Au sommaire :

• Boulatov, ou les apparences fragiles
• Moines Shaolin à Dakar : un apostolat chinois
• Beatles : la révolution a cinquante ans
• Les archaïques contre le « social-démocrate »

Boulatov, ou les apparences fragiles

Les médias ont diffusé de nombreuses images ensanglantées de l’opposant ukrainien Boulatov, assurant qu’il avait été interrogé par les services russes. Il vient de donner une conférence de presse pour décrire les sévices qu’il aurait subis, et les renseignements qu’on lui aurait extorqués. Au delà des apparences fragiles, analysons sa vidéo.

On se souvient des photos qui avaient justifié la chute du dictateur Ceaucescu, montrant un prétendu charnier à Timisoara. La presse occidentale avait marché comme un seul homme. Or, c’était un faux, monté par le KGB pour avoir les coudées franches et liquider un tyran qui le gênait. Les images ont ceci de dangereux que le spectateur inattentif prend parfois pour une preuve, sur la seule foi d’un témoin, ce qui n’est qu’une supercherie. Dans le cas de Boulatov, il convient au moins d’avoir des doutes : attention, apparences fragiles !

Un témoignage ambigu et non fiable

Un, son attitude est-elle nette ? Non, pas une seule fois il ne regarde la caméra, comme s’il récitait un rôle appris. Deux, a-t-il été torturé ? On n’en sait rien. Les images ensanglantées peuvent avoir eu pour cause une simple blessure. Et la balafre résiduelle n’indique rien. S’il y a eu interrogatoire brutal, il n’a pas pris la forme prétendue : ni l’arcade sourcilière, ni le nez, ni la lèvre, ni les dents ne portent la trace d’une forte bastonnade. Trois, ce n’est pas dans l’interview, mais on a répété que les interrogateurs présumés étaient des agents russes : quelle présomption en a-t-on ? Quatre, enfin, Boulatov ne nie pas, lui, être un agent américain. Le déroulement des émeutes ukrainiennes donne tout lieu de penser que les services US en ont organisé la logistique et le financement. Ce qui ne veut pas dire, bien sûr, que Yanoukvitch soit un garçon recommandable ni Poutine un petit saint.
 
 

Moines Shaolin à Dakar : un apostolat chinois

Les moines Shaolin popularisés par la star des arts martiaux Bruce Lee font une percée au Sénégal où ils se produisent. Derrière la vogue médiatique de ce sport très spectaculaire, c’est tout un mode de vie qui se répand en Afrique et dans le monde. Un apostolat chinois, en somme.

La Chine fait concurrence en Afrique aux Etats Unis et à l’Europe. Les spécialistes se demandent si elle apporte une alternative au modèle de développement occidental, à la tyrannie de la dette et des conditions émises par le FMI, ou si elle sert simplement et férocement ses intérêts. Quoi qu’il en soit, elle tâte aujourd’hui l’approche culturelle avec cette tournée des moines Shaolin au Sénégal.

Spiritualité globale

Tout le monde les connaît dans le monde, et ils contribuent à nourrir une conscience globale chez les jeunes garçons, c’est un morceau du patrimoine culturel planétaire comme Racine était hier un morceau du patrimoine français. Il ne faut pas non plus sous-estimer l’aspect spirituel : un mode de vie et de pensée est proposé, c’est plus qu’une philosophie, mot qu’on a l’habitude d’accoler d’ordinaire au bouddhisme, c’est une vraie religion, l’habit des moines en témoigne. L’apostolat Shaolin entend diffuser dans l’Afrique demeurée animiste malgré l’Islam ou le christianisme une nouvelle spiritualité syncrétiste proche du New Age. Mais l’image de ces jeunes embrigadés, fiers de leur mental et de leur physique, rebondit aussi jusque dans nos banlieues, ou des populations semblables sont sujettes aux mêmes engouements, et où des associations consacrées à «  l’insertion » promeuvent les sports de combats auprès des jeunes pour les occuper.