Les membres du Parti communiste en Chine surveillés par des applications mobiles

Membres Parti communiste Chine surveillés applications mobiles
 
Presque 90 millions de membres… le Parti communiste, en Chine, devait bien trouver un moyen pour contrôler, surveiller et inspirer comme il faut ces précieux admirateurs de sa loi ! Le monde merveilleux des smartphones lui en a fourni un. Plus de cent applications mobiles ont été développées pour aider les membres du Parti à rester… fidèles. Paiements des cotisations, réseaux de sociabilisation, mais aussi quizz de connaissances, cours et discours du grand chef Xi Jinping en ligne…
 
Le maniement effectif est évidemment suivi, enregistré, évalué. Avancées et sanctions en découleront. Incroyable, encore une fois, ce que les avancées numériques peuvent fournir d’instruments coercitifs…
 

Être un bon membre du Parti

 
Le projet, nommé magnifiquement « China’s Good Party Member », a généré plus d’une centaine d’applications, principalement conçues pour les comités de Parti, les entreprises d’État ou les universités, réalisées bien évidemment dans la couleur rouge, avec des logos attendus comme la faucille et le marteau…
 
Pour l’instant, 10 % des membres du Parti en ont téléchargé, mais ce nombre est voué à augmenter. Surtout à l’approche du 19e Congrès national du Parti communiste chinois (PCC), le 18 octobre prochain. Ils n’en seront que mieux formés.
 
De fait, ces applis ont été développées spécialement pour superviser et maîtriser cette masse de fonctionnaires, de politiques et de fidèles bien placés qui représentent quelque 7 % de la population chinoise. En lisant, en apprenant, en jouant, ils livrent leur parcours, leurs bons et leurs mauvais scores à l’État orwellien…
 

Les questions insidieuses des applications mobiles

 
Quels vont être les critères d’évaluation ? La fréquence avec laquelle l’outil est utilisé, le nombre de cours en ligne suivis, l’inscription aux « chats » proposés et puis les réponses aux fameux quizz de connaissances… Si personne ne peut accéder en totalité à ces applications s’il n’est membre du Parti, le quotidien chinois Global Times nous livre néanmoins quelques copies d’écran de ces QCM à bonne réponse unique – comme le Parti.
 
Situation : un membre du Parti participe et se défend lui-même quand une organisation du Parti discute de sa sanction ou de son évaluation et que d’autres membres du Parti le défendent. Réponse A : il en a le droit. B : il doit le faire. C : il n’en a pas le droit. D : il ne peut pas.
 
Autre question : le centralisme démocratique est l’union de la démocratie et du centralisme, qui est un système basé sur : A : la réalisation du leadership absolu du PCC. B : la réalisation de l’unité du Parti. C : la mobilisation de l’enthousiasme et de la créativité du Parti. D : la réalisation des personnes qui font leurs choix.
 
Des questions qui veulent pointer les membres par trop libéraux, cibler les maillons faibles de la fable communiste…
 

« Des cahiers ou des stylos »… les récompenses du parfait petit communiste en Chine

 
Et ce n’est pas une interprétation. Le responsable du département organisateur du Groupe de génie civil Tiesiju en Chine CTCE, l’atteste : « L’application [de son entreprise] classe ses utilisateurs sur une base mensuelle et hebdomadaire selon leurs habitudes d’apprentissage et les résultats de leurs tests ».
 
« Ceux qui échouent ou exécutent mal les tests seront critiqués. Le bon résultat du test permettra aux utilisateurs de gagner des points qui leur permettront de se classer plus haut ou de les échanger contre des récompenses comme des cahiers ou des stylos » !
 
Pour des entreprises (d’Etat) aussi vastes que CTCE, dont le personnel travaille principalement sur des chantiers éparpillés, l’application étatique remplit un rôle formidable d’unification à tous points de vue… Idem pour l’application « Party Member’s Schoolbag », à destination de plus de mille organismes clients dans le monde des media. Ou encore celle élaborée par le Comité du Parti à Laizhou où 70% des 60.000 membres du PC sont agriculteurs.
 

Inscription obligatoire !

 
Très clairement, c’est une pression supplémentaire qui se met en place. De travail, dira le Global Times, media étatique… ! De « ligne », bien plutôt. Il faut montrer patte très blanche ou plutôt très rouge, faire preuve d’enthousiasme et de conviction dans sa docilité au contrôle et à la lobotomisation grandissants.
 
Détail ô combien éclairant : si une application est créée pour votre entreprise ou votre comité, vous avez l’obligation de vous y inscrire.
 
On pense derechef à ce système de crédit social, instauré fin 2015 sous l’impulsion de l’État chinois,
appelé « Sesame Credit »… un système de notation, à destination de tous les particuliers, (évoqué ici par Matthieu Lenoir), qui note ses utilisateurs en fonction de leur qualité de payeur et de « rembourseur » et leur fait gagner des cadeaux… Jusque-là, rien de problématique. Maisil prend aussi en compte vos commentaires sur les réseaux sociaux, en particulier politiques, vos délits, vos succès et vos échecs…
 
Un tas de renseignements ultra personnels qui seront intégrés à la grande banque de données que la Chine prépare pour 2020, année où « Sesame Credit » sera rendu obligatoire pour tous les citoyens.
Que ce soit pour ses membres ou ses ressortissants, la mainmise du Parti doit être totale.
 

Clémentine Jallais