Live by night soit Vivre la nuit indique dans son titre le mode de vie à horaires inversés de criminels. Les vols, les assassinats, ou les déplacements de cargaisons suspectes s’opèrent en effet de préférence loin de la lumière du jour. Live by night veut proposer à travers un film de gangsters une véritable fresque des Etats-Unis des années 1920-1930. Dans la première décennie, durant la période de la Prohibition – c’est-à-dire d’interdiction totale par la Constitution de vente de boissons alcoolisées -, des mafias ont prospéré dans la fabrique, la distribution et la vente d’alcool, en particulier dans des bars clandestins leur appartenant.
Live by night est subdivisé en deux parties très inégales, en temps comme en qualité. La première partie est une sorte de prélude qui se déroule à Boston dans les années 1920. L’action se centre sur une bande de gangsters qui prennent le risque de braquer les bars clandestins, ce qui les expose aux représailles de la pègre. Les mafias italiennes et irlandaises de Boston mènent une dure guerre entre elles, et finissent par détruire ou absorber à leur profit ces gangsters. Dans son genre, cette introduction est réussie. Le contexte historique est bien rendu. Les personnages ne sont pas aberrants. La morale rappelant qu’un gangster ne saurait se contenter dans la durée de « voler des voleurs » sans nuire à la société, sans tuer personne, et surtout pas des policiers faisant leur travail, est là, bonne et juste. Il est dommage qu’elle soit démentie par la suite, aberrante.
Live by night sombre totalement dans le ridicule
Puis, malheureusement, le film sombre complètement dans la deuxième partie qui forme plus de 80 % de l’œuvre. Le héros est envoyé par son nouvel employeur mafieux italien administrer la succursale locale de l’organisation en Floride, base de production et de distribution de rhum clandestin, largement importé de Cuba. Là, ce héros se livre à la construction d’une utopie éthique, égalitaire, antiraciste… Le drame historique en perd toute crédibilité et sent fortement la projection de l’idéal de la gauche militante américaine des années 2010 ! Ce constructeur d’utopie progressiste est en principe le gestionnaire local de la mafia, une entreprise tout sauf philanthropique. On peut à la rigueur concevoir un criminel écœuré, voire repentant, qui refuserait d’assassiner, de trafiquer de la drogue, etc. Sa durée de vie dans la mafia serait des plus réduites, à moins, et encore, de fuir rapidement très loin. Là non, ce mafieux idéaliste prospère… Ainsi, Live by night sombre totalement dans le ridicule.
Hector JOVIEN