aussi celui de Dena Moore, 53 ans. Tous deux n’ont pu retrouver de poste au sein de ce gros pourvoyeur local d’emplois. Ils ont intenté un procès devant le tribunal fédéral de Tampa à l’encontre de Disney et de deux sociétés de conseil, HCL et Cognizant qui ont fait venir les immigrés qui les ont remplacés. Ils reprochent aux sociétés de s’être entendues et d’avoir enfreint la loi en recourant au visa temporaire H-1B pour faire venir des immigrés, sachant que les employés américains seraient remplacés. Les deux ex-employés ont engagé des poursuites séparément, mais le même jour, réclamant un statut de recours collectif (« class action ») pour leurs procédures.
Des employés de Disney contraints de former leurs remplaçants immigrés
La fureur déclenchée par les licenciements au parc Disney d’Orlando a permis de mettre au jour toute une série de cas similaires où des employés américains ont été remplacés par des immigrés titulaires de visas H-1B, après avoir été cyniquement obligés à les former avant leur propre départ. Les immigrés, principalement venus d’Inde, passaient par les services des sociétés de placement, dont HCL et Cognizant, qui ont raflé une grosse majorité du quota annuel de 85.000 visas décidé par le Congrès américain. 30 autres anciens employés de Disney ont également porté plainte auprès de la commission américaine de l’égalité d’accès à l’emploi, dénonçant la discrimination dont ils ont été victimes en tant que citoyens américains.
Le système des visas H-1B, voté par le Congrès américain afin de permettre à des étrangers disposant de compétences particulières d’entrer aux Etats-Unis, prévoit toutefois que cette importation de compétences n’est autorisée que dans la mesure où le futur employeur aura déclaré au Département du travail qu’elle « n’aura pas de conséquences néfastes pour les conditions de travail des employés américains occupant des postes similaires ».
Les bénéficiaires du visa H-1B, moins chers que les travailleurs américains
Pour Disney, « ces procès s’appuient sur une théorie juridique intenable et sur une mauvaise interprétation systématique des faits », alléguant que plus de 100 employés préalablement licenciés ont été réintégrés. Les deux sociétés de conseil affirment qu’elles respectent parfaitement les lois applicables aux visas H-1B.
Face à la colère des employés, le Congrès a décidé de réactiver une charge financière pesant sur les sociétés qui placent des bénéficiaires du visa H-1B : les plus importantes devront payer 4.000 dollars au lieu de 2.000 pour tout nouveau visa de ce type, paiement à renouveler si le bénéficiaire du visa est transféré vers un nouvel employeur.
Certains sénateurs tel le Démocrate Bill Nelson de Floride, proposent de réduire le nombre de visas H-1B à 70.000 par an, 15.000 de moins que le quota actuel. D’autres comme le Républicain Jeff Sessions et Ted Cruz ont présenté une proposition de loi pour augmenter fortement le salaire minimum des titulaires de visas H-1B : à 110.000 dollars celui-ci aurait en effet dissuasif sur les sociétés d’externalisation des ressources humaines.
Mobilisation contre l’abus du visa H-1B
Si Leo Perrero a longtemps hésité à témoigner de sa situation de peur de n’avoir aucune chance d’être un jour réembauché par Disney, il a changé d’avis lorsque des recruteurs locaux lui ont dit qu’il n’avait de toute façon guère d’espoir ; sur les quelque 200 personnes éjectées dans les mêmes conditions humiliantes que lui, seules deux ont été réembauchées par la suite.
L’Institut des ingénieurs électriciens et électroniciens, l’association professionnelle internationale du secteur, a mis en ligne une pétition afin de demander une enquête sur les conditions du recours aux visas H-1B. Il encourage toutes les victimes de telles pratiques à déposer plainte auprès des tribunaux. L’un des avocats du ministère de la justice, Alberto Ruisanchez, a confirmé le mois dernier que les employeurs violeraient les lois anti-discrimination s’ils licenciaient leurs employés ou les remplaçaient par des personnes « sur la fondement de critères de citoyenneté ou de leur statut immigré ».