Le pape Léon XIV, la basilique Saint-Pierre, les tradis et les LGBT

Léon Saint-Pierre tradis LGBT
 

Une double actualité autour de la basilique Saint-Pierre fait bruisser les réseaux sociaux. D’une part, on évoque l’audience accordée par Léon XIV au père jésuite « LGBTiste » James Martin et le « pèlerinage des LGBT » que celui-ci a accompagné à Rome à l’occasion du Jubilé avec son passage obligé par la Porte Sainte de la basilique du pape… On salue, d’autre part, l’autorisation donnée au cardinal Burke de célébrer la messe traditionnelle à la basilique Saint-Pierre à l’autel de la Chaire le 25 octobre prochain, à l’occasion du pèlerinage du Cœtus Internationalis Summorum Pontificum, créé il y a treize ans par reconnaissance à Benoît XVI qui libéralisa la célébration du rite tridentin en affirmant son « droit de cité » dans l’Eglise.

Dans un exemple typique de dialectique, on en arrive même au point où ceux qui se réjouissent de cette dernière nouvelle sont accusés par d’autres, scandalisés par l’affaire Martin, de se taire face aux pires aberrations pour le plaisir d’obtenir une belle célébration avec latin, beaux chants et dentelles. Le Pape Léon XIV est directement accusé : certains proposent d’arrêter de lui donner le bénéfice du doute quant à son programme de gouvernement pour l’Eglise, d’autres s’enfoncent dans un sédévacantisme de plus en plus agressif.

Les deux événements méritent pourtant d’être analysés et mis en parallèle de manière plus précise, en tenant compte de la différence qui s’est déjà manifestée entre le pontificat de François et celui de Léon XIV.

 

Le pape Léon n’a rien dit sur les LGBT

Pour ce qui est de l’affaire du P. James Martin, rappelons d’abord qu’il a été propulsé sur le devant de la scène et honoré publiquement et explicitement par le Pape François, qui lui a confié diverses charges, comme celle de consulteur pour le secrétariat pour les communications du Vatican, et qui a préfacé un de ses livres. L’ouverture aux LGBT prônée en paroles et réalisée en actes par le pape François (qui en même temps dénonçait l’idéologie du genre et n’hésitait pas à employer des mots grossiers pour désigner les homosexuels) a été manifeste et vérifiable. Ce n’est pas le cas pour le pape Léon chez qui on cherche en vain des déclarations de ce style. Seule une photo de la rencontre a été publiée.

Au contraire, s’exprimant en tant que supérieur de l’Ordre des Pères Augustins, celui qui était en 2012 le P. Robert Prevost affirmait lors d’une conférence (traduction par nos soins) :

« Les médias occidentaux sont extrêmement efficaces quand il s’agit de susciter auprès du grand public une immense sympathie pour des croyances et des pratiques qui sont en contradiction avec l’Evangile, par exemple l’avortement, le mode de vie homosexuel, l’euthanasie. La religion est au mieux tolérée par les médias comme une institution inoffensive et pittoresque, tant qu’elle ne s’oppose pas activement aux positions sur les questions éthiques que les médias ont faites leurs.

« Cependant, lorsque des voix religieuses s’élèvent pour s’opposer à ces positions les médias peuvent s’en prendre à la religion en la qualifiant d’idéologique, insensible aux prétendus besoins vitaux des gens dans le monde contemporain. Ils ancrent si brillamment et habilement dans l’esprit du public la sympathie pour les choix de vie antichrétiens encouragée qu’ils encouragent eux-mêmes que lorsque les gens entendent le message chrétien, celui-ci leur semble souvent inévitablement idéologique et émotionnellement cruel, par opposition à l’humanité ostensible de la perspective antichrétienne.

« Les pasteurs catholiques qui prêchent contre la légalisation de l’avortement ou la redéfinition du mariage sont dépeints comme étant idéologiquement motivés, sévères et indifférents, non pas à cause de ce qu’ils font ou disent, mais parce que leur public met en contraste leur message avec les images médiatiques, sympathiques et bienveillantes, d’êtres humains qui, parce qu’ils sont pris dans des situations de vie moralement complexes, optent pour des choix qui sont présentés comme sains et positifs. Notez, par exemple, combien les familles “différentes” composées de partenaires de même sexe et de leurs enfants adoptés sont dépeintes de manière bienveillante et sympathique dans les programmes télévisés et au cinéma aujourd’hui.

