Une étude réalisée par le Massachusetts Institute of Technology (MIT) révèle que les enfants de milieux aisés ont un cortex cérébral plus important dans les zones associées à la perception visuelle et à l’accumulation des connaissances que les enfants de milieux défavorisés. Cet « avantage » anatomique s’est traduit dans les faits par de meilleurs résultats aux tests standardisés. Si les enfants riches ont des cerveaux plus gros que les enfants pauvres, c’est peut-être ce qui explique les meilleurs parcours professionnels des premiers par rapport aux seconds, suggère l’étude. Mais la question importante est évidemment celle du « pourquoi », à laquelle l’étude ne répond pas.
Publiée dans le journal Psychological Science, elle s’est penchée sur 58 élèves de 12 et 13 ans aux Etats-Unis, parmi lesquels 23 étaient de milieux plus pauvres et bénéficiaient à ce titre de repas scolaires gratuits. Les chercheurs ont comparé leurs résultats aux tests avec des IRM de leurs cerveaux, pour découvrir une différence significative dans l’épaisseur des zones temporales et occipitales du cortex. Ils ont pu établir une corrélation non seulement entre ces différents résultats, mais aussi avec le niveau de revenu des familles des enfants concernés.
Les enfants riches ont des cerveaux plus gros : à qui la « faute » ?
Voilà qui apporte de l’eau au moulin des promoteurs de la « lutte contre les inégalités » par l’école, et c’est d’ailleurs le sens des commentaires des responsables de l’étude. John Gabrieli, professeurs de sciences cognitives au MIT, note ainsi : « Ainsi qu’on pouvait s’y attendre, il y a un coût réel associé au fait de vivre dans un environnement qui n’apporte aucun soutien. Nous le constatons non seulement dans les résultats des tests, dans la réussite scolaire, mais aussi à l’intérieur du cerveau de ces enfants. Pour moi, c’est un appel à l’action. Il faut renforcer les possibilités de réussite pour ceux qui ne les obtiennent pas facilement dans leur propre environnement. »
Ce n’est un secret pour personne que les inégalités de naissance sont réelles : l’enfant qui ne reçoit aucune éducation culturelle et qui doit se contenter d’un langage pauvre ne peut progresser de la même manière que celui qui est soutenu et stimulé par son entourage familial et par les relations avec les adultes.
Ce que montre cette étude, c’est bien que sur le plan cognitif, de l’apprentissage de la langue et du vocabulaire, l’école n’apporte pas la formation et les connaissances que l’on devrait pouvoir en attendre, ne compensant pas la pauvreté du bagage intellectuel transmis par les familles « défavorisées ».
Depuis longtemps, cette réalité a servi un discours dialectique : les enfants riches, « privilégiés », auraient un avantage indu par rapport aux enfants plus pauvres. Il faut donc les mélanger, assurer la « mixité sociale », quitte à niveler par le bas…
Le MIT constate le handicap des enfants pauvres – mais pourquoi l’école ne développe-t-elle pas les connaissances de tous ?
Cette étude confirme en réalité la plasticité du cerveau humain, suggèrent ses auteurs ; et ce ne sont pas les capacités intrinsèques qui sont modelées par l’environnement, mais la richesse des perceptions et l’emmagasinement des connaissances.
Ils se posent la question de savoir comment l’avantage des enfants riches s’installe : est-ce le fait de fréquenter des écoles plus performantes ? D’avoir des professeurs de plus grande qualité, ou d’être exposés à des programmes et des méthodes plus riches ou plus efficaces ? se demandent-ils.
Ils ont en tout cas montré que le cerveau évolue en fonction de la manière dont il est stimulé, et que les enfants pauvres ou « défavorisés » ne reçoivent pas à l’école un enseignement formateur. C’est vrai aux Etats-Unis comme en France, où l’« ascenseur social » de l’école est en panne depuis bien longtemps.