L’opposition, après avoir boycotté le scrutin de dimanche au Venezuela, organisait ce lundi de nouvelles protestations tandis que le bilan des victimes de cette élection s’élevait officiellement à quinze morts. Ce lourd bilan, qui porte à environ 120 le nombre de morts depuis le début des manifestations populaires au printemps, n’empêchait pas dimanche la commission électorale d’affirmer que les élections se déroulaient dans la plus grande normalité. Parmi les victimes de ce scrutin contesté par l’opposition à Nicolás Maduro, un des candidats à l’Assemblée nationale constituante a été tué chez lui par balles. Les plus de 8 millions de Vénézuéliens (sur 19,5 millions d’électeurs) qui seraient allés voter choisissaient 545 représentants chargés d’élaborer une nouvelle constitution en court-circuitant l’Assemblée nationale où l’opposition a la majorité absolue mais dont toutes les décisions sont invalidées par la Cour suprême contrôlée par le parti socialiste « bolivarien » du président.
A la veille du scrutin, Nicolás Maduro n’a pas caché, pour inciter ses partisans à aller voter, son intention d’avoir dans cette assemblée constituante un pouvoir qui sera au-dessus de tous les autres. La nouvelle assemblée constituante, qui aura aussi le pouvoir de dissoudre l’assemblée nationale, doit se réunir dans les 72 heures. Sa composition pro-Maduro ne fait aucun doute, puisque tous les candidats étaient des partisans du successeur d’Hugo Chávez. C’est cette Assemblée nationale constituante (ANC) qui définira elle-même la durée de son mandat en fonction du temps qu’elle mettra à élaborer une nouvelle constitution. C’est aussi cette ANC qui décidera elle-même si la nouvelle constitution doit être soumise au vote populaire.
Une Assemblée nationale constituante voulue par le président Maduro
Le président Maduro a notamment promis aux Vénézuéliens que l’ANC lèverait l’immunité parlementaire des députés de l’Assemblée nationale et que des cellules de prison étaient déjà prête pour nombre de ces représentants de la « bourgeoisie parasite ». Fidèle à son idéologie socialiste, Maduro entend résoudre de cette manière la grave crise économique causée par le « socialisme du XXIe siècle ». Dans le même esprit, l’ANC devrait aussi renforcer l’organisation du pays en État « communal » et remettre en cause les partenariats public-privé dans le domaine de l’exploitation des hydrocarbures.
Le 16 juillet dernier, plus de 7 millions de Vénézuéliens participaient quant à eux au plébiscite contre l’élection d’une Assemblée nationale constituante organisé par l’opposition. De leur côté, les Etats-Unis menaçaient de suspendre leurs achats de pétrole vénézuélien au cas où les élections d’hier se dérouleraient comme prévu, ce qui a bien été le cas. Après cette élection, le Venezuela pourrait aussi être expulsé du Mercosur dans la mesure où avoir un régime démocratique fait partie des exigences pour être membre de ce bloc commercial.
Le Venezuela va s’enfoncer encore plus dans la crise
Mais la question est aussi de savoir si l’opposition vénézuélienne saura maintenir la pression de la rue malgré les violentes répressions et surtout rester unie dans la non-reconnaissance de l’Assemblée nationale constituante, alors que la Table de l’unité démocratique (MUD) qui domine à l’Assemblée nationale est en réalité une coalition de partis très différents. Car en face, Nicolás Maduro bénéficie toujours du soutien d’une partie de la population pauvre, des forces armées, ainsi que de pays comme la Bolivie, le Nicaragua, Cuba et… la Russie.