Le président de la République, grand maître de l’ordre de la Légion d’honneur, a remis vendredi soir à l’ancien premier ministre Michel Rocard les insignes de grand’croix de l’ordre. A cette occasion, François Hollande a présenté Michel Rocard comme un « ami » et un « exemple ».
Le président de la République a été plus loin. Bien qu’il n’ait jamais fait partie de la mouvance rocardienne, il a tenu à saluer la « fidélité », la « morale » et la popularité de l’ancien premier ministre.
Les qualités rocardiennes évoquées par François Hollande ont néanmoins dû lui faire l’effet du couteau qu’on retourne dans la plaie. « Ce qui fait votre caractère, c’est cette capacité à vous élever, c’est ce qui a fait l’éclat de votre vie publique, lui a-t-il déclaré. Vous avez servi l’intérêt général, quitte parfois à sacrifier le vôtre. »
Michel Rocard, grand’croix de la Légion d’honneur
On pourra sans doute discuter cette capacité à l’élévation de Michel Rocard. Ce qui est certain, c’est que le propos présidentiel était manifestement empreint d’une certaine nostalgie, et peut-être bien même de jalousie.
Le reste est à l’avenant. En mai 1991, continue le président de la République, « vous quittez l’hôtel Matignon avec une popularité que beaucoup pourraient vous envier aujourd’hui ». A commencer, bien évidemment, par François Hollande lui-même, qui, dans un sondage publié la veille, ne comptait plus que 22 % d’opinions favorables…
Autre exemple : « Vous avez donné à la France cette confiance en elle-même, toujours avec votre méthode du compromis, du dialogue et de l’apaisement, qui pour ce qui nous concerne est un exemple. »
Bravo ! Mais, apparemment, mais cela n’étonne plus les Français de la part de François Hollande, il a quelque mal à comprendre les exemples qu’il se donne. En tout état de cause, il les imite si mal que la confiance n’est plus au rendez-vous. Une fois encore, 22% d’opinions favorables. L’exemple parfait du contre-exemple…
« Un accoutrement étonnant »
Cela dit, les exemples donnés par François Hollande ne sont peut-être pas du meilleur goût : les accords de Matignon sur la Nouvelle-Calédonie en 1988, et la création de la Contribution sociale généralisée (CSG) en 1990. On doute que, sur l’un et l’autre sujet, le consensus se fasse parmi nos compatriotes si on se donnait la peine de les interroger.
Michel Rocard a ensuite pris la parole, pour défendre sa vision d’un socialisme réformiste : « A la différence de toute autre force de gauche partout en Europe, la gauche française est née d’un accoutrement étonnant, unique, entre le marxisme et le jacobinisme. »
Un accoutrement étonnant certes, mais dont la France, si nous n’y pretons remède rapidement, est en train de mourir…