Lundi, les talibans ont à nouveau frappé en plein cœur de Kaboul, capitale de l’Afghanistan : comme à leur habitude, les talibans ont envoyé un kamikaze ouvrir la voie au volant d’une voiture piégée. Il a fait sauter son véhicule devant les grilles du parlement, tuant deux personnes : une passante et son enfant. Deux heures de combat ont été nécessaires à la police de Kaboul pour neutraliser les assaillants. Les six membres du commando ont été abattus. Les talibans avaient besoin de cette attaque spectaculaire pour réaffirmer leur puissance en Afghanistan, alors qu’ils venaient de critiquer publiquement l’installation de partisans de l’Etat islamique dans le pays, et plus largement dans la région, notamment au Pakistan.
Cette attaque en dit long sur la fragilité des autorités afghanes livrées à elles-mêmes depuis peu et sur le régime mis en place par les Etats-Unis au lendemain des attentats du 11 septembre.
L’armée a fini par l’emporter mais le succès revient aux talibans qui ont réussi à frapper en plein cœur de la capitale afghane, au moment où l’assemblée nationale de l’Afghanistan s’était réunie pour entendre le nouveau candidat du président Ghani au poste de ministre de la Défense, poste essentiel en raison des hostilités qui ravagent toujours le pays, mais qui est vacant depuis une dizaine de mois.
Les mouvements talibans d’Afghanistan et du Pakistan rejettent l’Etat islamique
Démonstration de force donc, de la part des talibans. La semaine dernière, le numéro deux du mouvement taleb d’Afghanistan, Akhtar Mohammed Mansour écrivait à Abu Bakr al-Baghdadi, le calife de l’Etat islamique, pour lui demander de ne pas s’installer en Afghanistan ou au Pakistan. « Le djihad contre les Américains et leurs alliés doit être mené sous une bannière et une direction uniques », a alors affirmé le chef taliban, allié à Al-Qaïda.
Des tensions qui rappellent celles qui existent depuis plusieurs mois entre l’Etat islamique et Al-Qaïda, en raison notamment de la popularité exceptionnelle de l’Etat islamique dans les fiefs d’Al-Qaïda. Akhtar Mohammed Mansour a envoyé sa lettre quelques jours à peine après que des partisans des deux groupes se sont battus dans la province de Nangharar, en Afghanistan.
Conflit entre l’Etat islamique et les alliés d’Al-Qaïda qui refusent leur présence
Quelques jours plus tôt, c’est le mouvement taleb du Pakistan, le Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP) également proche d’Al-Qaïda, qui avait mis l’Etat islamique en garde contre sa présence dans le pays.
Le document de 91 pages diffusé directement sur les réseaux sociaux dénonçait les actions de l’Etat islamique à l’égard des chiites, et contestait la légitimité de al-Baghdadi à proclamer un califat.
Il entend lutter contre l’influence croissante de l’Etat islamique au Pakistan ou en Afghanistan, où plusieurs combattants talibans ont déserté pour rejoindre les rangs de la milice irakienne à l’origine. S’il n’a eu aucune action sur le terrain, plusieurs combattants ont rallié la cause de l’Etat islamique et ce mouvement menace l’influence des talibans ou d’al-Qaïda dans la région.
Partout où il s’est implanté, l’Etat islamique est entré en conflit avec les organisations islamistes déjà en place : en Afrique du Nord, au Nigéria ou encore au Yémen. Les scènes d’affrontements entre milices y sont courantes, et c’est au cours d’une bataille entre les membres de l’Etat islamique et ceux d’al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) que la figure d’al-Qaïda Abu al-Walid al-Sahrawi a été blessée.
La facilité d’implantation de l’Etat islamique, sa rapidité à recruter et ses actions spectaculaires ont fait quelques jaloux, notamment depuis que de nombreux membres de ces organisations islamistes historiques quittent leurs rangs pour rejoindre le califat autoproclamé. Toutes les conditions sont réunies pour une escalade de la violence.