Au sommaire :
- Nigéria : Pidgin pour tous
- Avortement : le droit de tuer égal aux autres
- Syrie : Hold-up sur la sensibilité occidentale
- L’Iran invité puis puni
Nigéria : Pidgin pour tous
Le géant d’Afrique de l’Ouest, le Nigéria, compte cent dialectes en plus de l’anglais, langue officielle. Mais pour se comprendre entre classes et tribus, la population parle un sabir simplifié où se déversent tous les idiomes : c’est le pidgin pour tous.
L’avenir du continent noir est pour beaucoup celui du Nigéria, 170 millions d’habitants et un sous-sol fabuleusement riche. Mais une croissance rapide et désordonnée déplace les populations et brise les enseignements traditionnels : les langues tribales régressent et l’anglais, l’idiome de l’ancien colonisateur, ne pénètre pas partout.
Entropie linguistique
D’où le recours à une sorte de mélange adultère de tout, une lingua franca où entrent du créole, de l’anglais altéré, du portugais, et de nombreux mots locaux. C’est le pidgin pour tous. C’est pratique, mais cela induit une entropie linguistique, le parler vernaculaire devant être grossier, d’un vocabulaire restreint et d’une syntaxe rudimentaire pour s’adapter à tous. D’où une pensée toujours plus pauvre et plus imprécise. Le phénomène ne se limite hélas pas au Nigéria : les populations qui vivent en France connaissent, ou engendrent, une régression semblable du français. On n’en est pas encore rendu au niveau du pidgin, mais on ne doit pas perdre de vue que le bas-latin a donné les parlers romans.
Avortement : le droit de tuer égal aux autres
Le récent revirement de l’Espagne sur la question de l’avortement et la manifestation des opposants français dimanche inquiètent le gouvernement français. Dénonçant une menace de « régression » Najat Vallaud-Belkacem veut faire passer aux forceps une loi qui fera du droit de tuer un droit semblable aux autres.
Que l’avortement soit redevenu un sujet de débat scandalise le ministre du droit des femmes au point qu’elle ressent le besoin à la fois de présenter ses opposants d’une manière méprisante et de minimiser leur succès : « Plusieurs milliers de personnes ont défilé comme elles défilent chaque année pour protester contre le droit à l’IVG. Soyons clairs : c’est une constante. Il y a encore aujourd’hui dans notre pays des gens qui n’admettent toujours pas que les femmes aient la liberté de disposer de leurs corps ».
Présentant son projet de loi sur l’égalité hommes-femmes devant l’Assemblée nationale, dans lequel sont discutés des amendements concernant l’IVG, elle a justifié la suppression de la notion de « détresse », jusqu’à présent inscrite comme condition pour avorter, arguant que cette « concession » de Simone Veil en 1974 était devenue « obsolète ». Et d’affirmer que la femme devait pouvoir accéder à l’IVG « si elle ne veut pas poursuivre une grossesse ». Donc de faire de l’avortement une décision qui dépendrait seulement de la volonté de la femme concernée, un acte ordinaire comparable à la chirurgie esthétique. En somme, faire du droit de tuer un acte médical comme les autres…
Un argument technique
Plusieurs députés UMP l’ont attaqué sur le point précis de la détresse en exigeant la suppression du remboursement de l’avortement par la Sécurité sociale. En expliquant : « Si la notion de détresse est supprimée dans la définition de l’interruption volontaire de grossesse, les conditions de remboursement de l’acte par la Sécurité sociale ne sont plus remplies. » Cet argument est valable du point de vue technique, et sans doute tactique, mais il laisse de côté le vrai problème, que les députés modérés n’ont pas osé aborder pour ne pas se faire diaboliser. En vain, d’ailleurs, puisque les « jeunes du PS » ont stigmatisé leur « amendement réactionnaire » et la « dérive antirépublicaine » d’un parti « anti-féministe, gangrené par des idées de l’extrême-droite ». La violence délirante du ton employé par les jeunes socialistes montre la peur du système devant la montée de la fronde anti-avortement, et en conséquence la nécessité d’aller au fonde des choses : à savoir que l’avortement est un crime, quelles qu’en soient les circonstances atténuantes éventuelles.
L’idéologie poussée au délire
Cette crainte pousse d’ailleurs aux pires folies, puisque Libération publiait ce matin la tribune particulièrement violente d’une « philosophe » espagnole dont voici un extrait : « Affirmons-nous en tant que citoyens entiers et non plus comme utérus reproductifs. Par l’abstinence et par l’homosexualité, mais aussi par la masturbation, la sodomie, le fétichisme, la coprophagie, la zoophilie… et l’avortement. Ne laissons pas pénétrer dans nos vagins une seule goutte de sperme national-catholique ».
Le bon sens antique et toutes les grandes religions s’entendent pour condamner fermement l’avortement mais l’Eglise est particulièrement dans le collimateur du système. Il est vrai que le Pape François dans ses récentes déclarations n’hésite pas à dire que l’avortement est un meurtre, et qu’en Espagne, et même en France, les évêques n’hésitent plus à parler. Cette vérité encore timide explique l’agressivité des militants pro-mort et la hâte de notre ministre.