Au Pakistan, un attentat suicide a fait 72 morts et 350 blessés dimanche après-midi à Lahore. Dimanche, jour de Pâques. Car le groupe qui a envoyé un kamikaze islamique se faire sauter à proximité d’un parc où jouaient des enfants a voulu « attaquer des chrétiens célébrant Pâques ». On tue des chrétiens. A proximité d’un parc, on tue surtout des enfants et des mères. Et au-delà des chrétiens, un certain nombre de musulmans…
C’est ainsi que le porte-parole de Jamat ul Ahrar (le « parti des défenseurs ») a en effet revendiqué ce massacre, affirmant clairement avoir voulu « attaquer des chrétiens célébrant Pâques ». Et ce justement le jour de la première fête de Pâques fériée pour les chrétiens, depuis le vote récent d’une loi leur concédant ce jour.
On tue les chrétiens à Lahore
Même si la communauté chrétienne est clairement persécutée (on emprisonne Asia Bibi, on tue ici et là des chrétiens, on enlève des chrétiennes pour les marier et les convertir de force), le gouvernement du Pendjab a néanmoins décrété trois jours de deuil.
L’enquête a permis de découvrir des billes de plomb, qui ont été projetées par l’explosion afin d’augmenter le nombre de victimes. Parmi les 72 morts, figurent 29 enfants et 6 femmes. Mais l’attentat a également fait plus de 200 blessés.
Javed Ali, dont la maison est située en face de l’entrée du parc, raconte avoir entendu « une énorme explosion ». « Dix minutes plus tard, je suis sorti, ajoute-t-il. Il y avait de la chair humaine sur les murs de notre maison. Les gens pleuraient… »
Les hôpitaux sont débordés. On soigne, on opère partout, et surtout où l’on peut. Et sans distinction : d’après un responsable de la police de Lahore, la majorité des victimes est musulmane.
Au Pakistan, une épitaphe sanglante pour un assassin
Car les chrétiens ne sont ici qu’une minorité : 2 % et 3 % des 190 millions de Pakistanais. Et l’Etat pakistanais, malgré les nombreux attentats qui se sont produits ces dernières années, n’a eu ni les moyens, ni même la volonté politique de les protéger. Il faut dire que la loi sur le blasphème fait des chrétiens les victimes toutes désignées de la loi elle-même…
Depuis l’exécution, début mars, de Mumtaz Qadri, l’assassin de l’ancien gouverneur du Pendjab, Salman Taseer, qui avait proposé d’amender la loi sur le blasphème, les kamikazes rêvent de venger un héros. La veille de l’attentat, quelque 25.000 personnes avaient manifesté à Rawalpindi, ville jumelle d’Islamabad, pour demander que Qadri soit élevé au rang de martyr, et exiger l’exécution d’Asia Bibi pour venger sa mort. Dimanche, un rassemblement similaire s’est tenu à Islamabad.
A défaut d’Asia Bibi qui croupit en prison depuis sa condamnation à mort en novembre 2010, d’autres femmes chrétiennes, des enfants chrétiens – mais aussi combien de musulmans… – ont été odieusement massacrés, en une espèce d’épitaphe sanglante dressée sur le tombeau d’un assassin élevé au rang de héros.