Il y a plusieurs façons de voir la condamnation de Marine Le Pen, lundi 31 mars par le tribunal de Paris, à quatre ans de prison et cinq ans d’inéligibilité, avec exécution provisoire qui la rend inéligible immédiatement et probablement jusqu’à la prochaine présidentielle. La première est juridique : quid de sa culpabilité et des conditions de l’application provisoire ? La deuxième politique : qu’est-ce que cela va changer en France d’ici à 2027 ? La troisième replace l’affaire dans le contexte mondial d’une révolution mondialiste marquée par une idéologie dite « progressiste » par ses militants, l’arc-en-ciel. En marche depuis des décennies, elle se caractérise par l’effacement progressif des politiques par les juges, qui prive peu à peu les peuples de leur souveraineté et de tout pouvoir, au profit et sous la surveillance d’un « Etat de droit » mondial. Contrairement à ce qu’on entend ici ou là, la condamnation de Le Pen n’est pas un « séisme politique », ou du moins il n’était pas inattendu. On a envie de dire : R.A.S. Ce n’est qu’un pas de plus dans une longue transition anti-démocratique.
Le Pen inéligible : l’ex-président du CRIF Jakubowicz abasourdi par les juges
La question juridique est à la fois double et très simple. Sur la culpabilité, Marine Le Pen s’estime « innocente », et le trésorier du FN à l’époque, Wallerand de Saint-Just, jugeait le dossier « bétonné », car, selon eux, s’ils ne nient pas que des assistants parlementaires ont été payés par le Parlement européen pour un travail qu’ils effectuaient pour le FN, le député est libre de l’emploi qu’il fait de son assistant. Les juges ont adopté la thèse contraire et conclu au détournement de fonds publics. Là-dessus, les juristes continueront à disputer en appel. Sur l’exécution provisoire en revanche, beaucoup observent qu’elle ne s’appliquait pas dans le cas présent. La réaction la plus emblématique est celle de Jacubowicz, ancien président du CRIF, président d’honneur de la LICRA et homme de gauche, opposant acharné à Le Pen : « Je suis abasourdi. Les critères usuels pour une exécution provisoire, comme le risque de récidive ou la dangerosité, ne me semblent pas ici clairement réunis. Cela prive Marine Le Pen d’un second degré de juridiction, ce que je trouve choquant. (…) Je comprends pourquoi le RN, Marine Le Pen et ses proches parlent d’une décision politique. Leur mise en cause de l’Etat de droit n’est pas totalement illégitime, et c’est ce qui me rend triste. Cette situation questionne l’Etat de droit d’une manière que je ne peux pas ignorer, et c’est ce qui me perturbe le plus. »
Juges vs Peuples : la transition antidémocratique
La question politique préoccupe tout le monde. Une pétition a été lancée par Jordan Bardella, auquel un sondage prédit déjà la première place à la prochaine présidentielle. Et la colère populaire, qu’on a vu s’exprimer par les gilets jaunes ou les agriculteurs, ne demande qu’un prétexte pour se rallumer. Le Premier ministre, François Bayrou, s’est dit « troublé » par « l’énoncé » du jugement et craint des remous. Il est vrai que, poursuivi pour les mêmes faits que Marine Le Pen, il a bénéficié d’une plus grande mansuétude des juges. Jean-Luc Mélenchon de son côté a déclaré que « la décision de destituer un élu devrait revenir au peuple ». Il y a quinze jours, il disait déjà : « Dans un Etat de droit, tout le monde doit avoir le droit de faire appel. Si on le refuse à Marine Le Pen, alors ce droit sera refusé à tout le monde, et ce serait une erreur. » Lui aussi prêche pour son saint, car il se trouve menacé de poursuites. Mais il soulève une question fondamentale que beaucoup de Français se posent et que la gauche hors Mélenchon souhaite étouffer. Pour Raquel Garrido, l’ancienne députée insoumise qu’il a virée, le patron de LFI « met en opposition les juges et les peuple, ce qui est un narratif d’extrême-droite et de la droite affairiste ».
