Le débat n’est pas nouveau. Il irrigue, et de plus en plus vivement à mesure que le temps passe, et que les crises s’enchaînent, nos sociétés modernes, fondant tout à tour les recettes censément miraculeuses, mais profondément inhumaines, que nous impose, du malthusianisme à l’écologisme, l’idéologie fondamentale dont le nom évolue ainsi au gré des époques et des nécessités du moment. Quelle que soit sa dénomination du moment, elle vise à accuser l’homme de tous les maux terrestres, non pas même du fait du péché originel, mais de sa nature propre qui le pousserait à dominer sur tout, au point de provoquer, à travers toute une série d’étapes dont la reproduction humaine est la plus couramment honnie, l’effondrement prochain de notre monde.
Face à ce mal fondamental que constituerait l’être humain pour la planète terre (et mère), on ne cesse de nous proposer, de nous vanter des scénarios d’avenir énergétiquement vertueux. Il s’agit de changer de modèle énergétique pour des solutions plus durables (dans la logique du développement du même nom) à base de solaire, d’éolien, d’hydraulique, de géothermie, etc. bref, tout ce qui est communément dénommé les « énergies renouvelables ».
L’homme va-t-il provoquer l’effondrement du monde ?
Après avoir constitué le fond de commerce des institutions internationales, et, petit à petit, et dans leur lignée, la politique des grands pays notamment occidentaux, cette expression écologique est en train d’envahir les media, afin que la doxa, dont l’homme de la rue ne connaît, pour l’heure, que quelques points pratiques – et notamment le pléonastique « tri sélectif » –, l’imprègne totalement, et qu’il débarrasse ainsi la terre, peu à peu, de son abominable empreinte écologique.
L’étape médiatique est donc nécessaire pour y parvenir, en multipliant chez tout un chacun la conviction des difficultés dues à une augmentation de la présence humaine sur terre. « Le problème, souligne ainsi un article récent, c’est le manque de disponibilité et de réserves de ressources en minerai et matières premières – ce que l’on appelle l’épuisement des éléments – pour capter, convertir et exploiter les énergies renouvelables. »
A partir de ces deux points, celui de l’agrandissement de la population humaine, et celui de l’épuisement des matières premières, la plupart de ces articles posent, logiquement, mais sans y répondre, la question des solutions.
Il nous faut pourtant revenir à ces deux présupposés, véritables épées de Damoclès suspendues au-dessus de la planète, posés comme des constats scientifiques qu’il est donc impensable de contredire.
Etre sérieux…
La chose apparaît très nettement dans certains de ces articles. Lisons attentivement le paragraphe suivant, introduit par l’intertitre « L’insoluble équation des ressources » :
« C’est ce qu’explique l’ingénieur Philippe Bihouix, spécialiste de la finitude des ressources, dans son livre, L’âge des low tech. Nous avons jusqu’à présent toujours trouvé des solutions techniques pour remplacer les ressources épuisées ou en chercher de nouvelles et produire de nouvelles énergies. Alors qu’alternent dans les médias sérieux les pires constats concernant l’état de notre planète et les annonces tonitruantes de nouvelles percées technologiques, nous sommes confrontés à une contradiction qui sonne comme un défi insurmontable. »
Au passage, la contradiction dont il s’agit est que, face à la dégradation des stocks de matières premières, il faut de plus en plus d’énergie pour extraire ces matières premières (généralement des métaux), et de plus en plus de matières premières pour produire de l’énergie. Nous sommes donc bien enfermés dans une spirale qui ne peut aboutir qu’à l’effondrement du monde…
Mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit directement. Le paragraphe précité affirme deux choses, qui se renforcent l’une l’autre :
• La première est clairement affirmée : cet état de fait est attesté par « les médias sérieux ». Autrement dit, tout ce que vous pourriez lire d’autre, voire de contradictoire sur ces questions, ne sont qu’élucubrations de pseudo-savants, ou d’excités, etc.
• La seconde est simple, et corroborée par ce premier point, c’est le fait de la finitude des ressources, appuyé sur l’étude d’un ingénieur centralien.
La boucle est donc bouclée.
