Ramadan, Hulot, Schiappa : féminisme ou déontologie ? Le système hésite

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Depuis l’affaire Weinstein le système utilise le féminisme pour faire la révolution. Mais, avec les cas Ramadan et Hulot, ses courants s’affrontent, et la déontologie est mise en avant pour sauver le soldat avancé de l’écologie.
 
Tariq Ramadan est un prédicateur musulman radical mais adepte de la taqqiya. C’est un homme dangereux et dissimulé, un ennemi politique de l’Europe, une catastrophe religieuse. Une part du système qui nous gouverne et de la Révolution qui nous emporte le vénère, le présentant comme un islamologue (ou un philosophe) suisse, ce qui suggère qu’il est régulier comme une horloge et pur comme la neige des Alpes. Un autre courant de cette même Révolution, moins volumineux mais aussi influent, prend d’ordinaire des ménagements avec lui, mais le hait, comme arabe et comme « islamiste ».
 

Ramadan, chouchou du système, tête de turc du féminisme

 
Cela explique sans doute l’étrange manière dont on l’accuse de viols et dont la justice mène l’affaire. Pourquoi a-t-il été mis en détention préventive ? Quelles charges précises l’exigent ? Dans un pays où le secret de l’instruction n’est plus qu’un vieux souvenir, aucun élément probant n’a été produit. Plus, un alibi, un billet d’avion qui situerait M. Ramadan en plein ciel à l’heure où son accusatrice prétend qu’il s’envoyait en l’air, n’aurait pas été vérifié. Plus, il aurait été mis de côté pendant plusieurs semaines. La sénatrice des Bouches-du-Rhône Samia Ghali n’a-t-elle pas raison quand elle demande : qui juge-t-on, le violeur ou le musulman ? La contradiction entre deux coteries du système, entre deux conceptions du bien, d’un côté le féminisme, de l’autre un théoricien du grand remplacement, ne se passe pas bien. Ca renâcle. Les réseaux d’influence s’équilibrent.
 

Hulot, super héros, serait-il victime de « rumeurs »

 
Ici survient l’affaire Hulot. Certains disent qu’il n’y a pas d’affaire Hulot. Qu’elle sert à détourner l’attention du public du limogeage de Mathieu Gallet, président de Radio France et membre connu de la communauté homosexuelle, par le CSA après l’intervention de Françoise Nyssen, ministre de la culture, à la demande d’Emmanuel Macron. L’épouse de celui-ci n’aurait pas supporté la rumeur d’une liaison entre Mathieu Gallet et Emmanuel Macron, fondée ou non. C’est possible. L’affaire Hulot fait diversion au bon moment, mais cela ne veut pas dire qu’elle n’a pas de contenu. Comme l’a noté justement Rachida Dati, ancien garde des Sceaux, les accusations visant Nicolas Hulot et un autre ministre, Gérard Darmanin, « ne sont pas des rumeurs ». Il s’agit de faits précis, décrits par des victimes potentielles identifiées. Ils ne sont pas plus vrais ni faux a priori que ceux qu’on reproche à Tariq Ramadan, Dominique Strauss-Kahn, Georges Tron, Denis Beaupin ou Harvey Weinstein. Des hystériques peuvent s’acharner contre une personnalité connue pour mille raisons, des prédateurs peuvent avoir profité de leur pouvoir pour toucher à une femme sans qu’elle le veuille. C’est parole contre parole, parole de s… contre parole de porc.
 

Accusé de viol par Pascale Mitterrand, Hulot nie

 
Cependant, dans le cas Hulot, il y un témoignage précis, donné sous couvert d’anonymat au journal Ebdo, dont on a su depuis qu’il venait de Pascale Mitterrand, petite fille de François et fille de Gilbert. Les faits se seraient passés en 1997, elle était alors photographe, il animait l’émission Opération Okavango, elle travaillait pour lui, il lui a demandé de venir prendre des photos chez lui, et la suite se devine. Elle a porté plainte, plainte classée sans suite, pour deux raisons. Par ce que le magistrat chargé du dossier a constaté des « versions contradictoires quant au consentement de la relation sexuelle précitée ». Et par ce que la plainte date de 2008, onze ans après les faits, ipso facto prescrits. Pourquoi Pascale Mitterrand a-t-elle attendu tout ce temps ? Réponse : parce qu’elle ne «voulait pas de procès », ni « jamais se retrouver face à Hulot », mais qu’elle « voulait que ce soit écrit quelque part ».  
 

