Nigel Farage, qui fut naguère l’aiguillon du Brexit et dont les sondages prévoient qu’il pourrait être le prochain Premier ministre britannique avec son parti Reform UK, vient de tordre le cou, dans un grand discours suivi d’une séance de questions réponses à la presse, dans le hall de la City de Londres, à l’illusion que caressent les partisans d’une immigration à tout va, que celle-ci serait bonne pour l’économie et permettrait en particulier la croissance. Cet argument est un sophisme grossier. Il a également fait litière d’une autre grande illusion, celle de la transition énergétique, en qui il voit la deuxième cause principale de la ruine de l’économie britannique. Il en a conclu sans ambiguïté qu’il faut donner la préférence aux Britanniques et à leur économie, et en finir avec les injonctions ruineuses de l’idéologie.
Une illusion de croissance qui ruine à terme l’économie
Nigel Farage vient d’accroître le vocabulaire économique et politique en lançant le terme « d’assouplissement quantitatif humain », imité du « quantitative easing » monétaire, qui a remplacé celui de « planche à billets » et décrit la création de monnaie par laquelle Etats et banques centrales tentent de masquer depuis des décennies les crises qu’ils ne peuvent régler. Son idée (ou plutôt son observation) est simple : en important massivement des immigrés, les gouvernements occidentaux se donnent l’illusion de sauver leur économie par de la croissance. Il a déclaré : « Depuis quelques années, nous vivons dans l’illusion, refusant d’affronter la gravité de notre situation économique. Alors que nous dégringolons dans les classements mondiaux, nous nous berçons d’illusions : “Tout va bien, la croissance du PIB est au rendez-vous.” Mais cette croissance, ces dernières années, n’aurait pas été possible sans les migrations massives d’une ampleur inédite et, bien sûr, sans l’endettement public excessif. Voilà tout ce qui a maintenu le PIB à un niveau élevé. »
L’immigration gonfle la dépense publique britannique
En fait cette illusion ne rassure que les dirigeants. Les peuples, en particulier le britannique, éprouvent dans leur chair que cette croissance est bidon, et que l’économie menace ruine : « On peut affirmer avec force que, ressenti par les individus, l’immigration de masse a appauvri le Britannique moyen. Prenons l’exemple de 2024 : un nombre record d’immigrants et une baisse du PIB par habitant… Nous nous sommes persuadés qu’importer massivement une main-d’œuvre étrangère bon marché et non qualifiée serait bénéfique pour notre économie. Certes, à court terme, cela a été avantageux pour les masses salariales des grandes entreprises. Mais catastrophique pour la formation et l’éducation de notre propre main-d’œuvre. » Contre cette illusion du court terme qui permet des profits à quelques entreprises en transférant la charge des dépenses à long terme au public (notamment en matière de prestations sociales), Farage entend « réduire l’immigration à zéro et baisser drastiquement le prix de l’énergie pour sauver l’économie et le niveau de vie britanniques ». Et comme l’immigration tend le marché immobilier, il prévoit à la fois de fermer les vannes d’entrée et de lancer « le plus vaste programme de construction de logements véritablement abordables jamais entrepris » dans les îles britanniques pour faire baisser les prix.
Immigration Net Zero et zéro transition énergétique pour sauver l’économie britannique
Farage a ensuite abordé la question de l’énergie verte et de son incidence sur la crise économique, afin de lutter contre la révolution en cours dans son ensemble : « Nos prix de l’électricité sont quatre fois supérieurs à ceux des Etats-Unis, deux fois supérieurs à ceux de la plupart de nos concurrents européens, et nous en sommes responsables. (…) Tout est en train de disparaître. Chimie, raffinage, ciment, construction mécanique lourde, sidérurgie, nous perdons littéralement tout. La Chine est la grande gagnante dans presque tous les secteurs. Et pourquoi ? Parce que, pour des raisons idéologiques, nous avons choisi d’avoir les prix de l’énergie industrielle les plus élevés au monde. » Cela ne menace pas seulement à court terme l’industrie britannique mais rend ridicule l’illusion de Keir Starmer de promouvoir l’IA, grande dévoreuse d’énergie. Pour Farage, il faut donc renoncer à l’écologisme, à l’énergie « verte », supprimer les subventions à la neutralité carbone, donc revenir au pétrole et au gaz de la mer du Nord, dont les réserves sont actuellement inexploitées à cause d’impôts punitifs et de la suspension des permis de forage. En somme, Farage se rêve en super-Trump, et son électorat l’y pousse : en matière d’immigration les Anglais sont désormais plus radicaux que les Américains.











