Beaucoup de questions restent ouvertes au sujet du pape Léon XIV et les conjectures se multiplient : cet homme élu avec un très large soutien à « droite » comme à « gauche » va forcément décevoir certains de ses électeurs en penchant du côté opposé. Mais il y a déjà des actes et des paroles, comme nous l’avons répété sur RITV ; ainsi, lors de sa visite à la basilique papale de Saint-Paul-hors-les-Murs, mardi, il a évoqué la justification : ce qui permet à l’homme d’accéder au paradis.
L’homme ne peut de lui-même acquérir ce salut éternel, le péché originel ayant opéré une fracture radicale entre Dieu et sa créature ; il lui faut être racheté par le Christ. A l’heure du relativisme religieux et de l’oubli de la nécessité de la grâce, les paroles de Léon XIV sont significatives.
S’appuyant sur saint Paul et sur son bien-aimé saint Augustin, le pape a rappelé la triple nécessité de « la grâce, la foi et la justice ». La grâce est décrite dans son homélie avec les mots de saint Augustin à travers « l’amour prévenant » de Dieu : « Que pouvons-nous choisir, si nous n’avons pas d’abord été choisis ? En effet, si nous n’avons pas d’abord été aimés, nous ne pouvons même pas aimer. » Léon XIV ajoute : « A la racine de toute vocation, il y a Dieu : sa miséricorde, sa bonté généreuse comme celle d’une mère (cf. Is 66, 12-14) qui, naturellement, nourrit son enfant à travers son propre corps lorsqu’il est encore incapable de se nourrir seul (cf. St. Augustin, Commentaire du Ps 130, 9). »
Léon XIV évoque la nécessaire grâce de Dieu
C’est donc un amour gratuit, sans aucun mérite de la part de l’homme, mais que l’homme doit accueillir et accepter : c’est « l’obéissance de la foi » dont parle saint Paul et que Léon XIV met aussitôt en évidence :
« En effet, le Seigneur, en lui apparaissant sur le chemin de Damas (cf. Ac 9, 1-30), ne l’a pas privé de sa liberté, mais lui a laissé la possibilité d’un choix, d’une obéissance fruit d’efforts, de luttes intérieures et extérieures, qu’il a accepté d’affronter. Le salut ne vient pas par enchantement, mais par un mystère de grâce et de foi, d’amour prévenant de Dieu et d’adhésion confiante et libre de la part de l’homme. »
Autrement dit : l’homme a la capacité de refuser ce salut qui est donné par Dieu seul. Ces vérités avaient tendance à être diluées dans le discours moderne de l’Eglise ; elles reviennent désormais avec insistance dans les prises de parole du pape. Le salut est un travail, accompli par le Christ pour l’homme ; mais il ne lui est pas imposé par quelque formule magique universellement efficace !
Le cardinal Müller voit l’action du Saint-Esprit dans la rapidité de l’élection
L’un des cardinaux qui a été le plus ouvert dans sa dénonciation de la confusion doctrinale émanant de Rome sous le pontificat de François est bien l’ancien préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, le cardinal Gerhard Müller. Celui-ci a donné un entretien exclusif à Andreas Wailzer pour LifeSiteNews ; il y assure penser que l’élection de Léon XIV est l’œuvre du Saint-Esprit :
« En dépit des luttes partisanes annoncées, tout s’est fait en 24 heures ? Cela montre qu’il y a eu une importante unanimité, qu’il n’a pas été possible de pousser un candidat en avant, alors qu’une personne relativement inconnue du public était élue aussi rapidement. On peut seulement vraiment comprendre cela si on est croyant et chrétien, que l’on croit en l’Esprit-Saint, c’est-à-dire au travail de la grâce. »
Ce sont l’hétérogénéité et le manque de familiarité mutuelle entre les cardinaux qui ont convaincu le cardinal Müller de cette action du Saint-Esprit : leur accord rapide a de fait surpris :
« Après tout, le Collège des cardinaux a été constitué de manière si hétérogène par la volonté du pape François que toutes les nations et toutes les langues – certains ne parlaient pas italien, ni même anglais – étaient représentées. On peut donc se demander comment une telle décision a pu émerger si rapidement d’un collège aussi hétérogène. C’est parce que nous pensons comme des catholiques ; nous pensons au bien de l’Eglise. »
Léon XIV, le pape de l’unité ?
La formule, convenons-en, est optimiste. Mais on peut prendre note de cette prédiction du cardinal : « Léon XIV contribuera certainement à l’établissement d’une plus grande unité et à réduire des conflits inutiles. »
Au nombre de ces derniers, le cardinal Müller a explicitement désigné les restrictions mises par Traditionis custodes sur le recours à la liturgie traditionnelle de la messe.
« Il faut également être sage sur le plan pastoral en cherchant à s’adapter à la situation et à la mentalité des gens. Je crois qu’il apporte cette clairvoyance à la table, que l’accent est mis sur ce qui est primordial, mais qu’il n’y a pas de tensions ou de divisions quant aux questions secondaires », a conclu le cardinal.
Celui-ci n’a pas semble-t-il évoqué la question de la « synodalité » allemande, en rupture sur de nombreuses questions, principales et secondaires…