De retour de Colombie, le pape François parle de climat et de migrants dans les airs

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Messe à Medellin, en Colombie, le 09/09/2017.

 

Les méchantes langues diront que l’altitude ne convient pas au pape François ; d’autres, plus lucides peut-être, verront dans ses échanges avec les journalistes à 30.000 pieds au-dessus du niveau de la mer des lieux privilégiés pour l’exposé de son « agenda », comme disent les anglophones – son programme d’action. Le retour de Colombie n’a pas fait exception puisque le pape François a exprimé en termes assez violents sa condamnation de ceux qui nient le réchauffement du climat par l’action de l’homme et il a une nouvelle fois fais l’amalgame entre la défense de la vie et celle des migrants (qu’il n’est pourtant pas question d’éliminer physiquement).
 
Les propos du pape n’ont pas bénéficié d’une traduction officielle vers le français et nous vous en donnons donc ici notre version, en essayant de respecter le style très parlé, parfois confus, que le site du Vatican a retenu pour la retranscription en italien.
 
Une première journaliste a cité des scientifiques indéterminés selon lesquels la force des ouragans Harvey et Irma a été augmentée par le réchauffement des eaux océaniques (et ce même si les réchauffistes eux-mêmes ont été nombreux à rejeter cette assertion). Elle a interrogé le pape sur la « responsabilité morale » des dirigeants politiques qui refusent de collaborer avec les autres nations pour contrôler les émissions de gaz à effet de serre parce qu’ils refusent de reconnaître la responsabilité de l’homme par rapport aux changements climatiques. (Suivez-mon regard : il s’agit de Donald Trump au premier chef.)
 

Le pape François qualifie les climatosceptiques de « stupides »

 
Le pape a répondu : « Celui qui nie cela doit aller voir les scientifiques et le leur demander. Ils parlent de manière on ne peut plus claire. Les scientifiques sont précis. L’autre jour, quand on a sorti la nouvelle de ce navire russe – je crois – qui a pu rejoindre le Japon ou Taipei depuis la Norvège en passant par le pôle Nord, sans brise-glace, et les photos montraient les morceaux de glace… à travers le pôle Nord, donc, on peut passer. C’est très clair, très clair. »
 
Quelques précisions. Le bateau est effectivement russe – il a été construit sur une commande de Total et de son partenaire russe – et il est en effet parti de Norvège pour rallier la Corée du Sud. La nouveauté de ce voyage, c’est qu’il s’agissait de la première fois où un navire commercial – en l’occurrence un méthanier – passait par la route maritime du Nord au lieu de passer par le canal de Suez. Mais il est passé au sud du Cercle polaire et loin de naviguer librement, il a traversé la glace…
 
Une petite précision sur le navire : il s’agit du Christophe de Margerie, d’une conception toute nouvelle, dont la proue et la coque sont construits en acier particulièrement renforcé. Recouvert de plaques d’acier de 7 cm d’épaisseur, Il peut traverser une glace épaisse de 1,5 m. Il n’était pas accompagné d’un brise-glace parce qu’il est lui-même un brise-glace
 

Le voyage de Colombie s’est achevé sur une de ces rencontres avec les journalistes où le pape aime à se révéler

 
Le pape a poursuivi : « Quand cette nouvelle est sortie, d’une université – je ne me rappelle pas – une autre est parue également qui disait : “Nous avons seulement trois ans pour revenir en arrière, autrement, les conséquences seront terribles.” Je ne sais pas si cette histoire de “trois ans” est vraie, mais je sais que si nous ne retournons pas en arrière, nous allons tomber, c’est vrai. Du changement climatique, on voit aujourd’hui les effets, et les scientifiques disent clairement quel est le chemin à suivre. Et nous avons tous une responsabilité, tous. Pour chacun, qu’elle soit toute petite, ou plus grande, c’est une responsabilité morale : il s’agit d’accepter, de faire entendre son opinion ou de prendre des décisions. Et nous devons prendre cela au sérieux. Je crois que c’est une affaire dont on ne peut pas rire, elle est très sérieuse. Vous me demandez : quelle est la responsabilité morale ? Chacun a la sienne. Et les politiques aussi ont la leur. Chacun a la sienne propre. Selon la réponse qu’il donne. »
 
Le pape faisait sans doute référence à un article paru au mois de juin dans Nature sous la signature de Christiana Figueres qui parlait des fameux trois ans. Les délais apocalyptiques varient selon les sources : anciennement de l’ONU, elle est la vice-présidente de la Convention globale des maires pour le climat et l’énergie.
 
