La Grèce en défaut de paiement

Grèce défaut paiement
Taux de chômage Hors zone euro (en rouge) et en Zone euro (en bleu). Calculés à partir des données d’Eurostat

 
Pour n’avoir pas remboursé, ce 30 juin au soir, la dette (1,6 milliard d’euros…) contractée auprès du FMI, la Grèce est désormais officiellement en défaut de paiement. Mais, si elle ne peut plus prétendre officiellement aux crédits du programme d’assistance financière, ou quelque accord que ce soit avec le bien mal nommé Mécanisme européen de stabilité, Athènes détient toujours quelques cartes en main…
 
Les partenaires européens d’Alexis Tsipras ne lui auront pas fait la faveur qu’il demandait, à savoir de prolonger de quelques jours le programme d’assistance financière, ou de mettre en place, éventuellement conjointement, un accord avec le Mécanisme européen de stabilité pour couvrir les besoins financiers de son pays, contre la mise en place d’une restructuration de la dette, dont l’idée a fait l’objet d’une nouvelle proposition.
 

Athènes en défaut de paiement

 
« Nous n’en sommes plus là, cela arrive trop tard », a résumé le président de l’Eurogroupe, le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem. « La seule chose que nous puissions faire est d’attendre l’issue [du referendum] et voir alors s’il y a des bases pour continuer à aider la Grèce, et de quelle manière. »
 
De fait, si l’arriéré de plus d’un milliard et demi vis-à-vis du FMI (une première depuis sa création en 1944) constitue une réelle difficulté, il appert des propos tenus par les différents responsables européens que leur opposition tient beaucoup plus à la volonté grecque de soumettre la situation à la volonté populaire par le biais du referendum.
 
Depuis Berlin, Angela Merkel a été plus claire encore : « Nous ne négocierons sur rien de nouveau avant que le referendum, tel qu’il est prévu, ait eu lieu ! »
 
Concrètement, la réunion de l’Eurogroupe, qui devait se tenir ce mercredi, n’aura eu guère d’impact, ni conséquence. Tout au plus Jeroen Dijsselbloem a-t-il indiqué que toute nouvelle aide serait vraisemblablement assortie de mesures plus strictes que celles refusées jusqu’ici par la Grèce.
 
Plus d’austérité donc, pour punir la Grèce d’avoir osé faire même semblant de résister. Et tant pis si tout cela ne fait qu’aggraver la situation… Car, hormis affirmer péremptoirement que la situation aurait été bien pis pour les Etats-membres s’ils n’avaient pas appartenu à l’Union européenne, quel politicien en a jamais apporté la moindre preuve ? Les comparaisons internationales prouvent incontestablement le contraire et les contre-exemples s’accumulent : Angleterre, Islande, Suède, Suisse, Norvège…
 

La Grèce entre « oui » et « non »

 
Que va-t-il donc se passer pratiquement ? On l’ignore, tant on a l’impression qu’Alexis Tsipras danse d’un pied sur l’autre, passant de Moscou à Bruxelles avec une aisance déconcertante. Dans les couloirs de la Commission européenne, on murmurait pourtant mardi soir que son ministre des Finances, Yanis Varoufakis, aurait affirmé que le gouvernement grec pourrait changer sa consigne de vote, pour finalement appeler les grecs à voter « oui » dimanche… et même annuler la consultation si un accord se dessine.
 
A moins qu’il ne s’agisse d’un moyen plus ou moins habile d’exaspérer ses compatriotes afin de les pousser, en définitive, à voter « non », on doit reconnaître que le scenario grec devient de plus en plus embrouillé.
 
Quoi qu’il en soit, et deux précautions valant mieux qu’une, on a vu débuter le petit jeu médiatique consistant à expliquer que, dans les sondages, le « oui » se rapprocherait sensiblement du « non ». La technique de pression psychologique est classique, et marche à l’occasion. Mais il va falloir jouer plus finement que ces dernières semaines où nos confrères ne voyaient pratiquement que des soutiens à Bruxelles défiler dans Athènes… ce qui aurait sans doute fait rigoler les Grecs s’ils étaient encore en mesure de s’amuser de quoi que ce soit.
 
En attendant, on se demande, dans la période de trouble actuelle, combien de Grecs les sondeurs ont effectivement interrogés, pour donner 54 % des intentions de vote au « non », et 33 % au « oui » à quatre jours du scrutin.
 

Voter, oui ! Mais pour quoi ?

 
Et pour quoi les électeurs grecs vont-ils voter ? A l’heure actuelle, la question semble devoir être posée ainsi : « La proposition soumise par la Commission européenne, la Banque Centrale européenne et le Fonds monétaire international lors de l’Eurogroupe du 25 juin 2015, qui consiste en deux parties qui forment ensemble leur proposition globale, doit-elle être acceptée ? »
 
Question assez simple dans sa formulation, même si l’incise sur les « deux parties » de la proposition n’est pas très claire pour qui n’a pas suivi le dossier.
 
Il y a cependant deux difficultés. La première est que cette formulation peut changer d’ici dimanche, en fonction des discussions, officielles ou non, qui auront lieu d’ici là, et qu’un électeur inattentif, gavé par des semaines de propagande sur le sujet, ne prendra peut-être pas le temps de la relire au moment de glisser son bulletin dans l’urne.
 
La seconde est plus importante encore : que savent, en définitive, les électeurs grecs des tenants et aboutissants de la question qui leur est posée ?
 
Car, fondamentalement, c’est avec leurs tripes, avec leur appréciation positive ou négative de l’Europe que les Grecs voteront. A ce niveau-là, gageons que la pression médiatique va donner tout ce qu’elle peut au cours des quatre jours qui restent…
 

François le Luc