Syriza : vers une persécution de l’Eglise orthodoxe en Grèce ?

Syriza persecution Eglise orthodoxe en Grece
 
L’extrême-gauche la plus authentique et radicale, incarnée dans le parti Syriza, vient de remporter les élections législatives en Grèce, et de former un gouvernement. Le petit parti patriotique d’appoint ne fait absolument pas le poids dans la coalition. Syriza domine aisément, et trouverait, à l’occasion, des partenaires de remplacement. Syriza risque fort de ruiner ce qui peut encore l’être en Grèce. Sur le plan moral, il est favorable à une tolérance des drogues, l’avortement facilité, les unions homosexuelles, l’immigration massive (la plupart du temps musulmane)… Et il prépare une spoliation – voire une persécution – de l’Eglise orthodoxe. Par haine de la religion chrétienne et volonté de destruction de la Nation grecque, tant les deux sont liés et honnis du marxisme internationaliste.
 

L’Eglise orthodoxe, au cœur de l’identité grecque

 
La Nation grecque peut être considérée comme une des plus anciennes d’Europe, remontant aux âges classiques (vers – 400, – 500), voire à la période mycénienne (vers – 1400). Sa langue en effet possède une continuité remarquable, malgré des mutations significatives inévitables au fil du temps.
La grande modification culturelle depuis l’âge antique a été la conversion au christianisme, importante aux IVème et Vème siècle, avec une disparition des derniers grecs païens au VIème siècle. Le christianisme de ce monde grec est très majoritairement orthodoxe, c’est-à-dire de foi droite, juste, conforme aux premiers conciles œcuméniques de l’Eglise, notamment en ce qui concerne le dogme essentiel de la Trinité et sa bonne compréhension.
 
Le drame du schisme – la rupture de l’unité avec Rome – intervient en 1054, et s’impose en 1204, avec la destruction de l’Etat grec médiéval, l’Empire byzantin, par la prise de sa capitale Constantinople. Cette douloureuse rupture de 1204 n’est pas le résultat de la seule faute de Croisés occidentaux avides ; les intrigues fort complexes de la Cour byzantine en 1203-1204 ont joué dans ce drame un rôle absolument essentiel, chose totalement occultée en Hellade, et depuis les années 1960 en France.
 
Ainsi, depuis le XIIIème siècle, l’Eglise orthodoxe dénonce le « schisme romain », et en vient à qualifier les catholiques de dangereux hérétiques, allant jusqu’à considérer le baptême catholique comme de validité douteuse ou nulle. L’Eglise catholique, pour sa part, n’a jamais nié la validité des sacrements des schismatiques grecs, tout en déplorant le schisme obstiné.
 

L’occupation turque de la Grèce

 
L’occupation turque musulmane, à peu près totale à la fin du XVème siècle, renforce le schisme grec, en imposant la disparition des petites minorités catholiques ou gréco-catholiques. L’Empire Ottoman ne cherche pas à convertir massivement à l’Islam les populations de la Grèce balkanique. Mais il veille à y établir une élite islamisée, souvent d’origine grecque, de l’ordre de 5 à 10% de la population. Ces renégats, situés en haut de la pyramide sociale, souvent grands propriétaires, sont donc parfaitement détestés. Les Grecs sont durement traités sous ces siècles d’occupation. Les Balkans dans leur ensemble accumulent un retard de plusieurs siècles, qui n’est, à ce jour, pas encore rattrapé.
 
La Guerre de Libération nationale grecque (1821-1830) est une lutte d’indépendance des Grecs contre les Turcs, mais surtout des Chrétiens contre les Musulmans. Les grands propriétaires musulmans hellénophones luttent avec énergie pour le Sultan, tout comme l’armée égyptienne, musulmane, alliée et théoriquement vassale d’Istanbul, intervenant massivement en 1825-1827. Le zèle des armées musulmanes dans la répression les conduit à multiplier les massacres, causant des centaines de milliers de morts, génocide grec dont on n’entend curieusement jamais parler. Sans s’arrêter au terme de génocide, les massacres de Grèce ont pourtant été à l’époque une des premières grandes campagnes d’opinion européenne, connues sous le nom de courant philhellène, illustré en France dans le courant romantique avec Victor Hugo – L’Enfant, dans les Orientales, 1829, et Eugène Delacroix – Massacres de Scio (Chios, 1824). La France et le Royaume-Uni finissent par intervenir pour imposer militairement l’indépendance de l’Hellade (1827-28), sur un territoire fort réduit, afin d’empêcher la seule Russie de libérer tous les Balkans par solidarité orthodoxe.
 
Le Royaume de Grèce, confié à un prince bavarois, mis en place en 1830-1832, se caractérise par l’unité ethnique grecque et religieuse orthodoxe. Les musulmans Albanais, Grecs, Turcs, constituant peut-être jusqu’à 10% de la population, et complices des exactions commises dans les dernières années ottomanes, émigrent massivement. Le refus du roi Othon (1833-1862), catholique, de se convertir à l’orthodoxie, empêche sa dynastie de s’implanter. Elle est remplacée par une autre, danoise, d’origine luthérienne, en la personne de Georges Ier (1863-1913), aux enfants orthodoxes, nés d’une mère russe orthodoxe.
 
Les modifications territoriales opérées au début du XXème siècle, à savoir la libération de toute la côte jusqu’à la Thrace, et des îles de la Mer Egée, mais au prix de la perte de la côte anatolienne en 1922, changent peu l’identité grecque et orthodoxe fondamentale de l’Hellade, malgré des échanges massifs de population. L’expulsion de plus de deux millions de Grecs de la côte anatolienne, présents depuis la Haute-Antiquité, a été particulièrement dramatique.
 
