Il fallait bien que cela arrive un jour : c’est même tout le sens de l’idéologie de l’antiracisme. Deux femmes « mariées » au Texas se sont vu opposer un refus d’agrément par l’agence Catholic Charities de Fort Worth à laquelle elles se proposaient comme famille d’accueil pour des enfants placés. Courroucées, elles ont porté plainte, s’estimant victimes d’une discrimination en raison de leur orientation sexuelle. Leur candidature en vue d’accueillir un enfant réfugié avait été rejetée au motif que leur choix de vie homosexuel n’offrirait pas à l’enfant placé une figure paternelle.
Les deux jeunes femmes, Fatma Marouf et Bryn Esplin ont porté plainte directement contre la conférence des évêques catholiques des Etats-Unis, et en même temps contre l’administration Trump, en déposant leurs plaintes le 20 février dernier devant la cour de district de Washington. Au fond, et vu que la plainte vise les autorités hiérarchiques religieuses et civiles, il s’agit d’obtenir un jugement de principe qui mette en cause le droit de toute agence d’adoption et de placement d’enfants d’agir selon des critères moraux déterminés, en l’occurrence confondus avec l’expression de la liberté religieuse, même si c’est par une voie un peu détournée.
Des lesbiennes « mariées » engagent des poursuites contre les évêques catholiques
Fatma Marouf et Bryn Esplin enseignaient toutes deux à l’université de Texas A&M ; elles affichent leur relation homosexuelle qu’elles ont formalisée par une cérémonie de « mariage ». C’est ce détail qui contrevient au cahier des charges de Catholic Charities établi par les évêques catholiques des Etats-Unis.
L’évêque de Fort Worth, Mgr Michael Olson, a pleinement soutenu l’agence d’adoption en expliquant que celle-ci répond simplement aux exigences de la mission confiée à l’Eglise par le Christ. « Ce serait tragique si Catholic Charities ne pouvait apporter ce secours en accord avec les valeurs de l’Evangile et les principes de l’assistance familiale dont les enfants exposés aux maltraitances au motif de leur insignifiance ont tant besoin », a-t-il expliqué.
Le travail de l’agence est « fidèle à la mission de l’Eglise de prendre soin des pauvres et des plus vulnérables » ; il est en pleine conformité avec les règles fédérales, a ajouté l’évêque, comme cela a été vérifié par la conférence des évêques catholiques du Texas et du diocèse de Fort Worth.
Du côté des deux lesbiennes, on reproche à l’Eglise et à l’administration américaine de violations multiples de la constitution, notamment en méconnaissant le droit à la « protection égale » : une violation qui serait constituée par la simple exigence d’une conformité avec un enseignement religieux. Leur avocate, Jamie Glicksberg, militante de la cause LGBT, soutient ainsi que le fait de permettre à une agence de rejeter une candidature pour les motifs invoqués par Charities « reviendrait à ce que notre gouvernement privilégie un ensemble de croyances religieuses par rapport à un autre, ce qui est anticonstitutionnel ».
Les lois contre la discrimination aux Etats-Unis utilisées contre les évêques catholiques
L’implication de l’administration américaine dans le dossier résulte du fait que Catholic Charities reçoit des subventions fédérales : celles-ci sont contestées dans le cadre de la procédure au motif qu’elle bénéficie à une organisation qui autorise la discrimination à raison de la religion.
Une loi du Texas entrée en vigueur en septembre dernier protège pourtant les agences d’adoption, et notamment les agences chrétiennes, de toute sanction gouvernementale si elles privilégient les foyers composés d’un homme et d’une femme mariés.
Les solutions adoptées par les agences texanes sont diverses : certaines exigent une durée minimale du mariage, voire la pratique religieuse régulière ; parfois elles autorisent le placement auprès de personnes célibataires mais uniquement au cas par cas.
Le refus d’agrément comme famille d’accueil, une atteinte à « l’égalité » des « familles » lesbiennes
La loi texane protège également les agences d’aide aux enfants de toute « discrimination gouvernementale » en cas de refus d’avortement ou de distribution de contraceptifs ; elles ne peuvent pas non plus être poursuivies dans l’Etat pour avoir proposé une éducation chrétienne, placé l’enfant dans une école catholique ou refusé de renoncer à « des croyances religieuses sincères ».
L’Alabama, Michigan, le Dakota du Nord, le Dakota du Sud et la Virginie sont dotés de lois similaires qui protègent explicitement les agences d’adoption chrétiennes.
Ce fait aurait dû empêcher le dépôt de plainte de Fatma Marouf et Bryn Esplin. Mais aux dires de leurs avocats, il ne s’agit pas de contester la loi de l’Etat : leur argument consiste à dire que l’affaire concerne des enfants réfugiés qui sont par définition sous la protection du gouvernement fédéral, ce qui rendrait inapplicables les lois des Etats protégeant la liberté religieuse dans leur cas.
En même temps, les poursuites visent à démontrer que de telles lois sont « dangereuses » puisqu’elles risquent de « nuire aux enfants du fait que moins de foyers leur seront ouverts » et de « nuire aux familles aimantes qui se voient rejetées ».