En Angleterre, ce n’est pas loin d’être un drame national : un nombre croissant de « maisons publiques », les fameux pubs où se déguste une bière plus ou moins authentique, se voit acculé à la fermeture. Ce déclin modifie profondément le visage du pays. L’une des raisons « socioéconomiques » de cette situation, assure Lord Hodgson d’Astley Abbotts, est le nombre des musulmans. « Dans certaines zones de Nottingham, Leicester, Manchester, Leeds et Birmingham la croissance de la population musulmane, qui ne boit pas, conduit à de nombreuses fermetures de pubs. »
Il a fait ces remarques au cours d’un débat à la Chambre des Lords sur les chaînes de pubs : ces établissements dont les patrons ont conclu des accords avec des fournisseurs et se voient éventuellement imposer des coûts prohibitifs pour s’approvisionner en bière alors qu’ils n’ont pas le choix de vendre d’autres marques ni, surtout, des produits de brasseries artisanales. Lord Hodgson, ancien patron de brasserie industrielle, cherchait sans doute à défendre les intérêts de sa profession en imputant les difficultés des tenanciers de pubs à d’autres causes. A côté de l’augmentation du nombre des musulmans, il citait par exemple le déclin de certaines industries.
Les musulmans préfèrent le café au pub
Mais quel que soit le motif de son analyse, il y a le fait. Autant les pays musulmans regorgent de petits cafés où les chalands – des hommes bien sûr – se réunissent autour d’un verre de thé fumant, autant l’Angleterre se caractérise par l’atmosphère enfumée (jusqu’en 2007), fleurant bon l’ale et la saucisse, de ses pubs aux enseignes évocatrices. Les deux cultures sont antinomiques.
Donc, Lord Hodgson a dit ce qu’il en pensait. Mal lui en a pris ! Des associations de défense des droits des musulmans se sont indignées devant cette accusation, au nom du « dialogue interreligieux » et de la « lutte contre l’extrémisme ». Fiyaz Mughal, directeur de Faith Matters (« Affaires de foi » ou « la foi compte ») dénonce : « Il est tout à fait ridicule de faire porter aux musulmans la responsabilité de la fermeture des pubs alors qu’en réalité la consommation et le marketing de l’alcool ont eux aussi évolué avec le temps. »
Certains musulmans critiquent Lord Hodgson
Egalement responsable de la ligne d’assistance téléphonique « Tell Mama » (« Raconte à maman ») qui centralise les attaques antimusulmanes, Mughal note qu’en outre, les déclarations de Lord Hodgson partent du présupposé que les musulmans ne boivent pas. « certains le font bien et se considèrent toujours comme des musulmans ; la question est donc bien plus complexe que cette affirmation banale », dit-il.
Mais l’« activiste local » de Birmingham (ainsi le décrit The Independent), Wahid Anwar, membre de la Société islamique de Grande-Bretagne, pense que Lord Hodgson n’avait pas tort. « Je ne crois pas qu’il “accusait” les musulmans. Il attirait l’attention sur un facteur socio-économique. Comme vous le savez sans doute, la consommation d’alcool est interdite en islam. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de musulmans qui boivent, mais ils s’abstiennent généralement de le faire dans de tels établissements publics. »
Pas mécontent, finalement, Wahid Anwar…
Chesterton au secours du pub anglais
C’est un signe évident de l’urgence de lire, ou de relire, L’Auberge volante, merveilleux roman fantastique, peut-être même d’anticipation de G.K. Chesterton, où un comté anglais sous influence islamique interdit l’ouverture des auberges. La résistance se mettra en place sous la forme d’une auberge mobile – aussi bien pour braver l’interdit de boire de l’alcool que pour contrer une élite corrompue qui s’est soumise par intérêt aux principes du halal et du haram.
Rééditée en 1990 par L’Age d’homme, on trouve L’Auberge volante d’occasion.