Au Royaume-Uni, les enfants blancs des classes ouvrières sont victimes d’injustices raciales – faut-il accuser les minorités ethniques ?

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La très grosse étude ethnico-sociale commandée par Theresa May n’est pas encore parue dans son intégralité, mais les media se sont jetés sur quelques chiffres donnés en pâture à la presse. Si le rapport illustre et veut illustrer majoritairement les disparités raciales et socio-économiques, au Royaume-Uni, entre les minorités ethniques (BAME) et les Britanniques blancs, il en ressort aussi quelques chiffres plus discrets qui témoignent d’une autre réalité : celle d’une classe ouvrière et populaire anglaise qui commence à être « dépassée » et paye, en particulier, les pots cassés d’une éducation publique tournée vers l’immigration.
 

« Tendre un miroir » au Royaume-Uni

 
C’est sur un site web créé à cette occasion, « Ethnicity Facts and Figures » que l’étude sera publiée dans sa totalité le 10 octobre prochain. Menée dans des domaine pluriels tels que la santé, l’éducation, l’emploi ou le système de justice pénale, elle doit révéler comment sont traitées les personnes de milieux différents, en particulier les groupes raciaux.
 
Le site internet est même voué à demeurer une pierre angulaire de ce « combat » – car c’en est un – , une « ressource permanente », régulièrement actualisée, pour que tout un chacun puisse voir et mesurer comment leur origine ethnique affecte tous les domaines de leur vie.
 
Theresa May a d’ores et déjà promis des vérités « inconfortables ». Ce rapport, qu’elle a commandé peu de temps après son entrée en fonction, « le plus vaste examen de son genre jamais entrepris » selon le gouvernement, doit selon elle « tendre un miroir » à la Grande-Bretagne et lui montrer l’image « complexe » de l’inégalité qui sévit sur son territoire…
 

Injustices raciales des minorités ethniques ?

 
Les media ont eu accès à quelques chiffres – chez la plupart, les mêmes ressortent.
 
A savoir que le taux de chômage chez les personnes actives issues des minorités ethniques (BAME) est de 8 %, alors qu’il est de 4,6 % chez les Britanniques blancs. Que les taux d’emploi sont de 75,7 % pour les Blancs alors qu’ils demeurent, pour les BAME, de 63,9 %.
 
Que deux ménages blancs sur trois possèdent leur maison, contre deux sur cinq dans les autres groupes ethniques. Ou encore que plus de neuf enseignants sur 10 demeurent blancs… et que le « problème » est semblable chez les juges.
 

Les classes populaires des Blancs « dépassées » à l’école

 
Le Telegraph relaie en revanche d’autres données posant de nouvelles questions (qui seront en général éludées) : les enfants blancs des classes ouvrières sont victimes depuis longtemps d’« injustices raciales », contre lesquelles ils luttent pour se lancer correctement dans la vie, dixit Theresa May.
 
Que peut-on entendre par « injustice raciale », sinon les brimades d’autres groupes ethniques, de même niveau social, devenus majoritaires dans ces quartiers où vivent précisément les classes populaires… ? De fait, les élèves blancs des écoles publiques (celles des classes populaires) ont enregistré le taux d’entrée le plus bas en 2016.
 
Autre point d’intérêt : l’étude a révélé que les élèves blancs des écoles publiques (les classes moyennes supérieures et au-delà vont dans les écoles privées) avaient le taux d’entrée à l’université le plus bas de n’importe quel groupe ethnique. S’il n’est pas obligatoire d’aller à l’université, il reste étonnant que les taux ne soient pas au moins égaux entre les différents groupes : question de politiques et de bourses ? Les enfants chinois sont même deux fois plus susceptibles d’aller à l’université que leurs homologues blancs…
 

« Que ce pays fonctionne pour tous et ne soit pas le privilège d’un petit nombre »

 
Ainsi, il semble que les conclusion ne soient pas toutes en faveur d’un battage méthodique de coulpe. Même si Rebecca Hilsenrath, directrice générale de l’égalité et de la Commission des droits de l’homme, n’a retenu que ça : « L’inégalité raciale est enracinée dans notre société (…) Nous avons besoin d’urgence d’une stratégie complète qui amène toutes les parties du gouvernement à faire face à ces inégalités et à garantir que les minorités noires et les minorités ethniques ne soient pas laissées de côté ». Apparemment, elles seules subsistent.
 
Aussi loin qu’on aille dans la vie, tout doit être basé sur le talent et le travail, affirme Theresa May, et rien d’autre. « Nous devons continuer à construire véritablement un pays qui fonctionne pour tous ».
Et elle veut combler les lacunes… Le Premier ministre veut une action ciblée dans les zones « chaudes » où perdurent d’importants manques d’emplois. Elle veut aussi étendre les programmes de mentorat (relation de soutien avec un mentor) pour aider les personnes dans la recherche de travail et élaborer des programmes de stages ciblés pour aider les jeunes en pré-emploi.
 

Une question tristement politique

 
Ce faisant, Theresa May renoue avec un de ses premiers thèmes de prédilection, la « lutte contre l’injustice ». Et elle y est, dans les faits, obligée…
 
Obligée face à un pays qui, effectivement, accueille une diversité croissante qui ne peut être ignorée, que ce soit d’un point de vue sociétal ou d’un point de vue politique. Le think thank « British Future » estime que 10 % de l’électorat de 2017 provient d’une minorité ethnique.
 
Et trois millions de votes, c’est un nombre – d’autant que ce dernier est voué à augmenter, la population non blanche de la Grande-Bretagne étant plus jeune et ayant davantage d’enfants. A tout parti qui veut le pouvoir, il faudra de plus en plus leur voix. Le parti conservateur de Theresa May aurait obtenu une majorité de sièges en juin, si elle avait obtenu le même soutien ethnique dont a bénéficié le parti travailliste…
 
Y a plus le choix.
 
Seulement, les classes populaires blanches se font déjà « bouffer », si j’ose dire, à l’école…
 

Clémentine Jallais