Après les attentats perpétrés à Paris il y a dix jours, le ministre britannique des Communautés et des Collectivités territoriales, Eric Pickles, a adressé une lettre à près d’un millier d’imams. Ecrite avec Lord Ahmed, le premier musulman anobli par la reine, elle les exhorte à expliquer à leurs fidèles que « les valeurs de la Grande-Bretagne sont les valeurs de l’islam », et leur demande de les aider à identifier quiconque propage la haine islamiste, la qualifiant au passage d’« affront pour l’islam ».
La lettre est un appel à l’aide : « En tant que chefs de la communauté (musulmane), vous occupez une place unique dans notre société. Vous avez une occasion rare, et une responsabilité de taille : expliquer et démontrer comment l’islam peut être partie intégrante de l’identité britannique » Elle supplie les responsables religieux d’expliquer aux jeunes « particulièrement visés par les extrémistes » que ces derniers n’ont « rien à leur apporter ».
Eric Pickles est « fier » des musulmans de Grande-Bretagne
Le ministre Eric Pickles se dit « fier » de la réaction des musulmans britanniques, à l’instar des musulmans à travers le monde, qui ont clairement condamné ces attaques. Il a dû « oublier » les dizaines de manifestations de haine anti-française qui agitent aujourd’hui de nombreux pays musulmans.
Le ministre prie les responsables religieux de leur rapporter tout cas de « haine anti-musulmans » dans la police ou dans la société en général, en promettant d’apporter toute l’aide dont les mosquées ont besoin. « Comme toutes les religions, l’Islam et son message de paix et d’unité font de notre pays un endroit meilleur et plus fort, et la Grande-Bretagne serait affaiblie sans sa forte communauté musulmane », assure-t-il.
Des responsables musulmans choqués par la lettre d’Eric Pickles
Cette lettre pourtant très consensuelle n’a pas plu aux responsables religieux musulmans, qui ne comprennent pas pourquoi on leur demande d’aider à la prévention de l’islamisme alors qu’on ne le demande à personne d’autre.
« Nous allons écrire à M. Eric Pickles pour lui demander des éclaircissements sur la demande faite aux musulmans » a déclaré Harun Khan, secrétaire général adjoint du Conseil musulman de Grande-Bretagne. Avant de poursuivre : « Est-ce que M. Pickles suggère par là, comme le font des membres de l’extrême-droite, que les musulmans et l’islam sont intrinsèquement étrangers à la société britannique ? »
Tant pis pour les assurances données par Pickles : « Nous accueillerons vos pensées, idées et toute initiative sur la façon possible d’assurer que le vrai message de l’islam, ce message de paix, triomphe sur ceux qui cherchent à diviser nos communautés » !
S’adresser aux musulmans, c’est reconnaître le lien avec l’islam
Mais en toute logique, il est vrai que si l’islam est simplement un message de paix et que la radicalisation est due à internet ou à la prison, il n’y a effectivement aucune raison de demander des comptes aux musulmans plutôt qu’aux couvents de religieuses.
Le Premier ministre, David Cameron, a pris fait et cause pour la lettre de son ministre, précisant l’avoir lue et être d’accord avec sa teneur : « J’estime que c’est la lettre la plus sage, la plus sensible et la plus modérée qu’Eric pouvait écrire », a-t-il estimé.
Ne va-t-il pas alors falloir cesser d’affirmer que « tout cela n’a rien à voir avec l’islam » ?