Les regrets de Manuel Valls en Algérie

Regrets Valls Algérie
Suite à l’affaire des visas refusés par les autorités algériennes, plusieurs médias ont décidé de boycotter le dépla­ce­ment du premier ministre en Algé­rie.

 
Manuel Valls a regretté samedi, dès son arrivée en Algérie, le refus des autorités algériennes d’accorder des visas à des journalistes français. Mais les regrets du premier ministre français quant à la presse de son pays étaient manifestement secondaires. Ce qui comptait surtout pour lui c’est que rien ne vienne ternir la relation entre l’Algérie et la France…
 
Accompagne d’une dizaine de ses ministres, le chef du gouvernement français est arrivé à Alger pour une visite de deux jours, destinée notamment à conforter les relations économiques entre Paris et Alger, à l’occasion d’un troisième « comité interministériel de haut niveau ».
 

Manuel Valls en Algérie

 
« Nous avons tant à faire ensemble ! », a lancé Manuel Valls à son homologue algérien Abdelmalek Sellal. « Nous sommes ici parce que l’amitié entre l’Algérie et la France dépasse les petits problèmes. » Et Dieu sait si, effectivement, on en a dépassé des « petits » problèmes…
 
Le dernier en date tient donc à l’affaire des « Panama papers », dont le traitement par Le Monde, faisant apparaître de façon hasardeuse une photo sur laquelle figurait le président Bouteflika pour illustrer un article mettant en cause des proches du chef d’Etat algérien.
 
Or, rien ne peut venir remettre en cause le lien franco-algérien. C’est ce que Manuel Valls a déclaré au soir de son arrivée à quelques journalistes, algériens donc, en évoquant ce « petit » problème.
 
« Je l’ai regretté mais ce qui compte pour moi, c’est cette vision stratégique que nous avons qui est indispensable au vu des difficultés et des défis que nos pays connaissent », a déclaré le premier ministre.
 

Des regrets sans plus…

 
« L’amitié va de pair avec la franchise et le fait de se dire les choses très directement, mais aussi de se comprendre les uns les autres », a-t-il poursuivi, en assurant qu’« aucun principe n’est sacrifié ».
 
On ne sait ce qu’en auront pensé les journalistes français interdits de visite en Algérie, ni ceux de leurs confrères qui ont boycotté, par solidarité, ce voyage…
 
Mais pour Manuel Valls, cela n’a strictement aucune importance : « Des deux côtés, nous sommes plus forts que ceux qui souhaitent qu’il y ait des crispations. Il y a la volonté d’aller de l’avant et de mettre en œuvre ce qui a été décidé depuis 2012. »
 
Cette question journalistique n’est sans doute qu’un « petit » problème. Mais là n’est pas la question, tant il est visible que tout autre problème, grand ou petit, aurait connu le même traitement. L’important, c’est de faire ami-ami avec Alger. A l’aune de la repentance qui semble devenu la grille de lecture de ces relations franco-algériennes. Ce qui permet à la presse algérienne de s’en donner à cœur joie en évoquant des « tensions », un « malaise » – histoire de faire monter la pression. Ou la sauce.
 

La force de l’habitude – et de la repentance

 
L’irritation d’Alger aura ainsi permis aux autorités algériennes de se mettre un peu plus en situation de force. A moins que ce ne soit le gouvernement français qui ne se soit mis un peu plus en position de faiblesse. Selon un diplomate français, lorsqu’il a été convoqué par les autorités algériennes, « l’ambassadeur [français à Alger] a expliqué que les lignes éditoriales d’un journal sont fixées par l’équipe éditoriale, ce qui n’a rien à voir avec le gouvernement »…
 
On aimerait que cette séparation des pouvoirs soit une réalité en toute circonstance. La liberté de la presse devrait effectivement être un principe. Mais lorsqu’elle ne s’exprime qu’à l’occasion d’un coup de sang de politiques étrangers dont on semble parfois contester le caractère démocratique, cela ressemble surtout à un lâchage…
 

François le Luc