Une série d’études conteste l’efficacité du vaccin contre la grippe chez les seniors

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Le débat autour du vaccin contre la grippe s’intensifie avec des chiffres contradictoires et des doutes sur l’efficacité de la vaccination. Des études épidémiologiques menées aux Etats-Unis assurent que la vaccination antigrippale réduit le risque de mortalité hivernale toutes causes confondues de 50 % parmi les seniors. Or, alors que le taux de vaccination contre la grippe des plus de 65 ans a crû de 15 % à 20 % avant 1980 à 65 % en 2001, de façon tout à fait inattendue, les estimations de mortalité due à la grippe dans cette tranche d’âge ont… augmenté sur la même période. Des doutes corroborés par d’autres travaux, dont une parution dans le British Medical Journal.
 

L’étude du JAMA Network soulève la contradiction hausse de la couverture vaccinale-hausse de la mortalité

 
Dans une étude parue dans le Journal of the American Medical Association (JAMA Network), les scientifiques américains Lone Simonsen, Thomas A. Reichert et Cecile Viboud ont tenté de concilier les deux observations contradictoires d’une hausse simultanée de la couverture vaccinale et de la mortalité en ajustant les estimations de hausse de mortalité liée à l’âge et l’augmentation de l’impact des épidémies de virus de la grippe A (H3N2). Ils ont utilisé un modèle « de régression cyclique » pour établir des estimations saisonnières de mortalité liée à la grippe (surcroît de décès) chez les seniors, pour cause de pneumonie et de grippe d’une part, pour d’autres cause d’autre part, et cela sur les 33 hivers de 1968 à 2001. Les saisons marquées par une forte présence de H3N2 ont été séparées des autres. Les chiffres ont été stratifiés par tranches d’âge de cinq ans.
 
Pour les patients âgés de 65 à 74 ans, le taux de surmortalité dans les saisons de forte prévalence de grippe A (H3N2) a régressé entre 1968 et le début des années 1980, puis est demeuré à peu près constant au-delà. Pour les plus de 85 ans, le taux de mortalité est resté stable tout le long. Les taux de mortalité au cours des saisons dominées par les grippes A (H1N1) et B n’ont pas changé. Les autres causes de surmortalité des plus de 65 ans n’ont jamais dépassé les 10 %.
 

« Nous n’avons pas pu corréler la couverture vaccinale croissante à un quelconque déclin du taux de mortalité »

 
Lone Simonsen, Thomas A. Reichert et Cecile Viboud tirent des conclusions dérangeantes sur la vaccination contre la grippe : « Nous attribuons le déclin de la mortalité due à la grippe chez les 65-74 ans au cours de la décennie qui a suivi l’épidémie de 1968 à l’acquisition d’immunité face au virus alors émergent de la grippe A (H3N2) ». Ils insistent : « Nous n’avons pas pu corréler la couverture vaccinale croissante après 1980 à un quelconque déclin du taux de mortalité dans un des segments d’âge. Comme moins de 10 % de tous les décès hivernaux ont pu être attribués à la grippe pour chacune de ces saisons, nous concluons que les études ont substantiellement surestimé le bénéfice de la vaccination ».
 
Ils précisent qu’une évaluation crédible de l’impact de la grippe sur la mortalité « est un exercice difficile » car le diagnostic de l’infection grippale est rarement confirmée en laboratoire et « qu’elle est souvent éliminée avant l’établissement des complications secondaires qui sont la cause réelle de la mort du patient ». Ce qui impose de déterminer de façon indirecte la mortalité due à la grippe à l’aide de modèles statistiques qui estiment le surplus saisonnier de pneumonie et de grippe ou de mortalité générale à partir d’une moyenne de mortalité projetée. Les scientifiques relèvent aussi que la mortalité est plus élevée lors des saisons dominées par la grippe A (H3N2) que par celles dominées par la grippe B et A (H1N1).
 

Pour Peter Doshi, de John-Hopkins, il n’existe aucune preuve que le vaccin réduise le nombre de décès chez les seniors

 
Par ailleurs, un scientifique de l’Université Johns-Hopkins de Baltimore, Peter Doshi, a publié un rapport dans le prestigieux British Medical Journal affirmant que la politique des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies consistant à recommander systématiquement le vaccin antigrippal est basée sur « des études de faible qualité qui ne corroborent pas les allégations » et qu’il n’existe aucune preuve que le vaccin réduise le nombre de décès chez les seniors. Doshi cite une étude australienne qui a également révélé des risques significatifs pour les enfants et que « un enfant sur 110 de moins de cinq ans avait des convulsions suite à une vaccination contre la grippe H1N1 en 2009 ».
 
Au cours des essais cliniques du vaccin Fluzone contre la grippe, distribué par Sanofi-Pasteur, 23 personnes âgées sur 3.833 sont décédées, selon la notice du médicament, publiée par le Health Impact News, et 226 autres ont subi des « effets indésirables graves ». Le fabricant nie tout lien entre les décès et le vaccin antigrippal.
 

L’efficacité du vaccin contre la grippe chez seniors surévaluée

 
Ces dernières années, 135 millions de doses de vaccin contre la grippe ont été vendues aux Etats-Unis pour un taux de vaccination des plus de 65 ans évalué à près de 70 % par l’OCDE. Ce taux est de 50 % en France et son augmentation est fortement encouragée par l’Institut Pasteur. Le groupe français Sanofi-Pasteur est le premier fabricant de vaccins contre la grippe au monde avec 200 millions de doses par an.
 

Mattieu Lenoir