Le commissaire européen à l’Economie numérique, Günther Oettinger, a déclaré jeudi qu’un feu vert au projet de budget français pour 2015 – que la Commission européenne envisage d’accorder lundi – ne serait acceptable que s’il s’accompagnait de contreparties sur les réformes. Il estime en effet que la France est un « pays déficitaire récidiviste », qui ne respecte pas son engagement de ramener son déficit public à la limite européenne de 3% du PIB à la fin de l’année prochaine. « Nous perdrions toute crédibilité si nous prolongions pour la troisième fois le délai accordé sans exiger des contreparties très concrètes et précises », lance-t-il.
A noter que ce Commissaire européen est avant tout un Commissaire allemand, et que sa voix, si elle se veut l’un des multiples échos de l’insatisfaction de Bruxelles quant à la situation française, est peut-être d’abord un avertissement sans frais vers Paris de Berlin, qui, comme principal créancier de l’Union européenne, est en droit de s’inquiéter des déficits à répétition de son voisin. Le fameux moteur franco-allemand cafouille !
Budget : Paris supporte mal l’avertissement de Berlin
A Paris, les propos, publiés notamment – qui plus est – dans un journal français, sont très mal passés. Le ministre des Finances les a dénoncés comme « pas constructifs ». « Il faut cesser ces enfantillages qui consistent à toujours raisonner en termes de sanctions et de récompenses », a ajouté Michel Sapin, assurant que, au contraire, les trois commissaires chargés des affaires économiques et du budget voulaient, eux, « trouver des solutions ». Ils ont néanmoins dû bien rire d’entendre la rue de Solferino appeler à la « démission » de leur collègue…
Vendredi, Michel Sapin n’en a pas moins commencé un tour d’Europe pour expliquer la position française, en se rendant à Madrid et Lisbonne. Deux pays où l’on est plutôt mitigé sur les réactions de Paris, car on y a effectivement pratiqué, sous la pression de Bruxelles, l’austérité. Avec des résultats positifs, assure le ministre espagnol des Finances, Cristobal Montoro : « L’exemple de l’Espagne montre que la politique d’austérité fonctionne. »
Avertissement inopérant
Quoi qu’il en soit, c’est à 2017 (après 2013 et 2015), que Paris fixe désormais le retour de son budget et de son déficit à la norme du seuil européen des 3% du PIB. « Le déficit que nous annonçons est celui que nous tenons », assure Michel Sapin.
A force de remettre à demain, on peut comprendre que ses interlocuteurs n’y croient plus, surtout lorsque le délai paraît bien long à venir. En lançant son avertissement, Berlin s’inquiète d’autant plus que l’urgence ne touche pas seulement la France. En Italie, nombre d’analystes estiment désormais que 2015 est un horizon maximal pour leur pays, qui pourrait bien être contraint, assure-t-il, de quitter la zone euro l’été prochain.
2017 a cependant un point positif pour les autorités françaises : c’est le successeur de François Hollande qui paiera les pots cassés…