Et si la parentalité devenait un problème urgent de santé publique ?

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C’est la question que se pose très gravement l’administrateur de la santé publique des Etats-Unis, le Dr Vivek Murthy, soit le principal porte-parole du gouvernement fédéral en la matière. Et c’est bien la première fois que cette préoccupation arrive à ce niveau d’intérêt socio-politique. Signe des temps ? Le document, publié le 28 août, indique que la parentalité est, par essence, stressante et que ces considérations « nécessitent une prise de conscience et une action immédiates de la nation ».

De prime abord, ce peut être défendable et même opportun en ce temps de dévalorisation systématique des familles. Il y a d’ailleurs quelques bonnes idées qui mériteraient d’être suivies… Seulement, on a vite l’impression d’être face à une arnaque : on cherche à soigner les symptômes du mal sans en rechercher les causes, tombant ainsi directement dans l’idée que la parentalité moderne n’est plus tenable à l’heure actuelle, pour moult raisons, et qu’il va donc falloir en partager la charge (pourquoi pas avec l’Etat). Et l’hydre du collectivisme ressurgit, en attendant de proscrire la procréation au motif que c’est la Terre Mère qui subit le « stress » des trop nombreux humains.

Et puis, soit dit entre parents : oui, engendrer et élever physiquement, intellectuellement et spirituellement des enfants engendre des sacrifices inévitables dans un monde qui est tout sauf un monde de bisounours… Il y a là encore un refus systématique (et symptomatique) de notre époque de la gêne et de la souffrance.

 

Moderne parentalité

Effectivement, comme le faisait remarquer Kimberly Ells sur le média Mercator, c’est la première fois que le médecin chef des Etats-Unis s’intéresse au rôle et à la situation mentale des parents. Le sujet paraît ainsi aussi important que celui de la violence par armes à feu qu’il dénonçait à la fin juin – et sûrement l’est-il. Vivek Murthy n’hésite pas à dire : « Etre père est le travail le plus difficile et le plus gratifiant que j’aie jamais eu. Le travail de parent est essentiel non seulement pour la santé des enfants, mais aussi pour la santé de la société. »

Le constat qu’il dresse dans cet opuscule d’une trentaine de pages est que les parents subissent plus de stress que ceux qui ne le sont pas et que parfois, le niveau de stress de certains parents est si élevé qu’ils ne peuvent plus le gérer. Il indique que ce stress parental peut avoir un impact négatif sur les enfants. Et que les principales raisons sont la pression financière et l’instabilité économique, les exigences en matière de temps, les inquiétudes concernant la santé et la sécurité des enfants, l’isolement et la solitude des parents, la difficulté à gérer la technologie et les réseaux sociaux ainsi que les pressions culturelles.

Ce n’est pas faux. Aux soucis ancestraux de tout parent, comme celui de protéger ses enfants du danger, quel qu’il soit, se sont ajoutés de nouveaux sujets de préoccupation liés à notre société occidentale moderne qui a sacré le matérialisme et banni toute transcendance. Comment s’étonner devant ces nombreuses familles épuisées, à la remorque du succès multi-formes et de l’épanouissement tous azimuts…

« Dans mes conversations avec des parents et des soignants à travers l’Amérique, j’ai constaté que la culpabilité et la honte sont devenues omniprésentes, les poussant souvent à cacher leurs difficultés, ce qui permet un cercle vicieux où le stress mène à la culpabilité qui mène à plus de stress », écrit le Dr Murthy.

 

« Elever des enfants est un travail sacré. Cela devrait nous concerner tous. »

A ce stade, on ne sait pas trop si c’est la société qui malmène les enfants ou si ce sont les enfants qui malmènent les parents. Car la deuxième idée est bien soutenue aujourd’hui par un mouvement de fond radical, où l’on peut citer la féministe Sophie Lewis, rappelle l’article de Mercator : selon elle, les bébés in utero commettent une « violence fœtale » envers leur mère en créant des menaces pour sa santé et en exigeant, qui plus est, de celle qui les héberge, de la nourriture ! Son dernier livre est intitulé : Abolish the Family: A Manifesto for Care and Liberation

D’ailleurs, Vivek Murthy n’entame pas le procès du monde moderne : il semble qu’il faille s’y adapter en limitant, au mieux, la casse qu’il engendre. Plusieurs des solutions qu’il préconise ne sont pas totalement ineptes, comme encourager les amis et les membres de la famille à offrir un soutien pratique aux parents ou encore limiter les écrans pour les enfants, etc.

Mais le fond de son raisonnement rejoint bien, in fine, ces idées radicales, en ce qu’il préconise le partage de cette charge devenue brusquement inhumaine et comme inadaptée. La section « Nous pouvons agir » commence par cette phrase : « Si les parents et les soignants peuvent avoir la responsabilité principale d’élever les enfants… [c’est] une responsabilité collective. (…) Il faut que quelque chose change. Soutenir les parents et les soignants nécessitera une série de changements de politique réfléchis et des programmes communautaires élargis. »

Et de donner une longue liste de préconisations nécessitant une intervention de l’Etat, comme « renforcer le soutien aux programmes d’aide financière à la garde d’enfants tels que les subventions pour la garde d’enfants et les crédits d’impôt sur le revenu pour les enfants ; l’enseignement préscolaire universel ; les programmes d’éducation de la petite enfance, « renforcer la couverture d’assurance publique et privée des soins de santé », « établir un programme national de congés familiaux et médicaux payés » etc…

 

Problème : la famille est un danger pour la santé mentale des parents

Ainsi, le collectivisme est toujours la réponse (et on l’a bien vu dans un article précédent sur le féminisme-marxiste). D’ailleurs, le document parle toujours, et ce n’est pas anodin, « des parents et des soignants », les premiers ne pouvant apparemment se détacher des seconds… Tout le monde deviendra-t-il à sa façon, selon sa charge, un « élevant », pire un « éleveur » ? Ce serait apparemment merveilleux. Mais ce gavage d’aides implique en réalité un lent transfert de l’autorité parentale.

Personne ne s’inquiète de la séparation des enfants, même nourrissons, et des parents, en particulier de la mère, tout le long du jour. Personne ne s’inquiète de la transformation effective des structures familiales… Le document évoque le soin particulier qu’il faut prendre avec les familles monoparentales, les familles recomposées, les familles d’accueil, les familles en concubinage, les familles de parents de même sexe et non binaires… Personne ne s’inquiète de l’effondrement familial qui a cours depuis plusieurs décennies, activé par le matérialisme, l’individualisme, l’effacement de la transmission et surtout la perte du Sens.

La dégradation de la santé mentale est générale. Et ce n’est pas la faute des enfants.

 

Clémentine Jallais