Italie : un couple coupable de « harcèlement olfactif »

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Même si le délit n’est pas encore inscrit en ces termes dans le code pénal, le concept d’« agression olfactive » a reçu ses lettres de noblesse en Italie où un couple passionné de cuisine a été déclaré coupable pour cause d’odeurs trop envahissantes. L’affaire est allée jusqu’en cassation où des juges à la créativité débordante ont exhumé un vieil article de loi pour le réinterpréter… à leur sauce. L’article 674 du code pénal ne pénalise-t-il pas depuis les années 1960 « le jet dangereux d’objets » ?
 
S’étant interrogés sur la distance à laquelle un objet peut être légitimement jeté, les juges ont estimé que dans le cadre de la copropriété où sévissaient les amateurs de riches sauces pour pasta et de friture fraîche les bornes de la tolérance avaient été franchies. On n’a même pas fait appel à un expert.
 

Le « harcèlement olfactif », nouvelle invention de la Cour de cassation

 
Ironie des choses, le délit a été jugé prescrit comme l’avait déjà constaté une cour d’appel en 2014 dans une affaire qui dure déjà depuis plus de treize ans – non pas à cause de la lenteur de la justice mais sans doute parce que les voisins du couple de Roberto V. et Maria P., aujourd’hui âgés de 78 ans, n’ont pas respecté tous les délais de procédure.
 
Mais le principe est posé et les revues professionnelles de restauration en Italie s’interrogent sur les conséquences de cet arrêt de principe, qui ouvre les vannes à une multiplication de plaintes. Les disputes autour d’odeurs, qu’elles soient nauséabondes ou trop succulentes, se comptent selon certaines sources à environ un million par an.
 
Encore faut-il se méfier de ces infos : voilà un exemple parfait de « fake news » où la reconstitution des faits s’avère très difficile au vu des articles contradictoires, et aboutit à des publications fantaisistes où le vrai se mêle au faux. La presse anglaise croit ainsi savoir que le couple gastronome s’est fait infliger une amende de 2.000 euros pour cause d’abus de sauce tomate mijotant sur le feu.
 

Le couple coupable d’Italie aimait la pasta – mais quid des curry ?

 
Il semble – d’après la presse régionale italienne plus au fait de ce qui se passe à Monfalcone, lieu de l’agression olfactive – qu’une fissure du canal d’évacuation de la hotte des époux P. soit en cause, ce qui explique que seuls les voisins du 3e de l’immeuble où leur cuisine se situe au rez-de-chaussée aient été suffisamment incommodés pour aller se plaindre devant la justice, le tout sur fond de vieilles rancœurs. Cela leur valait aussi de suivre en direct les mouvements et conversations des malheureux amateurs de fritto misto. Du supplice de Tantale à celui du reality show imposé ?
 
Mais on apprend avec intérêt, au passage, que si les querelles de voisinage olfactif concernent souvent des odeurs de cuisine trop envahissantes, ou les nuisances des urines de chats ou de chiens, une nouvelle catégorie d’irritation progresse à la vitesse grand V : celle des odeurs « allochtones », avec une mention spéciale pour les longs rissolages d’ail et les parfums de curry et autres épices odorantes propres aux habitudes alimentaires de gens venus d’ailleurs.
 
Dans les « condominii » italiens, il paraît que le problème prend de l’ampleur.
 

Anne Dolhein