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C’était écrit. Oui, lundi soir Paris a été le théâtre d’émeutes et de troubles, d’incendies de poubelles (le combustible est surabondant !) et de brutalités policières. Oui, la réforme des retraites suscite colère et opposition. Mais les manœuvres politiques et les actions de terrain n’y ont rien changé et n’y changeront rien, la réforme devait passer, et elle est acquise. L’issue, à dire vrai, était connue d’avance, et tout ce qui s’est passé relève du psychodrame et de l’agitation médiatique. Aucun moyen qui aurait pu effectivement, véritablement bloquer le projet du gouvernement n’a été utilisé.
 
Le premier de ces moyens eut été de bloquer le pays, vraiment. Même si la représentativité réelle des syndicats s’est fortement amoindrie (mais il faut ajouter que son encadrement légal a historiquement favorisé la CGT communiste et la CFDT socialiste), les secteurs clefs des transports et de l’énergie restent potentiellement à leur merci. Le pays peut être bloqué, comme il le fut lors de la grande mobilisation de la fin de 1995 contre la réforme des retraites et de la sécurité sociale, et ce d’autant plus que de larges pans de la population sont hostiles au plan Macron. Or il n’en a rien été.
 

Le psychodrame de la mobilisation, poudre aux yeux des braves gens

 
Le contexte est pourtant des plus porteurs. Les suites de la gestion du COVID, l’inflation, la baisse du pouvoir d’achat, le prix prohibitif de l’énergie, les difficultés qui en découlent pour les entreprises et les risques de ricochets néfastes pour l’emploi – et donc pour les possibilités de cotisation et d’obtention de trimestres pour accéder à une retraite à taux plein – sont autant de facteurs qui aggravent l’angoisse. Cette fois-ci, alors même que la situation économique des classes moyennes et des « gens qui se lèvent tôt » empire, on n’aura pas eu de « gilets jaunes ». Pourquoi ?
 
Psychologiquement, la mobilisation aurait été facile à réaliser : une majorité de Français sont frappés par la dégradation en cours, et tous ont pu constater que Macron a dépensé des milliards au nom du « quoi qu’il en coûte » de la crise COVID, mais chipote maintenant sur des sommes bien moins importantes. Argent facile d’un côté, poches fermées quand il s’agit d’assurer une fin de vie digne aux plus anciens.
 
Mais non, rien n’a réellement gêné l’exécutif. Certes, des raffineries ont été mises à l’arrêt ; des routes barrées, des baisses de production d’électricité, des manifestations d’envergure ont empoisonné la vie quotidienne, donnant l’illusion d’une mobilisation volontariste. Mais aucune de ces initiatives n’a dépassé le niveau de l’action ponctuelle, sans lendemain véritable. A tel point que l’on peut se demander si ce psychodrame grotesque n’était pas un cirque pour amuser les troupes. Tout le monde savait que la réforme passerait, et fondamentalement, les gens de pouvoir – à gauche comme à droite, syndicalistes et professionnels de l’agit-prop – n’entendaient pas l’empêcher.
 

Réformes des retraites : une belle continuité entre la droite et la gauche

 
La gauche elle-même, sous la présidence de François Hollande, a adopté un important allongement progressif de la durée de cotisations jusqu’à 43 annuités en janvier 2014 : la réforme pilotée par Marisol Touraine s’inscrivait dans la trajectoire ouverte par Michel Rocard (PS) en 1991 et mise en place, sous Mitterrand, par le Premier ministre de cohabitation Edouard Balladur ; poursuivie par François Fillon en 2003, puis en 2010.