C’est aujourd’hui, mardi 22 septembre, que doivent se rencontrer à Bruxelles les 28 ministres de l’Intérieur de l’Union européenne, en attendant le Sommet extraordinaire de mercredi. Mais hier, la réunion de leurs diplomates n’avait encore trouvé aucun accord sur le sujet, en particulier sur les quotas de distribution des migrants européens. Les pays veulent mener leur propre barque, en particulier la Hongrie avec sa décision concomitante d’autoriser son armée à utiliser des armes non létales. Les grands mots de Ban Ki-moon n’y feront rien. L’impasse est de taille – mais les migrants rentrent toujours.
Bruxelles n’arrange rien
Dix heures de négociation pour rien. « Il n’y a à ce jour aucune solution » a confié l’un des ambassadeurs européens au quotidien berlinois Die Welt. Et il ne s’agissait que de 120.000 réfugiés à répartir. Les pays ne sont pas d’accord sur le mode de calcul des quotas, sur la liste des pays susceptibles d’être « soulagés » ni même sur le montant de « l’amende » en cas de refus de la totalité ou d’une part du quota imposé…
A premier abord, le système de quotas fixes en fonction de la population n’est plus d’actualité. L’Allemagne souhaiterait imposer un système de quotas d’accueil non-plafonnés, ce que refuse nombre de capitales. Et il faudrait, selon la présidence luxembourgeoise de l’UE, vu l’importance de la question, un vote à l’unanimité.
Une politique européenne « homogène » avec des quotas d’accueil non-plafonnés ?
Pourtant ce n’est pas faute à l’élite européenne d’avoir mis les pays réfractaires souq pression. Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, s’est déclaré lundi extrêmement inquiet de la dégradation de la situation des migrants et réfugiés qui arrivent en Europe. Il a appelé les pays européens à respecter leurs obligations internationales, y compris le droit de chercher asile et l’interdiction du refoulement, conformément à la lettre et l’esprit de la charte des Nations unies…
De son côté, le patron de l’agence européenne de surveillance des frontières Frontex a insisté, ce même lundi, sur la nécessité d’instaurer « de façon urgente » une politique européenne frontalière « homogène » via un « recensement » méthodique. Il réclame aussi à l’UE « un soutien humain » plus important face à un flux de réfugiés « extrêmement haut ».
La Hongrie légalise les tirs… non mortels
Mais qui veut d’une politique migratoire européenne « homogène » ? Les pays grondent. Si l’Allemagne a dit oui à de la main d’œuvre fraîche – applaudie par le grand patronat – ses politiques montent au créneau : même les Verts commencent à parler d’une « limite maximale d’accueil », d’une « vision pragmatique à adopter »… Lundi, les autorités croates ont réclamé que la Grèce cesse de transférer vers le reste de l’Europe les migrants et réfugiés qui arrivent sur son territoire en provenance du Moyen-Orient. Et surtout la Hongrie a durci encore le ton.
Elle a adopté lundi une nouvelle législation renforçant encore les pouvoirs de la police et de l’armée, autorisant en particulier l’usage, dans certains cas, d’armes non létales (balles en caoutchouc, engins pyrotechniques, grenades lacrymogènes et fusils à filet), des armes dites « coercitives ». Dans la continuité de sa nouvelle politique migratoire entrée en vigueur le 15 septembre, elle autorise de même les contrôles d’identité, les garde-à-vue ou encore les perquisitions de domiciles privés… sans oublier les missions de renseignement et de surveillance à l’extérieur de ses frontières nationales.
Le Routard et son guide gratuit « spécial migrants » : pour une Europe irréelle
Viktor Orban a déclaré que l’Europe devait se préparer à « l’afflux de millions de réfugiés » et que la Hongrie était « prête à défendre ses frontières si l’Europe ne veut pas défendre les siennes »… Le pays a même acheté des espaces publicitaires dans des journaux au Liban pour avertir les candidats à l’émigration, en langue arabe et anglaise, qu’ils risquaient la prison s’ils tentaient d’entrer illégalement sur son territoire. Plusieurs milliers de migrants – 225.000 migrants depuis le début de l’année – ont continué à entrer en Hongrie au cours du week-end, principalement depuis la Croatie, avant d’être conduits à la frontière autrichienne par les autorités (qu’on cesse d’accuser Budapest d’« inhumanité » !).
A rebours de l’ambiance générale du pays réel, des associations appellent à l’ouverture totale des frontières. De « Médecins sans frontières » au guide du « Routard » qui lance à grands renforts de publicité, une édition gratuite pour les migrants – on n’en attendait pas moins de sa part. Ce guide de 90 pages, rempli d’images, s’adressera aux ONG pour les aider dans leurs communications avec les réfugiés. Une opération « humaniste » face aux « poules mouillées » du gouvernement selon le directeur du Routard. Le manuel s’appellera « Hello »…
« Hello » aux millions de migrants que Viktor Orban a promis à l’Europe.