Voilà le nouveau « dogme », qui chasse ou fait oublier les vrais nonobstant tous les éléments contraires. Ce pape n’aborde même pas la réalité en rappelant le point de vue qui nous est proposé par Notre-Seigneur lui-même : « Cherchez d’abord le royaume de Dieu »…
 
Satisfaite sans doute par le côté spectaculaire de la réponse, « Allons-nous vers l’Apocalypse, avec tous ces événements atmosphériques ? », a insisté la journaliste Elena Pinardi.
 

Le climat et les migrants vus de là-haut : un discours hors-sol

 
Réponse du pape : « Je ne sais pas. Je dis : chacun a sa propre responsabilité morale, premièrement. Deuxièmement : si on a quelque doute quant au fait de savoir si tout cela est bien vrai, on demande aux scientifiques. Or, ils sont très, très clairs. Ce ne sont pas des opinions tirées par les cheveux : ils sont très, très clairs. Et qu’ensuite on décide. L’histoire jugera les décisions. »
 
Un autre journaliste l’a interpellé sur une prise de conscience qui tarderait à ce sujet. Pourquoi ?
 
Le pape François a répondu : « Le pourquoi ? Me vient à l’esprit une phrase de l’Ancien testament : l’homme est un être stupide, un têtu qui refuse de voir. Le seul animal du monde créé qui tombe deux fois dans le même trou, c’est l’homme. Les chevaux et les autres ne le font pas, non. C’est la superbe, c’est la présomption qui fait dire : “Non, ce ne sera pas la même chose.” Et puis il y a le “dieu poche” [le dieu portefeuille], n’est-ce pas ? Et pas seulement à l’égard du créé : tant de choses, tant de décisions, tant de contradictions, et certaines dépendent de l’argent. Aujourd’hui, à Carthagène, j’ai commencé dans une partie disons pauvre de Carthagène. Pauvre. L’autre partie, la partie touristique, il y a du luxe et du luxe sans mesure morale, on dirait. Mais ceux qui vont là-bas, ne s’en rendent donc pas compte ? Et les analystes socio-politiques, ils ne semblent pas conscients ? L’homme est un être stupide, disait la Bible. C’est ainsi, quand on ne veut pas voir et qu’on ne voit pas. On ne regarde qu’une partie. Pour ce qui est de la Corée du Nord, je n’en sais rien, je te dis la vérité, je ne comprends pas, vraiment. Parce que véritablement je ne comprends pas ce monde de la géopolitique, il est très difficile pour moi. Mais je crois que, d’après ce que je vois, il y a la quantité d’intérêts qui m’échappent, et que je ne peux véritablement pas expliquer. Mais l’autre aspect est important : on ne prend pas conscience. Pensez à Carthagène, aujourd’hui. Cela est injuste, et peut-on prendre conscience ? »
 

Le pape François s’en prend et reprend à Donald Trump

 
Evoquant par la suite l’affaire des migrants arrivés mineurs aux États-Unis qui risque l’expulsion avec la révocation du programme DACA, le pape a interpellé Donald Trump en assurant que celui-ci ne peut se prétendre « pro-vie » et en même temps prendre cette mesure. « S’il est un brave pro-vie, il comprend que la famille est le berceau de la vie et qu’il faut en défendre l’unité », a déclaré le pape, brandissant le spectre du suicide des jeunes qui sont privés de leurs racines. Mais s’il faut retrouver ses racines, comme le pape le dit très justement, ne faut-il pas en finir avec les migrations ?
 
Curieusement, le pape a ajouté : « Je ne veux pas m’exprimer sur cette loi parce que je ne l’ai pas lue ; je n’aime pas parler de quelque chose que je n’ai pas d’abord étudié. »
 
En revanche, il maintient toujours le même type de raisonnement : il prône des opinions temporelles qui devraient être acceptées comme vérités de foi et il cherche à pousser les défenseurs de la vie dans des directions politiques bien déterminées, qui n’ont pas de lien direct.
 

Jeanne Smits