A l’ONU, le pape François parle contre la faim mais pour la migration

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Hier matin, 16 octobre, le pape François s’est rendu au siège de l’Organisation de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), à Rome, à l’occasion de la Journée mondiale de l’alimentation. Largement applaudi par les représentants des 194 nations membres, son discours a collé aux codes onusiens, invoquant la guerre et le climat comme les facteurs premiers de la faim dans le monde. Mais si l’on doit aider sur place, la migration peut et doit avoir lieu.
Il a parlé encore et encore d’« amour » : la charité matérielle personnelle est érigée en charité politique globale obligatoire. Et de charité première, d’esprit de conversion, pas un mot – la statue du petit Aylan offerte par le Vatican est très parlante.
 

Pour l’ONU, la migration doit devenir un choix

 
La FAO s’était choisi un thème très actuel et surtout d’extension beaucoup plus large que celle de la faim dans le monde : « L’avenir des migrations : comment investir dans la sécurité alimentaire et le développement rural pour la changer ». « De plus en plus de personnes migrent car elles ne peuvent pas rester dans leurs maisons ou sur leurs terres », a déclaré le directeur général, José Graziano da Silva : « Nous travaillons à lutter contre les causes profondes de la migration, telles que la pauvreté, l’insécurité alimentaire, les inégalités, le chômage et le manque de protection sociale ».
 
En 2016, le nombre de personnes souffrant de la faim a légèrement augmenté, touchant 38 millions de plus qu’en 2015, arrivant au total de 815 millions de personnes.
 
Et la nouveauté de ces dernières années est qu’elles se déplacent. Même si le nombre de personnes souffrant de la faim a diminué, passant de 930 millions en 2000 à 815 millions de personnes en 2016, le nombre de migrants a dans ce même laps de temps été multiplié par 40, atteignant 244 millions.
 

« Il est clair que les guerres et le changement climatique sont des causes de la faim » François

 
Alors l’objectif de la FAO n’est pas d’éradiquer la migration ! Il faut réussir à en faire, non une nécessité, mais un « choix »… Supprimer la faim comme motif de migration, en investissant dans le développement rural, en soutenant la création d’emplois décents, en garantissant une protection sociale, mais surtout en s’attaquant au premier artisan de ce mal qui est… l’homme, à travers les conflits et le changement climatique.
 
Et le pape a appuyé ces deux points : « Il est clair que les guerres et le changement climatique sont des causes de la faim ». Il a d’ailleurs spécifiquement défendu l’Accord de Paris sur le climat en donnant un coup de patte aux Etats-Unis – « Malheureusement certains s’en écartent ». Alors que par ailleurs, il n’a rien dit sur la Chine qui n’en sort pas mais n’en respecte rien pour autant…
 
Comme le faisait remarquer l’Independent, il n’a rien dit non plus sur l’État islamique, alors que 55 % des réfugiés proviennent de Syrie, d’Afghanistan et du Soudan du Sud. Préférant admonester ceux qui pourraient se mettre en travers de cet accueil des migrants : « Ils se déplacent vers là où ils voient une lumière ou perçoivent une espérance de vie. Ils ne peuvent pas être arrêtés par des barrières physiques, économiques, législatives, idéologiques ».
 

La dignité de la vie terrestre avant tout ?

 
Certes, François a déclaré que la réponse n’était pas de réduire la population mondiale mais plutôt de mieux gérer les ressources abondantes de la planète et de prévenir le gaspillage – c’est pourtant une solution envisagée par plusieurs des orateurs invités par l’Académie pontificale des sciences à sa prochaine conférence sur le climat début novembre, comme John Schellnhuber ou encore Jeffrey Sachs…
 
Il a voulu parler d‘amour. François a invoqué « le principe évangélique », comme garant de la justice. Une justice qui semble décidément se limiter à la répartition de la nourriture, à la garantie d’une vie terrestre digne dans ses fonctions matérielles et humaines… A la signature du livre d’honneur, à l’issue de son discours, le pape a laissé comme message, en espagnol : « J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger. C’est là-dessus que nous serons jugés. »
 
Sur cette unique charité temporelle, corporelle, naturelle et en aucune manière surnaturelle ? Évidemment, on ne peut vouloir autre chose en collaborant avec ces instances maçonniques, mondialistes, qu’il charge nommément d’« organiser cette capacité d’aimer » pour « le bien de la famille humaine ». Et c’est bien le problème. Qui peut réellement transformer ce qu’il dénonce, le capitalisme à outrance, le consumérisme moderne, le matérialisme ambiant, si ce n’est la chrétienté ? Le seul amour humaniste, auquel il fait appel, finit toujours par céder à des impératifs personnels ou globaux calculés de tout ordre.
 
Mais la « conversion » qu’il implore doit visiblement demeurer à ce niveau. Et le cadeau qu’il a offert à la FAO, une sculpture en marbre du petit Aylan, 5 ans, retrouvé mort sur une plage turque en octobre 2015, l’illustre très bien. La main posée sur le corps inerte du petit garçon, son ange gardien, assis, la tête levée vers le Ciel, mais les yeux plissés et la bouche torturée par une grimace de douleur, pleure sur la fin qu’il semble juger « injuste » d’une vie terrestre.
 
De son âme dont il était en premier lieu chargé, il ne doit pas être question…
 

Clémentine Jallais