La révolution arc-en-ciel suspend la démocratie si nécessaire
Cette phrase est caractéristique : elle invoque la loi et la morale contre les méchants. C’est celle des thuriféraires de l’Etat de droit, et en particulier du juge qui présidait le tribunal qui a condamné Marine Le Pen, Bénédicte de Perthuis, grande admiratrice de la lutte anti-corruption et de ceux qui l’ont menée en France. Et bien sûr, sur le papier, c’est très bien. Qui peut être pour la corruption ? Qui peut être contre la justice ? Personne. Et c’est ce sentiment commun, normal, sain, qu’exploite sans vergogne la révolution arc-en-ciel. Lancée d’abord, chronologiquement, à travers l’écologisme et le devoir imposé de sauver la planète, elle a posé dès les années 1990, tant par la bouche de scientifiques renommés que par celle des politiques et des ONG, que le système démocratique prédisposait mal à prendre les bonnes décisions pour sauver la terre. Dans la foulée, il s’est agi de discréditer, mettre au pas, et dessaisir les politiques dans ce qu’on doit nommer une transition démocratique. On en a vu un premier pas lorsqu’en 1991, le processus des élections en Algérie fut stoppé parce qu’il allait donner la victoire au FIS – laquelle ne plaisait pas à la communauté internationale et à l’Etat de droit. Il ne s’agit pas ici de défendre le FIS, mais de noter ce procédé de suspension de la démocratie.
La lutte anti-corruption moyen de la transition antidémocratique
Encore n’était-ce qu’un pis-aller autoritaire décidé dans l’urgence. Pour assurer en douceur la transition antidémocratique, la révolution arc-en-ciel a mis en place un processus non aversif, efficace dans la mesure même où il recueille l’approbation générale, la lutte contre la corruption. L’approbation est si générale qu’elle mène les cibles de l’opération, les politiques, à contribuer à leur propre élimination. En France, par exemple, ils ont voté la loi qui a permis à Bénédicte de Perthuis d’exécuter Marine Le Pen. Incapables dans l’ensemble de faire la politique que le peuple demande et tremblant de peur pour leur avenir, ils n’ont rien d’autre à offrir que leur transparence et leur obéissance. Il faut dire que le dispositif de soumission installé par la révolution arc-en-ciel est puissant. Coupable ou non, Sarkozy a vu le ciel lui tomber sur la tête. Et François Fillon, archi-favori de la présidentielle de 2017 a été démoli par la seule ombre d’un procès, dont le jugement, d’ailleurs inique, ne tomba que cinq ans après. La peur du juge fait rentrer le politique sous terre, qu’il s’aplatisse ou qu’il se rebelle.
Le proc près la Cour de cass menace Marine Le Pen
Marine Le Pen s’est rebiffée. Elle a déclaré sur TFI qu’elle était victime d’une « décision politique » et que « l’Etat de droit a été totalement violé » Elle a tort sur ce dernier point : ce qu’on nomme l’Etat de droit n’est pas le respect du droit, on va le voir plus loin, mais un épouvantail politique, et en ce sens il a parfaitement fonctionné. Mais en revanche elle a raison de dénoncer une décision politique. La meilleure preuve en est la réaction effarouchée du procureur général près la Cour de cassation Rémy Heitz : « La justice n’est pas politique, cette décision n’est pas une décision politique mais judiciaire, rendue par trois juges indépendants, impartiaux. » Jusqu’ici, on sourit. Mais la suite est une menace en bonne et due forme. Heitz décrète « inadmissibles » ces « attaques très personnalisées » contre des magistrats et avertit qu’elles « peuvent faire l’objet de poursuites pénales ».
L’Etat de droit est la révolution arc-en-ciel elle-même
Or il faut bien voir ce que tout cela signifie. Les plus hauts magistrats de la République jouent de leur position sociale pour imposer une autorité de nature politique. En particulier, la lutte contre la corruption, approuvée par tous, est une façon de mettre les politiques au pas. Soit ils sont irréprochables et faute d’argent sont impuissants, soit ils sont abattus. En somme, cela revient à ce que la société se conforme à l’Etat de droit. Tout le monde applaudit. Mais en soumettant les politiques, on soumet aussi les peuples, qui n’ont pas d’autres représentants. On soumet ainsi les peuples à qui ? Aux règles de l’Etat de droit et à ceux qui les décident. L’Etat de droit, mais quel droit ? Qui le définit et qui l’applique ? L’Etat de droit dit qu’il faut sauver Gaïa, adorer la Pachamama, ne pas être homophobe, mettre son masque contre les pandémies. En somme, l’Etat de droit, c’est la révolution arc-en-ciel elle-même. Et pour assurer la soumission des peuples à cette subversion mondiale et mondialiste, il y a les juges. Les juges qui viennent de mettre au pas Marine Le Pen. Les juges dont Laurent Fabius, ancien président du Conseil constitutionnel, a théorisé l’usurpation. Les juges qui avaient, se substituant au législateur, institué aux Etats-Unis le droit à l’avortement quand la Cour suprême avait rendu l’arrêt Roe contre Wade, abrogé depuis. Les juges qui sont aujourd’hui les prétoriens de la révolution arc-en-ciel, chargés de tenir les politiques en laisse pour établir son règne sur les peuples de la terre.