« Si la nouvelle évangélisation veut contrer avec succès ces distorsions de la réalité religieuse et éthique produites par les médias de masse, les pasteurs, les prédicateurs, les enseignants et les catéchistes vont devoir être beaucoup mieux informés sur le contexte de l’évangélisation dans un monde dominé par les médias de masse. »

A ce jour, le pape Léon n’a pas contredit ces déclarations d’alors. Certains tireront argument du fait que le P. James Martin a déclaré, en sortant de son audience chez le pape, que celui-ci avait l’intention de poursuivre dans la voie d’« ouverture aux LGBT » tracée par son prédécesseur, François. Léon XIV n’a pourtant prononcé aucune parole publique à cette occasion, tandis que le P. Martin est connu pour avoir des objectifs idéologiques. Les encouragements dont celui-ci se targue en attribuant au pape des propos tenus – ou pas – lors d’une rencontre privée cadreraient bien dans une opération de manipulation, voire d’une tentative de forcer la main du pape. Si c’est le cas on peut imaginer qu’il n’en soit pas ravi.

 

Le cardinal Gambetti a la responsabilité de la basilique Saint-Pierre

Faut-il attribuer à ce dernier le scandale qui s’est produit par la suite à la basilique Saint-Pierre ? On y a vu entrer plusieurs centaines de personnes revendiquant leur rejet de la loi morale, accompagnées de matériel de propagande, telle une croix aux couleurs de arc-en-ciel (mais c’étaient les sept couleurs, pas les six du « rainbow » du lobby), et portant des vêtements débraillés et indécents qui, à l’ordinaire, ne sont pas acceptés dans la basilique, quand ils n’étaient pas marqués aux six couleurs de l’arc-en-ciel LGBT.

A aucun moment, le pape Léon n’a accueilli ou approuvé publiquement ce pèlerinage. C’est au cardinal franciscain Mauro Gambetti, archiprêtre de la basilique, que revient la responsabilité de ce qui s’y passe, et c’est à lui qu’il appartenait de prier ces personnes de rebrousser chemin compte tenu de leur tenue et de leur attitude. On notera d’ailleurs que le P. Martin qui insiste volontiers sur son respect de la doctrine morale de l’Eglise n’a rien fait en ce sens concernant ce groupe.

On dira qu’il appartient au pape de rectifier et de condamner, qu’il s’agisse de la diffusion des propos qui lui ont été attribués par James Martin ou du scandale qui s’est produit avec l’arrivée de ce groupe vindicatif. Mais comment doit agir le pape dans l’Eglise aujourd’hui si abîmée ? Pouvons-nous, devons-nous même espérer qu’il taille dans le vif à travers des déclarations tonitruantes ? D’ailleurs le pourrait-il, compte tenu de la Curie qui l’entoure, et faut-il commencer par là ? Jusqu’ici, les rectifications et mises au point faites par le Saint-Père ont été fermes, mais discrètes, et elles n’ont pas manqué. Sans doute a-t-il d’abord besoin de nos prières, et devons-nous nous réjouir de ce que l’essentiel de son message soit si clairement centré sur le Christ.

 

Les tradis de retour à Saint-Pierre

S’agissant de l’autorisation donnée pour la célébration de la messe traditionnelle par le cardinal Burke dans la basilique Saint-Pierre, d’où elle est pratiquement bannie depuis 2021 à quelques rares exceptions près, sous l’autorité du cardinal Mauro Gambetti, par la quasi interdiction des messes individuelles, elle rétablit simplement une situation qui avait cours jusqu’à l’édition 2022 du pèlerinage du « peuple Summorum Pontificum » attaché à l’Usus antiquior, la forme plus ancienne du rite romain. Ce sera une messe en l’honneur de la Sainte Vierge, comme l’a rappelé le coordinateur du pèlerinage, Christian Marquant.

Là encore, on peut gloser sur le rôle joué par le pape Léon XIV au regard de cet événement. Le Journal du dimanche parle d’un « signal fort adressé aux tradis » par « le pape Léon XIV ». La chose elle-même est certainement un signe d’espérance, mais il n’y a pas eu de proclamation ou de parole publique du pape à son sujet. Là encore les prières restent à l’ordre du jour.

 

Jeanne Smits