Pour assurer la globalisation numérique façon Facebook, Mark Zuckerberg prône la globalisation politique

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Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, vient d’illustrer combien la globalisation politique est l’arme de la modernité techno-marchande pour permettre une nouvelle étape de sa gigantesque croissance financière. Dans un récent entretien accordé au chroniqueur Farhad Manjoo du New York Times Magazine, Zuckerberg pose l’élaboration d’une « superstructure globale », une autorité mondiale en d’autres termes, comme une nécessité. Dans la veine du progressisme éternel et de l’ingénierie humaine, le gourou de Melo Park estime dans une syntaxe plus qu’approximative « qu’une infrastructure sociale a besoin d’être construite pour les problèmes modernes afin que l’humanité passe au niveau suivant ». Nous traduisons au plus près à dessein. Et ça continue, toujours dans un anglais inquiétant d’épaisseur : « Avoir plus de gens orientés pas seulement vers des choses de court terme mais vers la construction d’une infrastructure sociale de long terme qui doit être construite à travers toutes ces choses afin de permettre aux gens de se rassembler, ça va devenir une chose vraiment importante durant les prochaines décennies. » Oui, l’un des hommes les plus puissants de la planète parle ainsi. Régression du progressisme.
 

Mark Zuckerberg veut « un niveau de coordination » mondial

 
Plutôt que de s’enferrer dans des raisonnements où le binaire le dispute à la rustrerie, Zuckerberg passe rapidement aux questions concrètes, par exemple à ce safety check (le « contrôle d’absence de danger »), outil qui permet d’établir « publiquement » sur sa page qu’on est sain et sauf en cas « d’événement dangereux » – comme l’attentat de Manchester.
 
Facebook permet aussi de recevoir une alerte si quelqu’un se connecte sur votre compte à partir d’un appareil inconnu. Mais cela ne suffit pas. Pour éviter que les constructions socio-informatiques ne s’écroulent un jour prochain comme un château de cartes, et pour gérer la mondialisation des échanges numériques et leurs corollaires financiers, la star de Facebook jargouine que « nous arrivons à un point où les opportunités les plus grandes dans le monde… (il se reprend) les problèmes comme prévenir l’extension des pandémies ou mettre un terme au terrorisme, toutes ces choses, elles exigent un niveau de coordination et de connexion qui je crois ne peut pas être seulement résolu par les systèmes actuels dont nous disposons ».
 

L’analyste Fahrad Manjoo entrevoir « une version digitale des systèmes institutionnels globaux »

 
Fahrad Manjoo, qui a l’élégance de ne pas relever le consternant niveau de langage de la diva des « likes », ne s’en inquiète pas moins de la nature de ses prétentions. « Zuckerberg prône une sorte de version digitale des systèmes institutionnels globaux que le monde occidental a commencé de construire après la Seconde Guerre mondiale », relève notre chroniqueur, qui enchaîne : « Mais parce qu’il est président de société et non président élu, il y a quelque chose d’inquiétant dans son projet. » D’autant que Zuckerberg se pose en acteur-clé de l’avenir : « Il présente Facebook – et, du fait qu’il détient la majorité absolue des voix au sein de la compagnie, il se présente lui-même – comme un moteur central de la prochaine génération humaine. Il y a un petit problème cependant, c’est que la mission qu’il s’assigne suinte la mégalomanie, nonobstant sa propre sincérité. »
 
D’autant que la vision du patron de Facebook implique de faire du « passé » – notre présent – table rase. Conjonction historique entre les messianismes sécularistes marxiste et techno-marchand. Fahrad Manjoo pourtant relève les limites de l’exercice : « Créer de nouvelles “infrastructures sociales” impose normalement de détruire les anciennes. Mais si vous ratez la démolition, vous risquez de condamner ce qui vient ensuite.  Sur la scène disruptive des médias, Zuckerberg paraît finalement avoir enfin compris ce problème et pourrait tenter de le résoudre. Néanmoins, dans le même temps, Facebook fonce tête baissée vers des zones glauques, découvrant de nouveaux obstacles contre-utopiques à chaque tournant. »
 
Zones glauques ? On peut comprendre l’usage des réseaux sociaux par des acteurs opposés au système, par des séides d’une autre mondialisation, par exemple celle de l’islam politique ou du communisme chinois, par les hackers de tous poils et par tout ce que l’humain compte de perversions, individuelles ou collectives. Internet, « cloaca maxima », pour reprendre l’expression de Patrick Buisson.
 

La globalisation numérique entamée par Facebook devrait donc se traduire dans la globalisation politique…

 
Lucas Nolan, spécialiste du sujet pour le site Breitbart.com, fait donc le lien entre ces « adversaires » de l’expansion de la globalisation numérique heureuse – délibérément provoqués – et les prétentions politiques de Zuckerberg. Ces dernières, fussent-elles exprimées dans un langage frisant la débilité, rejoignent d’autres intérêts, au moins aussi gigantesques : industriels, financiers, géopolitiques, oligarchiques et bien sûr idéologiques. Nolan écrit : « En observant la récente décision de Facebook d’embaucher des organes de filtration marqués à gauche tels qu’ABC News, Snopes (un site anti-rumeurs), Politifact (qui prétend juger des actes des présidents américains) et même Correctiv, financé par George Soros, et de leur demander de chasser les “informations fausses” de sa plateforme, on peut se poser de sérieuses questions sur la nature des “superstructures globales” que Mark Zuckerberg entend construire. » L’enjeu est de taille : Facebook affiche deux milliards de comptes.
 

Matthieu Lenoir