Au Danemark, la légalisation du « mariage » des paires de même sexe en 2012 s’est accompagnée de la mise en place de cérémonies religieuses pour marquer ces unions dans le cadre de l’Eglise protestante danoise, compétente pour tenir les registres d’état civil dans le pays. Le petit pays nordique connaît depuis lors une progression régulière du nombre des couples gays « mariés » religieusement. Le nombre total atteignait 416 célébrations en 2016 : on est passé de 51 « mariages » gays en 2012 à 105 en 2016, avec une augmentation continue. Selon l’évêque catholique de Copenhague, cette évolution pourrait être lourde de menaces pour l’Eglise catholique.
Dans ce domaine comme dans d’autres, le Danemark fait figure de précurseur. Ce fut le premier pays à légaliser les unions civiles homosexuelles en 1989, mais comme partout, celles-ci n’ont été qu’un premier pas vers l’alignement du statut des couples de même sexe sur celui du mariage authentique.
Le plus grand nombre des cérémonies religieuses demandées par des couples de même sexe a concerné des lesbiennes. Ce succès est en soi un paradoxe, dans une société très largement sécularisée : le Danemark est l’un des pays avec la plus faible pratique religieuse au monde, puisqu’elle est estimée à 4 % seulement. Paradoxe en forme de provocation ?
Les couples gays peuvent se marier religieusement dans l’Eglise du Danemark
Pour l’heure, seule l’Eglise évangélique luthérienne du Danemark organise ces cérémonies, les autres dénominations chrétiennes ainsi que les juifs et les musulmans étant exemptés de ce qui constitue une obligation paroissiale sinon personnelle pour les pasteurs concernés.
C’est ce qu’explique l’évêque luthérien de Copenhague, Peter Skov-Jakobsen : très engagé en faveur des droits LGBT, il était à la tête de la commission chargée de fixer le rituel pour le « mariage » homosexuel dans l’Eglise du Danemark. Commentant les statistiques officielles danoises sur la progression du « mariage » gay, il s’est félicité de ce que de nombreux couples profitent de la loi de 2012, tout en dénonçant le ton de l’opposition lors des discussions de la loi il y a cinq ans. Aujourd’hui, assure-t-il, seule une minorité de pasteurs danois reste hostile à ces cérémonies religieuses.
« Les prêtres qui ne veulent pas présider à ce type de mariage peuvent obtenir une exemption. La loi est telle, heureusement, que si un pasteur ou une pastoresse s’en prévaut, le couple va être redirigé vers un autre pasteur qui présidera à la cérémonie. Il est toujours possible de se marier dans une église paroissiale. Ni le prêtre, ni le conseil de la paroisse ne peut l’empêcher », a expliqué « l’évêque » Skov-Jakobsen. Voilà qui limite fortement le droit à l’objection de conscience.
La progression régulière du nombre de couples de gays et lesbiennes « mariés » à l’église
L’aménagement du rituel est en réalité minime. On remplace simplement les mots d’« époux » et d’« épouse » par celui de « partenaire » par exemple, tandis que les pasteurs sont invités à utiliser un texte biblique de leur choix pour préparer leur homélie au lieu d’avoir recours au texte traditionnel du récit de la création dans la Genèse.
Tout cela ne concerne certes qu’une Eglise protestante, mais il faut noter qu’il s’agit de chrétiens baptisés et qu’un simulacre de mariage chrétien, fût-il célébré dans un temple protestant, est et reste un scandale.
Une autre question se pose au Danemark, où la petite communauté catholique de 45.000 âmes est aujourd’hui en butte à un certain nombre de vexations qui annoncent de possibles atteintes à ses droits. Tout en notant, amusé, que les Danois apprécient la personnalité du pape François à qui ils « pardonnent » en quelque sorte d’être catholique et de rappeler des points de doctrine, Mgr Czeslaw Kozon, l’évêque catholique de Copenhague, le seul du Danemark, craint des changements à venir, notamment sur le plan des mariages.
Le Danemark en voie de rejeter le principe de tolérance religieuse sous l’effet de la dictature LGBT
John L. Allen de CruxNow.com rapporte les propos de Mgr Kozon sur un projet de loi sur l’enregistrement civil de toutes les dénominations religieuses du Danemark, qui en son état actuel exigerait que toutes les entités religieuses soient gouvernées par un bureau démocratiquement élu. L’Eglise catholique ne peut évidemment se soumettre à une telle exigence, ce qui pourrait la conduire à perdre des privilèges financiers et fiscaux mais aussi le droit de célébrer des mariages valides sur le plan civil et de bénéficier d’exemptions par rapport aux lois d’immigration consenties au clergé et aux religieux en provenance de pays tiers. En son état actuel, le projet de loi qui viendra en discussion à l’automne affirme explicitement que l’Eglise catholique ne sera pas contrainte à ordonner des femmes ou à célébrer des mariages de couples de même sexe, mais selon Mgr Kozon, cette tolérance pourrait ne pas durer.
« Je peux facilement imaginer que d’ici à quelques années, ces enseignements puissent être considérés comme incompatibles avec les soi-disant “valeurs danoises” » – à partir de là, il ne faudrait pas grand-chose pour que dans l’esprit de certains, on en vienne à considérer les positions de l’Eglise comme délictuelles dans ces domaines, explique-t-il, ajoutant que cet état d’esprit règne déjà au Danemark parmi ceux qui dénoncent la possibilité pour un pasteur luthérien de refuser de célébrer un « mariage » homosexuel.