C’était en 2016, pendant la primaire à droite de la présidentielle 2017. François Fillon candidat lança, pour discréditer son concurrent Nicolas Sarkozy empêtré dans ses affaires judiciaires : « Qui imagine le général De Gaulle mis en examen ? » Cela devait lui retomber sur le nez : le 14 mars 2017 il était lui-même mis en examen pour « détournements de fonds publics », « complicité et recel de détournements de fonds publics », et « complicité et recel d’abus de bien sociaux » ; il allait perdre la présidentielle à cause de cela. Mais il n’en avait pas moins relevé une évidence : les temps changent et avec eux les mœurs. Ainsi peut-on demander aujourd’hui : imaginerait-on De Gaulle poursuivre en justice un journaliste pour avoir mis en doute l’identité sexuelle de Tante Yvonne ? Non, bien sûr. Pourtant le général-président était dictatorial et procédurier, il traînait souvent les journalistes critiques devant les tribunaux, mais pas pour de telles affaires de cornecul. Et puis à son époque il n’y avait qu’une Brigitte célèbre dans le monde, et le complotiste le plus éméché n’aurait jamais mis son sexe en doute. Aujourd’hui au contraire il se répète sur les réseaux sociaux que l’épouse du président est un garçon, son frère pour être précis. On s’étonne qu’Emmanuel Macron saisisse la justice contre l’influenceuse Candace Owens après avoir poursuivi deux journalistes françaises : en démocratie la liberté d’expression est précisément la liberté de dire des bêtises. Mais peut-être, comme un autre président enquiquiné par l’affaire Epstein, a-t-il besoin d’amuser la galerie pour détourner l’attention.