Mgr Fidel Herraez Vegas, archevêque de Burgos, a adressé dimanche dernier un message de mise en garde au catholiques de son diocèse contre les spiritualités nouvelles et autres formes de méditation « New Age » qui connaissent actuellement un fort regain de popularité. Il les a appelés à être particulièrement prudents en soulignant que ces méthodes peuvent éloigner de la vraie foi, leur demandant de faire preuve de discernement pour éviter de faire la confusion entre des techniques à première vue séduisantes et la véritable oraison chrétienne.
Mgr Herraez Vegas a nommément désigné le yoga et le zen – le premier est aujourd’hui volontiers enseigné aux élèves dans des écoles primaires catholiques en France ! – parmi les techniques auxquelles on donne aujourd’hui une vague coloration chrétienne, et qui séduisent nombre de personnes souffrant du stress lié au rythme effréné de la vie actuelle. Et il propose qu’on se tourne plutôt vers l’oraison centrée sur Dieu.
Voici le texte de sa lettre :
La spiritualité chrétienne et les nouvelles spiritualités
« Cette semaine, je veux commenter un thème de plus en plus à la mode dans notre société, et qui a également des répercussions sur notre vie ecclésiale. Certaines personnes ont fait part de leurs doutes et incertitudes et je considère comme une obligation, en tant que pasteur du diocèse, de proposer à tous les catholiques une parole de discernement et des critères leur permettant d’émettre un jugement de valeur.
« Le phénomène auquel je me réfère est la prolifération des “nouvelles spiritualités” ou “spiritualités alternatives”. Même si cela peut paraître paradoxal, il est logique que dans notre société sécularisée, caractérisée extérieurement par l’incroyance et l’indifférence devant le fait religieux, surgissent chez de nombreuses personnes le désir d’une expérience spirituelle qui apporte un sens et de la chaleur à leur existence. Cela est compréhensible, étant donné le style de vie actuel dominé par le stress, la compétitivité, la lassitude, l’anonymat, la solitude… Et étant donnée également la dimension spirituelle, qu’on la reconnaisse ou non, des êtres humains.
L’archevêque de Burgos en a assez du yoga et du zen soi-disant « chrétiens »
« C’est pour cela que de nombreuses personnes ont recours à des méthodes comme le yoga ou le zen, qui procède de l’hindouisme ou du bouddhisme, de la sagesse orientale, et qui sont souvent liées au mouvement “New Age”, qui à travers ses diverses manifestations est aussi un “ensemble de croyances et de pratiques mystiques et ésotériques, qui s’offre comme une expérience spirituelle consolante et bénéfique pour ceux que laissent insatisfaits le matérialisme et le rationalisme déshumanisant du monde occidental”. Nous ne pouvons condamner ni déprécier la soif de spiritualité qui jaillit au plus intime des personnes ; elle montre en outre l’insuffisance d’un modèle culturel et social dominé par le rationalisme, la technique et la consommation, qui bien souvent annulent la dimension transcendante de l’être humain.
« On recourt au yoga ou au zen jusque dans des rencontres d’oraison ou des ateliers de méditation proposés par des centres catholiques ou des groupes ecclésiaux. Il peut arriver que sous un habillage chrétien se cache une spiritualité non chrétienne, qui prétend aller au-delà des religions, y compris au-delà de la religion chrétienne. Et dans le meilleur des cas, tout cela peut prêter à confusion. La spiritualité chrétienne a des caractéristiques qui doivent être différenciées, vécues et conservées dans la clarté. Certaines pratiques corporelles peuvent aider à l’oraison. Mais elles ne doivent pas obscurcir ce que l’oraison chrétienne a de particulier : à savoir, pour reprendre les mots du pape François quand il la différencie d’autres pratiques “pseudo-religieuses”, l’oraison “pour de vrai”, “l’oraison d’adoration du Père, de louanges à la Trinité, l’oraison de remerciement, ainsi que l’oraison de demande au Seigneur, mais toujours l’oraison qui vient du cœur”.
“New Age”, médiation, et confusion syncrétiste
« La “nouvelle spiritualité” est souvent utilisée comme une thérapie pour résoudre un mal-être psychologique ou émotionnel et pour trouver la sérénité, la paix intérieure. A cette fin on essaie d’élargir sa propre conscience en aspirant à la fusion avec la divinité, avec la nature ou l’énergie cosmique, au fond, avec quelque chose d’impersonnel. Cela provoque normalement l’enfermement en soi et l’éloignement des autres. Et ainsi la conscience, la liberté, la responsabilité et la capacité à aimer s’estompent. C’est la “spiritualité du miroir”, contre laquelle le pape met également en garde, par laquelle on se regarde et on s’illumine soi-même, pour pouvoir rester dans son propre bien-être et dans son harmonie intérieure. La spiritualité chrétienne, au contraire, vit d’une relation personnelle avec Quelqu’un qui, de sa propre initiative, nous a aimés le premier. Cette relation se vit toujours au sein de l’Eglise et elle s’ouvre avec générosité aux besoins d’autrui.
L’oraison chrétienne, centrée sur Dieu
« Les deux dernières solennités liturgiques en date nous le montrent avec clarté. Lors de la fête de la Très Sainte Trinité, comme je vous le disais il y a quelques semaines, nous célébrons un Dieu vivant qui s’adresse à nous de manière personnelle, comme Père, Fils et Saint Esprit. C’est un Dieu avec un visage et avec un nom. Dimanche dernier, nous célébrions la Fête-Dieu, fête de l’Eucharistie qui rend présent Jésus mort et ressuscité pour nous, et qui en même temps nous ouvre à la rencontre avec le frère dans le besoin. Le chrétien prie comme un fils qui se dirige avec confiance au Père, qui est doux et miséricordieux ; il se sent uni à Jésus dans sa médiation sacerdotale ; il sait qu’il est mu par le Saint Esprit et se sent poussé à célébrer cela avec les autres, avec l’Eglise, dans la liturgie et dans l’amour “des œuvres et de la vérité”. Voilà le trésor que nous devons en permanence garder et approfondir.
« Les communautés chrétiennes, et aussi chacun de nous, devrions développer davantage la pratique de l’oraison, à partir de la tradition spirituelle et mystique chrétienne. Je vous y encourage avec joie, car, comme le dit le pape François, “une session de yoga ne pourra jamais enseigner à un cœur comment “sentir” la paternité de Dieu, pas plus qu’un cours de spiritualité zen ne le rendra plus libre pour aimer”. »