Un nouveau « massacre de Noël » au Nigeria, c’est ce que beaucoup craignent, en particulier Judd Saul, fondateur de l’association Equipping the Persecuted. Au Capitole, à Washington, lors du Sommet d’urgence sur les crimes contre les chrétiens, judicieusement réclamé par Trump, il a lancé un avertissement alarmant qui n’étonne guère compte tenu des attentats, enlèvements et massacres permanents qui y visent les communautés chrétiennes. L’ampleur est sans précédent – les nombreux articles de RITV en témoignent depuis longtemps.
Revivra-t-on Noël 2023, où, plusieurs jours durant, des villages entiers ont été dévastés et plus de 160 chrétiens ont été massacrés ? Pourra-t-on encore s’en étonner alors que le gouvernement nigérian choisit de garder ses œillères et n’envoie guère ses forces de l’ordre alors même qu’il est souvent informé des menaces ? De la même façon, la communauté internationale n’en a cure et parle d’une violence généralisée qui n’a pas de cible définie, ou même agite la cause à tout faire du changement climatique !
Pourtant, il est des chrétiens qui meurent parce qu’ils sont chrétiens et qu’à ce titre, ils ne doivent plus être présents sur ces terres. Les djihadistes de Boko Haram ne se sont jamais cachés du fait qu’ils voulaient précisément les éliminer, en particulier de cette région du nord-est où ils sévissent. Comme le disait mercredi The Catholic Herald, « affirmer que le conflit au Nigeria est multiforme est vrai ; instrumentaliser cette complexité pour masquer la persécution religieuse est malhonnête ». Ce déni est même criminel.
Le Nigeria : un pays « particulièrement préoccupant » en matière de liberté religieuse pour Trump
Depuis que Donald Trump a tiré la sonnette d’alarme concernant le massacre de croyants chrétiens, beaucoup de médias, note une publication du ChristianPost, se sont attachés à plus ou moins infirmer les propos du président américain, remettant en cause les chiffres, dénonçant le flou des estimations, agitant le peu de confiance qu’on pouvait accorder aux organisations locales, telles que le site TruthNigeria.com. Alors que, justement, ces dernières tentent de pallier la limitation voulue et orchestrée des informations : Judd Saul a noté, lors du Sommet, que « chaque attaque au Nigeria est filtrée par Al Jazeera (une chaîne d’information qatarie) avant d’être relayée par les médias traditionnels ».
« Notre organisation a émis plus de 100 alertes terroristes depuis 2023, avec une précision de 89 %. Nous savions donc où et quand les attaques allaient avoir lieu, et nous avons averti le gouvernement nigérian à chaque fois. Pourtant, chaque attaque, chaque alerte, chaque avertissement a été ignoré. » Or, en ce moment même, selon lui, les Peuls (groupe ethnique majoritairement musulman et éleveur de bétail) se rassemblent à la frontière près de Nasarawa : ils projetteraient « un autre massacre pour Noël ».
Un massacre comme celui de Yelwata en juin dernier ? Franc Utu, chercheur universitaire et ancien conseiller spécial principal du gouverneur de l’Etat de Benue, a raconté au Capitole les horreurs commises dans son village : « En quatre heures, 278 de mes proches ont été anéantis de la manière la plus horrible. Ils n’ont pas seulement reçu des balles. Beaucoup ont été sauvagement massacrés. » Et de parler de cet enfant de deux ans, retrouvé calciné dans les bras de sa mère ou encore de sa propre sœur dont le crâne fracassé laissait sortir le cerveau…
« Ils ont été tués, non pas pour autre chose, mais à cause de leur foi. »
« Une tentative systématique d’anéantir tout un peuple »
« Depuis 2009, plus de 19.000 églises au Nigeria ont été incendiées ou détruites », a -t-on entendu au Capitole. Selon Open Doors, le Nigeria était, en 2024, le pays qui comptait le plus grand nombre de chrétiens tués en raison de leur foi : 3.100 chrétiens tués et 2.830 enlevés cette année-là. Le 21 novembre dernier, c’est le plus important enlèvement de masse de l’histoire du Nigeria qui a eu lieu : seulement une centaine des 265 élèves et membres du personnel enlevés au pensionnat de St. Mary’s, dans l’Etat du Niger, ont été récemment libérés à la suite de négociations entre le gouvernement nigérian et leurs ravisseurs. On ne sait rien des autres – on sait en revanche ce qu’ils subissent.
Le pire est que la plupart du temps, les services de renseignement du gouvernement sont au courant. Franc Utu a rappelé que pour l’attaque de Yelwata, ils avaient prévenu le gouvernement un mois avant, puis 24 heures avant. Mais rien n’y a fait : Utu allègue qu’il est largement infiltré par les djihadistes.
Cette inaction continuelle et systématisée a engendré, en plus des massacres, des déplacements massifs de chrétiens fuyant les zones de risques. Dans l’état de Benue, ancien « grenier du pays » plus de 600.000 agriculteurs chrétiens sont piégés dans des camps où la nourriture, mais aussi l’eau et les soins médicaux manquent cruellement. La situation humanitaire est alarmante.
La persécution religieuse des chrétiens dérange l’Occident post-moderne
Alors, des billevesées ? De la désinformation de droite ? Alors que tant de faits s’amoncellent, le gouvernement nigérian et la communauté internationale persistent et signent. Même de hauts dignitaires de l’Eglise catholique ont apporté leur voix à ces relativisations délétères, comme le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’Etat du Saint-Siège, ainsi que l’écrivait Jeanne Smits dans nos pages.
Interdiction de parler de « génocide », même pas de « persécution ». Des musulmans, aussi, sont tués ? Et alors ? Si ce n’est pas moins à blâmer, ce n’est pas en raison de leur foi, sauf si elle est jugée trop molle.
Le fait est que les violences se concentrent dans le nord et le centre du Nigeria, notamment dans les Etats de Plateau, de Benue et du sud de Kaduna, à majorité chrétienne. D’autres zones de massacres se situent dans les Etats de Zamfara et de Borno, où vivent d’importantes minorités chrétiennes. Ces communautés sont ciblées, identifiées par leur foi. Et les attaquants opèrent d’ailleurs au cri d’« Allahu akbar », comme le notait Emmanuel Ogebe, avocat international spécialisé dans les droits humains, interrogé par TruthNigeria.
Mais le veule Occident, laïque et politiquement correct, préfère ignorer cette réalité. La posture américaine changera-t-elle la donne ? La voix des victimes se fait pour le moins entendre plus clairement : le fossé entre les déclarations officielles et les violences documentées se creuse. Mais les souffrances des chrétiens du Nigeria sont loin d’être terminées.