Se taire par déontologie ? Mais quid de Weinstein et Ramadan ?

 
C’est plausible. Rien ne permet de dire quelle est la bonne version des faits, la sienne ou celle de Nicolas Hulot. La question à la mode, dans cette incertitude, est : Ebdo avait-il le droit de « sortir » son enquête ? » Les éléments tangibles manquent à ce stade. Fallait-il publier ? On laissera chacun à sa conscience », estime le patron de Libération Laurent Joffrin. Apolline de Malherbe, éditorialiste à BFMTV a renchéri : « Je ressens la même perplexité que Laurent Joffrin ». Ces chevaliers blancs de la presse, si chatouilleux sur la déontologie d’Ebdo, n’ont pourtant pris aucune précaution pour  publier, à propos de Weinstein ou de Ramadan, des infos qui manquaient tout autant « d’éléments tangibles ». Ebdo est un tout nouveau journal, il refuse la publicité et entend vivre de ses seuls lecteurs, ce qui peut agacer les grands groupes. En tout cas la partialité des médias se lit dans le vocabulaire qu’ils emploient. Ils disent que Nicolas Hulot « dément » l’accusation. C’est une erreur tendancieuse : il la nie. Démentir signifier rectifier une erreur, rétablir la vérité en faisant litière d’une accusation infondée. Pour l’instant, la presse a pris le parti du ministre alors que rien ne permet de trancher.
 

Tout le système appelle à sauver le soldat Hulot

 
Elle n’est pas la seule. Le premier ministre Edouard Philippe l’a assuré de son « soutien » et le président de la république lui a demandé de « tenir bon ». Plus, Marlène Schiappa soi-même, la madone du féminisme, la préposée gouvernementale à l’égalité homme femme, a volé au secours du ministre de l’environnement. Elle juge « irresponsable » le papier d’Ebdo, dans une tribune donnée au Journal du Dimanche. Irresponsable « pour les hommes accusés, peut-être innocents mais condamnés a priori par des articles ». Et de rappeler que « la justice se rend dans les tribunaux, pas dans les médias ». Et de découvrir que « le viol est une affaire trop grave pour être instrumentalisée politiquement ». Diable ! On aurait aimé relever la même prudence dans d’autres cas.
 

L’oncle qui veut « casser la gueule » à Nicolas Hulot

 
Tant de déontologie accumulée finit par agacer la rédaction d’Ebdo, qui a mené son enquête plutôt plus proprement que la moyenne des médias, et qui assure qu’elle a encore d’autres témoignages dans sa manche. En attendant, on retiendra celui d’un oncle de Pascale Mitterrand, qui n’est pas content : « Nous avons mis longtemps à savoir et, pour ma part, je ne l’ai su que des années plus tard, incidemment, au détour d’une conversation chuchotée. Mais si je croise Hulot un jour, je lui mets mon poing sur la figure. » Ce garçon n’est pas raisonnable. On n’a pas le droit de déboulonner une icône de l’écologisme. Ce type peut faire n’importe quoi, c’est un saint, puisqu’il porte l’espérance du système. Il en peut rouler carrosse à grosse vignette, affréter des jets, trousser le tendron plus ou moins consentant, ce n’est pas grave, c’est un maréchal de l’armée du changement climatique. 
 

Schiappa préfère la déontologie au féminisme

 
C’est pourquoi les poids lourds du système ont dépêché les champions de la déontologie pour donner à croire au public qu’il est mal pour un journal de faire paraître des informations, et une championne du féminisme pour persuader le même public qu’il est mal pour la cause des femmes de donner des informations sur une agression sexuelle. Le ministre de l’environnement s’en tirera-t-il ? On n’en sait rien. Mais il est clair que le système a donné sa consigne, il faut sauver le soldat Hulot. Quel que soit le résultat, les contradictions du système débordent et menacent de laisser des traces. Le féminisme est un moyen remarquable de la Révolution parce qu’il mène vite à un empyrée de frénésie où le verbe échappe à la raison. En particulier, les accusations d’atteintes sexuelles, en l’absence de caméra de surveillance, peuvent rarement se prouver, surtout vingt ans après. Le hic, c’est que personne n’est à l’abri. Même les super héros. Le féminisme, moyen de la Révolution, triomphe, la Révolution dans son ensemble triomphe, et plus ils triompheront, plus ils entreront en conflit.
 

Pauline Mille