En Espagne, la Cour suprême reconnaît de fait la polygamie d’un Marocain en répartissant sa pension de vieillesse entre ses deux épouses

 
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La salle du contentieux administratif de la Cour suprême du Royaume d’Espagne a reconnu un droit égal à la pension de vieillesse des deux épouses d’un Marocain défunt ayant autrefois servi dans l’armée espagnole au Sahara. La polygamie n’est pourtant pas reconnue en droit espagnol, mais les juges ont appuyé leur décision sur un accord de sécurité sociale signé entre l’Espagne et le Maroc en 1979. Selon l’article 23 de cet accord, la pension de vieillesse d’un travailleur marocain sera distribuée le cas échéant à parts égales entre les bénéficiaires de la prestation à la lumière du droit marocain. Le droit marocain reconnaissant les unions polygames, les juges espagnols ont donc décidé de satisfaire les revendications de la deuxième épouse du défunt.
 

Des juges émettent une opinion dissidente face à cette décision qui reconnaît officiellement le droit à la polygamie d’un Marocain

 
Tous les juges n’ont toutefois pas été d’accord avec cette sentence qui met une simple convention entre Etats au-dessus de l’ordre constitutionnel espagnol. Deux d’entre eux ont exprimé une opinion dissidente. L’avocat de l’Etat était lui aussi opposé à une telle décision, considérant la polygamie contraire à l’ordre public espagnol et arguant que partager la pension de vieillesse du Marocain défunt « implique de reconnaître un droit (…) s’appuyant sur un fondement constitutif d’un délit puisque contraire au système de valeurs qui protège l’ordonnancement juridique espagnol ». Les juges dissidents ont aussi rappelé que la situation sociale en Espagne est aujourd’hui bien différente de celle régnant en 1979, puisqu’il y a aujourd’hui plusieurs millions de personnes originaires de pays musulmans qui vivent en Espagne. En effet, l’Espagne abrite aujourd’hui 2,6 millions de musulmans, et ils pourraient être entre 4,6 et 7,2 millions d’ici à 2050.
 

Anodine en apparence, la décision de la Cour suprême ouvre une nouvelle brèche en Espagne dans le mariage en tant qu’union entre un homme et une femme seulement

 
« Il faut rendre leur intégration possible », ont avancé les deux juges de la Cour suprême dans leur opinion dissidente, « ce qui est compatible avec l’idée que leur accueil en Espagne ne doit pas impliquer la renonciation à leurs coutumes et à leur religion, mais en restant dans les limites que définit notre culture et notre système de valeur qui trouve son reflet dans l’ordre public constitutionnel protégeant la dignité de la femme ».
 
Près de douze ans après le « mariage » entre personnes du même sexe qui a remis en cause la conception espagnole et chrétienne – mais aussi naturelle – du mariage comme étant uniquement l’union d’un homme et d’une femme en vue de fonder une nouvelle famille, la décision de la Cour suprême espagnole ouvre une nouvelle brèche dans laquelle pourront à l’avenir s’engouffrer les musulmans. Vu la nature expansive de l’islam politique, cela ne saurait tarder.
 

Olivier Bault