Comment Poutine utilise le sentiment anti-LGBT pour affermir son pouvoir

Poutine Sentiment Anti-LGBT Pouvoir
 

Avant 1973, quand l’OMS décida de retirer de sa liste des « paraphilies » l’homosexualité, celle-ci était une maladie pour la médecine, un délit aux yeux de la loi, un péché à ceux de la religion et une anomalie dégoûtante pour le grand public – quant aux élucubrations sur les genres, fruits de la french theory, elles n’étaient même pas pensables. Les choses ont évolué en Occident sous l’effet d’une propagande puissante, multimodale et incessante, mais demeurent à peu près en l’état dans le monde slave, à l’exception de l’Ukraine. C’est pourquoi, aussi bien pour asseoir son pouvoir en Russie, son influence en Europe de l’Est, que son image de chevalier blanc opposé à l’arc-en-ciel aux yeux des nationalistes occidentaux naïfs ou sots, Vladimir Poutine joue-t-il abondamment du sentiment naturel anti-LGBT.

 

Les lois anti-LGBT de Poutine

Il a poussé à cet effet une série de lois. D’abord celle de 2013 restreignant la propagande homosexuelle en interdisant toute apologie des relations sexuelles homosexuelles auprès des mineur. Puis en insérant dans la réforme constitutionnelle de 2020 un article précisant que le mariage est l’union exclusive d’un homme et d’une femme. Plus récemment encore, cette année, la Russie vient de voter une loi interdisant le prétendu changement de genre, dans les documents administratifs et d’identité bien sûr, mais aussi les « opérations médicales visant à changer le sexe d’une personne ». Elle a aussi précisé le code de la famille, fait inscrire le changement de genre parmi les causes d’annulation d’un mariage et priver ceux qui s’en rendent coupables de la faculté d’adopter.

 

Le pouvoir russe exploite en Ukraine un sentiment anti-LGBT

Tout naturellement, lorsque les troupes russes envahirent l’Ukraine en 2022, le Kremlin ne manqua pas de se poser en défenseur des valeurs traditionnelles face à « l’influence dégradante » de l’Occident. Il faut bien avouer qu’il jouait sur le velours, le président ukrainien en exercice Zelenski étant un ancien histrion de télévision auquel il était arrivé de jouer de la guitare nu à l’écran, et de multiplier d’autres fantaisies. Plus sérieusement et plus profondément, l’armée suédoise, dont le pays postule pour entrer dans l’OTAN, a publié en 2018 une publicité arc-en-ciel tonitruante avec cette phrase : « Nous nous battrons toujours pour ton droit à vivre comme tu l’entends et avec qui tu veux. » C’est donc à bon droit que Poutine assimile l’Occident décadent à la révolution arc-en-ciel, et qu’il s’en fait une arme pour asseoir ici son pouvoir, là sa légitimité, aux yeux de ceux qui coupent dans sa manœuvre. C’est une posture et une imposture : si Poutine est hostile aux LGBT, il n’en est pas moins décadent, partisan de l’avortement, admirateur de Staline, nostalgique de l’URSS, allié de la Chine communiste et islamophile.

 

Pauline Mille