Une équation abstraite
Enfin, pas tout à fait. De quel droit, de quelle autorité, nous assure-t-on que tout cela est sérieux ? L’équation posée est peut-être insoluble ; mais elle est surtout abominablement simpliste, car elle pose toute la problématique à l’échelle mondiale.
Dès lors, d’un côté on additionne la valeur mondiale des matières premières – et même, si l’on veut suivre le nouvel Earth index de la BBC, du moindre être existant ; de l’autre, on pose l’homme, n’importe quel homme, comme un dépensier, un consommateur.
On n’a appris tout petit, mais sans doute mon professeur n’était-il pas « sérieux », que l’on ne peut pas multiplier des bananes et des poires, diviser des ours par des aigles, etc. Mais, toutes proportions gardées, c’est bien ce que l’on fait aujourd’hui, par l’application d’un modèle de calcul abstrait qui ne tient plus compte de la réalité.
Considérons d’abord les ressources naturelles. Il y a deux mois, l’on nous faisait fêter le « jour du dépassement », selon lequel l’humanité avait, à cette date, dépassé la consommation de ce que la terre avait produit à cette date. Et comme ce n’était pas la première fois, notre déficit va galopant…
Sans disconvenir de l’existence de pollueurs et autres destructeurs de ressources naturelles, il convient de noter que celles-ci n’ont de valeur réelle qu’économique. Qui s’inquiétait du pétrole avant qu’on ne l’exploite, afin d’enrichir à milliards (quelle que soit la monnaie) des sociétés, voire des pays producteurs ?
Quelles ressources ?
Il en est ainsi de toutes les ressources « naturelles ». Elles n’ont de réalité, pour nos braves défenseurs de la planète, qu’en fonction de la valeur que, à un instant donné, la technique et l’économie lui attribuent. Qui dira la valeur du sable – dont on commence à nous annoncer la disparition, annonce qui pourrait permettre une quantification sonnante et trébuchante – avant que certaines industries, telle l’informatique, et surtout la construction, ne s’en empare ?
On en revient au fameux rapport Meadows sur les limites de la croissance, publié en 1972 par le Club de Rome. Bravo ? Non, car, pour l’heure, aucune des dates alors avancées ne s’est vérifiée.
On a évoqué le pétrole et le sable, mais on pourrait faire le tour de toutes les matières permettant de produire de l’énergie. Toutes ces matières n’ont, en réalité, de valeur qu’en fonction de l’activité humaine. Si l’homme ne l’utilise pas (et ne la commercialise pas), la matière enfouit dans notre terre n’a pas de valeur. Et la quantification universelle réalisée par la BBC n’est qu’un trompe-l’œil : qui vendra demain les 140 millions de dollars auxquels ses réalisateurs ont ainsi estimé les raies Manta et leur activité ?
On en arrive donc à l’homme qui, loin d’être le mauvais génie de la terre, en est la véritable première ressource – celui qui est à l’origine de toutes les autres. Il suffit de lire sérieusement (si ! si ! c’est possible) certains auteurs, de Mgr Schooyans à Pascal Bernardin (et son Empire écologique), en passant par Stanislas de Larminat, pour se convaincre que, comme l’écrit le Compendium de la doctrine sociale de l’Eglise, les ressources, ce sont « tous les biens et services auxquels les sujets économiques, producteurs et consommateurs privés et publics, attribuent une valeur pour l’utilité qui leur est inhérente dans le domaine de la production et de la consommation ».
L’homme encore
Et, bien sûr, c’est au niveau de l’homme que l’équation se pose, ou plutôt doit se résoudre. Car les tenants de l’écologisme en arrivent très vite à demander une réduction drastique de l’espèce humaine, et notamment, comme l’écrit en toutes lettres un internaute, à « liquider tous les fous furieux religieux adeptes du “croissez et multipliez”… »
On touche ici aux tenants des politiques de contraception, d’avortement, et de stérilisation. Qui ne collent pas d’ailleurs mathématiquement avec la bonne conscience qui veut accueillir des millions de réfugiés, plus ou moins jetés sur les routes par les actions des mêmes politiciens.
Tout se tient pourtant, et cela demanderait d’autres développements. Mais tout est, par l’intermédiaire la transmutation de l’homme en consommateur, et d’abord en jouisseur, la transcription terrestre du « non serviam » initial, de la révolte de Lucifer contre Dieu.