Le Royaume-Uni de Keir Starmer trahit le Brexit et se plie à l’UE par un nouvel accord

 

Nombre d’accords violés, de référendums ignorés nous ont appris que rien n’est jamais acquis en politique. Le Royaume-Uni vient d’en faire l’expérience, avec la signature par Keir Starmer, ce lundi, d’un nouveau partenariat stratégique avec l’Union européenne : un accord de coopération en matière de sécurité et de défense, assorti surtout d’un certain nombre de mesures qui hérissent le poil eurosceptique, que ce soit dans le domaine agro-alimentaire ou dans celui de l’électricité.

Dès son arrivée à Downing Street, en juillet 2024, le leader travailliste avait promis aux Britanniques le « reset », à savoir la réinitialisation des relations entre Londres et Bruxelles. Il leur a donné davantage : le désossement du Brexit, cinq ans après son vote ! Toute la droite britannique est en ébullition, de Boris Johnson à Nigel Farage en passant par Kemi Badenoch : ils dénoncent un « retournement » honteux du référendum de juin 2016. Si pour Keir Starmer, le Royaume-Uni est « de retour sur la scène internationale », il revient, pour les autres, dans l’orbite détestable et détestée de l’UE.

 

Hamburgers et saucisses britanniques à nouveau autorisés dans l’UE

L’artisan initial du Brexit, David Frost, n’a pas mâché ses mots. Dans une tribune du Telegraph, l’ancien négociateur britannique a dénoncé une flagrante trahison politique de la part du gouvernement, face à une UE « qui a joué les durs ». Cinq gros mauvais points sont, pour lui, à mettre à ce triste tableau de chasse.

« Premièrement, nous rejoignons le marché unique de l’agro-alimentaire. » Le droit européen doit être appliqué aux secteurs agricole et alimentaire, à toutes les entreprises et exploitations agricoles, qu’elles commercent avec l’UE ou non, et les tribunaux européens auront le dernier mot sur les litiges. L’effet réel de cet accord sera, pour lui, de faciliter grandement les exportations vers l’UE, « un producteur agricole bien plus important, plus prospère, plus diversifié et plus coûteux » (alors que jusque-là le Brexit n’a jamais nui au commerce britannique). Et Bruxelles pourra imposer des sanctions sur les exportations britanniques si un futur gouvernement décide de réécrire l’accord.

« Deuxièmement, [cet accord] nous engage à rejoindre le marché unique de l’électricité, le système européen d’échange de quotas d’émissions de carbone et son système d’imposition de droits de douane sur les produits à faibles émissions de carbone, les “CBAM”. » Or le prix du carbone de l’UE est 50 % plus élevé que celui du carbone britannique…

Le troisième point concerne le contrôle des zones de pêche britanniques. Le Royaume-Uni, initialement, ne voulait laisser qu’un an aux navires européens pour croiser et pêcher dans ses eaux : l’UE lui en a fait accepter 12 ! Jusqu’en 2038, ils puiseront en toute légalité dans les stocks de poissons anglais. Le Premier ministre britannique a eu beau promettre 360 millions de livres de nouveaux investissements, la directrice générale de la Fédération écossaise des pêcheurs a parlé de « spectacle d’horreur ».

Enfin, il est prévu un programme de mobilité des jeunes, qu’ils fassent du bénévolat ou voyagent simplement… sans qu’un nombre maximal soit déterminé. Alors que le Royaume-Uni tente de réduire son solde migratoire, Bruxelles souhaite que les jeunes Européens (y compris les migrants originaires des régions les plus pauvres d’Europe) puissent aussi faire venir leur famille !

 

Pour le Royaume-Uni, l’accord exige un « alignement dynamique »… de factures ?

En échange de tout cela, l’accord ouvre la voie à la participation du Royaume-Uni au programme européen d’investissement dans la défense, dénommé SAFE, d’un montant de 150 milliards d’euros. Un marché largement convoité par les Britanniques. Mais Ursula von der Leyen l’a dit, il y a encore du chemin… Et les contributions budgétaires de Londres sont le prix d’entrée.

Comme pour le reste ! En dévoilant l’accord, lundi, à Londres, Keir Starmer a assuré qu’il s’agissait d’une situation « gagnant-gagnant » pour le Royaume-Uni, que l’ensemble des négociations devrait stimuler le PIB de 0,2 à 0,3 %, à savoir 9 milliards de livres sterling d’ici à 2040. Mais, là encore, rien n’est moins sûr. Il faudra surtout payer.

Une première estimation, lundi soir, chiffrait la facture à 16 milliards de livres sterling la première année ! Seulement pour le programme Erasmus que cet accord fait réadopter, il faudra débourser 150 millions de livres sterling par an, alors que le RU finance ses propres étudiants via le programme Turing…

 

Keir Starmer se moque du Brexit

Comme l’écrivait David Frost dans The Telegraph, « cet accord concède d’importants intérêts britanniques pour très peu de contrepartie. Il amorce le processus de réintégration progressive de ce pays dans le marché unique et l’union douanière ». C’est un détricotage pur et simple de ce qui avait été réalisé.

Richard Tice, chef adjoint de Reform UK, a déclaré : « Starmer essaie de dire adieu au Brexit. C’est une immense trahison ; c’est une capitulation sous stéroïdes. Nous réintégrons l’UE, mais non officiellement, par la porte arrière. »

Même son de cloche pour Boris Johnson qui a qualifié Sir Keir de « larbin de Bruxelles ». Il a déclaré à la chaîne d’informations GB News : « Je pense qu’il s’agit d’une trahison totale et délibérée du Brexit, et cela va à l’encontre des promesses du Premier ministre. Lors des élections de 2024, il a déclaré qu’il ne reviendrait pas sur le Brexit, ni sur les libertés acquises par le peuple britannique lors de ce référendum. Il a fait exactement l’inverse. » Lui qui se vantait, en prenant son poste, de faire du Royaume-Uni un « rule-maker » va bien plutôt le muer en « rule-taker » aux ordres.

La leçon est claire : l’objectif principal des travaillistes est de se rapprocher à nouveau de l’UE, en dépit de toutes les concessions. Et l’UE ne poursuit que ses propres intérêts, qui ne sont jamais ceux des pays, encore moins de ceux qui ont décidé de faire sécession et reviennent tout penauds, la queue entre les jambes…

 

Clémentine Jallais