Le premier ministre ukrainien Arseniy Yastenyouk a donné dimanche sa démission après deux ans de pouvoir. Incapable de gérer l’austérité imposée par le FMI, accusé d’encourager la corruption, il a essuyé un vote de défiance en février.
Arseniy Yastenyouk était le chouchou de l’Occident. Ce crâne d’œuf au physique aseptisé et à l’anglais parfait avait été mis au pouvoir en février 2014 pendant les émeutes de Maïdan organisées par les services américains contre l’ancien président Yanoukovitch. Ses deux principaux atouts étaient alors son opposition aux Russes, qui soutiennent les sécessionnistes de l’est ukrainien, et sa capacité supposée à gérer le plan de sauvetage de l’économie lancé par le FMI et le prêt de 17,5 milliards de dollars assorti.
Le pouvoir fragilisé du premier ministre ukrainien
Mais depuis longtemps déjà la lune de miel entre Yastenyouk et l’Occident était finie. L’austérité imposée par le FMI ayant fait tomber son taux de popularité à 2 % (mieux que François Hollande!), ses adversaires l’ont accusé de plus en plus fréquemment de « plier » devant les oligarques « y compris de la période prérévolutionnaire », et de ne pas savoir lutter contre « la corruption et la magouille ». En février de cette année, il a subi un vote de défiance du parlement ukrainien, et depuis son pouvoir ne tenait plus qu’à un fil. Le président milliardaire Porochenko avait dit récemment que « pour rétablir la confiance, la thérapie ne suffirait pas, il faudrait la chirurgie ».
En annonçant sa démission, Yastenyouk a apporté son soutien à Vladimir Groysman, le président de l’assemblée, un proche de Porochenko, capable à son avis de porter les réformes préconisées par le FMI et de lutter contre la fameuse corruption (la lutte contre la corruption est un des éléments de langage caractéristiques de la propagande des institutions supranationales). Mais le ministre des finances Natalie Jaresko, une ancienne banquière née à Chicago dans la communauté des immigrés ukrainiens, est aussi sur les rangs. Elle a la faveur des investisseurs étrangers, et vient de déclarer que seul « un gouvernement de technocrates indépendants des oligarques et des amitiés politiques » pourrait mener une politique conforme au bien commun du pays, et non pas celle qui convient à certains groupes d’intérêts privés.
La démission d’Yastenyouk imposée par le FMI
Voilà clairement posé le problème actuel : d’un côté les oligarques et les patrons du marigot ukrainien, de l’autre les technocrates mondialistes du FMI déterminés à imposer leurs réformes au peuple ukrainien, et à tous les peuples. D’un côté comme de l’autre les intérêts du peuple ukrainien sont exclus. Yastsenyouk s’est heurté au mur d’argent et de pouvoir qui l’avais mis au pouvoir. Son sort était scellé du moment que Christine Lagarde, la présidente du FMI, avait dit « ne pas voir comment on pourrait continuer à prêter de l’argent à un gouvernement si décrié ». Et, petite curiosité parmi beaucoup, dans l’équipe qui reprendra les responsabilités du pouvoir, les pronostiqueurs locaux placent l’ancien vice premier ministre slovaque Ivan Miklos, s’il obtient comme c’est en cours de réalisation, la nationalité ukrainienne. On le pense capable de lutter « contre la corruption et pour le succès du plan du FMI ».