La religion orthodoxe n’a été menacée au XXème siècle que par le péril communiste, lors de la très dure guerre civile grecque, entre communistes et nationalistes, de 1946 à 1949. Les communistes, champions de la résistance passée contre l’Axe en 1941-1944, ont perdu l’essentiel de leur crédit auprès des populations hellènes en soutenant la laïcisation, la défense des minorités frontalières albanaises, macédoniennes, ou même turques de Thrace occidentale. Le Syriza actuel se veut l’héritier de ces combattants communistes, dont il reprend largement le programme de 1946.
 

Le maintien d’un respect de principe, le déclin des pratiques

 
Jusqu’en 2015, l’identité orthodoxe demeure en principe indissociable de celle de la Grèce. Pourtant une légère sécularisation institutionnelle a déjà pu s’opérer sous la pression de l’Union Européenne. Est fort connue la disparition de la mention de la religion sur les cartes d’identité opérée en 2001, après des années de résistance à une directive européenne de 1997 dite des « libertés individuelles ». Fait plus grave, et moins connu, l’obligation des cours de religion orthodoxe a été abolie en 2008. La pression de Bruxelles a poussé à la multiplication des projets de sécularisation : l’obligation du mariage civil –possible depuis 1982 –, les funérailles civiles, et le serment civil pour les élus.
Syriza mettra certainement toutes ces réformes en place. Alexis Tsipras, le premier ministre, refuse de prononcer tout serment religieux, et s’est tenu à cette résolution.
 
La société est-elle demeurée chrétienne ? Non, et un des meilleurs indices de déchristianisation réelle des populations consiste à relever la chute de la natalité. Cette relation se vérifie depuis le cas de la France au XIXème siècle, précocement déchristianisée suite à la Révolution française et démographiquement stagnante. De même, la natalité s’est brusquement effondrée en Grèce dans les années 1970-80, dans un phénomène exactement parallèle et chronologique avec tout le sud de l’Europe, Portugal, Espagne, Italie. L’enfant unique est devenu la norme dans les années 1980, et l’est demeuré depuis. Les familles nombreuses, si précieuses, ont pratiquement disparu.
 
Un respect extérieur a été conservé pour la religion orthodoxe, avec une assistance régulière aux grandes fêtes religieuses, mais les convictions profondes ont été affaiblies, et ce depuis plus de quarante ans. Cette évolution s’est produite malgré l’absence de toute réforme liturgique ou de clergé vraiment progressiste comme c’est le cas en Occident, conditions qui ont favorisé la déchristianisation, mais ne l’expliquent donc peut-être pas complètement si l’on en croit donc ce contre-exemple grec.
 

Vers une persécution religieuse avec Syriza ?

 
Le noyau dirigeant de Syriza est formé d’anticléricaux, sinon d’athées plus ou moins avoués, qui a su dissimuler un minimum ses sentiments profonds afin de ne pas se nuire électoralement. M. Tsipras a assisté à l’enterrement religieux de son père, qui était, lui, croyant. Il a même rencontré des responsables religieux devant les caméras, sans rien leur promettre de concret, se contentant de vagues « réflexions ». Les leaders de Syriza n’ont certainement pas changé depuis.
 
Le prétexte de la persécution à venir contre l’Eglise est des plus courants dans l’Histoire : la nécessité de remplir les caisses publiques. Elle a été évoquée par Henry VIII, avec une réforme anglicane confisquant au profit de la couronne tous les biens ecclésiastiques (années 1530), ou par la Révolution française de 1789, mettant dès l’automne tous les biens du clergé à la disposition de la Nation. Sans oublier 1905 et ses inventaires. De même Lénine a confisqué les terres et biens de l’Eglise orthodoxe au nom des nécessités impératives de la situation humanitaire de la Russie soviétique, en effet dramatique au début des années 1920, du fait même du nouveau régime communiste. Et ces confiscations n’ont pas vraiment été utilisées pour l’aide aux populations souffrantes, mais pour le fonctionnement de l’Etat soviétique oppresseur.
 
Relevons que les autorités de Bruxelles approuvent hautement l’idée de faire payer des impôts à l’Eglise. Elles condamnent à peu près tous les articles du programme de Syriza, sauf ceux concernant l’Eglise, de l’imposition à l’éventuelle confiscation, suivie de vente, de terres. Or ces biens servent à assurer le fonctionnement de l’Eglise, pour sa divine liturgie, l’entretien des bâtiments, et les fondations charitables absolument essentielles pour venir en aide aux malheureux dans les conditions dramatiques actuelles en Grèce. Les précédentes confiscations d’Henry VIII d’Angleterre et de la Révolution française font craindre le pire, et pourrait conduite à la suppression d’institutions charitables qui ne seront pas remplacées – ou remplacée par l’Etat socialiste.
Le déficit budgétaire, l’endettement de la Grèce, ne sont pas pourtant des priorités pour l’extrême-gauche grecque, prête, comme Lénine avec les emprunts russes des régimes précédents, à désavouer purement et simplement les créances sur l’Etat grec. Il s’agit donc de prétextes pour affaiblir l’Eglise orthodoxe.
 
Dans le même temps, la plus grande tolérance est proclamée pour un nouvel enracinement des musulmans en Grèce, issus d’immigration extra-européenne, avec de grands programmes de constructions de mosquées, jusqu’ici souvent retardés sous des prétextes administratifs. Les athées de Syriza n’affectionnent vraisemblablement pas l’islam non plus, mais tiennent à le promouvoir afin de détruire l’identité chrétienne et nationale grecque.
 
Décidément, les heures les plus sombres, à vue humaine, attendent la Grèce. Une persécution réelle de l’Eglise orthodoxe, certes a priori non-sanglante, est sérieusement à craindre.

Octave Thibault