Dans une « lettre au peuple de Dieu », le pape François accuse le cléricalisme d’engendrer la pédophilie mais ne dit pas un mot de l’homosexualité dont souffre une partie du clergé. Il l’exonère ainsi et reprend la rhétorique des ennemis de l’Eglise.
Le pape François cite à propos l’écriture. Ce que l’on fait aux plus petits, c’est à Dieu qu’on le fait, et si ton œil te scandalise, jette-le. Il a raison, faire du tort à un enfant, surtout quand on a la charge de l’élever, est laid et lâche, et les blessures qu’on lui fait sont longues à guérir. Il nous exhorte à la prière, au jeûne et à la réforme de soi-même. Très bien. Là où cela se gâte, c’est quand il recherche la cause de ce qu’il nomme la pédophilie dans l’Eglise. « Dire non aux abus, c’est dire non, de façon catégorique, à toute forme de cléricalisme », affirme-t-il.
Pour le pape François, le cléricalisme, voilà l’ennemi !
Pour bien se faire comprendre, le pape François précise. Le cléricalisme est une « manière déviante de concevoir l’autorité dans l’Église ». Un abus de pouvoir du clergé, qui « annule la personnalité des chrétiens », une « corruption spirituelle » qui se traduit par un « aveuglement confortable et autosuffisant où tout finit par sembler licite: la tromperie, la calomnie, l’égoïsme ». Le cléricalisme aura donc contribué, selon le pape François « à perpétuer beaucoup de maux que nous dénonçons aujourd’hui ». Bref, le souverain pontife est d’accord avec Gambetta, en matière de « pédophilie », le cléricalisme, voilà l’ennemi. C’est aussi l’avis du père Stéphane Joulain, psychothérapeute spécialisé dans le traitement des abus sexuels, qui juge les réformes lancées par Benoît XVI après les premiers scandales de pédophilie en 2010 : « Malgré ses bonnes intentions, le pape s’est trouvé à des réflexes cléricaux de protection au sein de la Curie, réflexes dont il n’est pas lui-même pas totalement exempt ».
Explications maçonnes de la pédophilie dans l’Eglise
En d’autres termes la mauvaise conscience du pape François le pousse à avaliser les attaques récurrentes des ennemis de l’Eglise contre la curie et le Vatican, déjà vieilles du temps de Gide.
La tradition des Lumières et des loges était d’imputer au célibat clérical l’obsession sexuelle qui mène à la pédophilie. Voltaire le disait uniment : « Les moines chargés d’élever la jeunesse ont été toujours été un peu adonnés à la pédérastie. C’est la suite nécessaire du célibat auquel ces pauvres gens sont condamnés. » Hitler fournissait des statistiques pour le prouver : selon le ministre nazi des cultes, 7 000 ecclésiastiques avaient été condamnés pour crimes sexuels entre 1933 et 1937, alors que le chiffre réel était de 170 cas. Et Pierre Waldeck-Rousseau, le président du Conseil à qui l’on doit la loi de 1901 sur les associations professait que le clerc qui fait vœu de chasteté n’est ni un homme normal ni un citoyen à part entière.
Cléricalisme et structure de péché : les vipères lovées dans l’Eglise
La nouveauté après Vatican II, c’est que les attaques contre l’Eglise ont trouvé écho et relais dans l’Eglise même. Ainsi, dans le scandale de la pédophilie des années 2009 – 2010, l’évêque de Poitiers, monseigneur Rouet, a souligné que l’Église, « système clos, idéalisé, sacralisé » rendait possibles « les dérives sexuelles ». Un collectif d’intellectuels a signé dans le Monde une lettre ouverte dénonçant cette « structure de péché », s’interrogeant sur « tout un rapport à la sexualité » et appelant à « changer les modes de gouvernance dans l’Église ». On y trouvait notamment Christine Pedotti, présidente du Comité de la jupe, qui n’avait pas manqué de défendre Frédéric Mitterrand contre « la meute » lors de l’affaire des petits Thaïs. Ce dernier détail est significatif : ceux qui rendent le cléricalisme responsable de la pédophilie exonèrent en même temps de tout péché les ténors de l’homosexualité.
Années soixante-dix, les grands millésimes de la pédophilie
Qu’en est-il maintenant de la « pédophilie » dans l’Eglise ? Le rapport du John Jay Insitute (organisme indépendant) sur les abus sexuels commis dans l’Eglise américaine, et diverses études complémentaires menées voilà une dizaine d’années donne une vue assez claire de la question, au moins en Amérique. Le rapport porte sur les abus sexuels reprochés à 4 392 prêtres sur 100.000 en exercice aux USA entre 1950 et 2002. 4,4 % des prêtres ont été ainsi mis en cause dans 10.000 affaires. Une proportion analogue à celle que l’on mesure dans le clergé protestant, réputé démocratique. Ni le célibat ni la structure hiérarchique, cléricale, ne sont donc en cause. Des ratios analogues se remarquent dans toutes les institutions en rapport avec les jeunes : scouts, associations sportives, éducation nationale. Les réactions de celle-ci montrent que tout corps social tend à laver son linge sale en famille, ce n’est pas propre à l’Eglise ni au cléricalisme. On peut même avancer le contraire. Alors que les abus sexuels sur mineurs étaient déjà en forte régression dans l’Eglise américaine, en 1992, ils connurent un pic historique dans la société US (142.000, 14 fois autant que d’abus « cléricaux » en 52 ans). L’omerta n’est donc pas plus pesante dans l’Eglise qu’ailleurs, au contraire.
Quand le n° 2 de l’Eglise liait homosexualité et pédophilie
A quoi est-donc due la « pédophilie » dans l’Eglise ? Notons d’abord que le mot pédophilie est un mot volontairement mal fait et confond à dessein deux choses : la pédomanie, l’attrait sexuel pour les enfants, et l’héphéborastie, l’attrait sexuel pour les adolescents masculins plus ou moins âgés. Le rapport John Jay illustre clairement ce double caractère de la « pédophilie » dans l’Eglise américaine. 81 % des victimes alléguées étaient masculines. 3,6 % avaient six ans au moins au moment du premier abus, 19 % entre sept et dix ans, 77,4 % entre onze et dix-sept ans. Les abus sexuels étaient donc aux quatre cinquièmes homosexuels et aux trois quarts liés à l’émoi de l’ambiguïté adolescente. Malgré le tollé qu’il provoqua, le cardinal Tarciso Bertone, le secrétaire d’Etat de Benoît XVI, eut donc raison d’établir « une relation entre l’homosexualité et la pédophilie », si l’on prend le mot pédophilie dans le sens ambigu généralement utilisé.
Pédophilie, pédomanie ou homosexualité ?
Cette ambiguïté a été cultivée. Les courbes des abus « pédophiles » dans l’Eglise américaine traduisent une augmentation forte dans les années soixante avec un pic dans les années soixante-dix suivi d’une décrue. Autrement dit la « pédophilie » dans l’Eglise est due à une vague de licence venue de la société qui a infecté l’Eglise.
A l’époque, criminologistes et psychiatres réclamaient la dépénalisation d’un certain nombre d’actes, la réduction des peines et un assouplissement des traitements pour les agresseurs. Aux États-Unis fleurissait une pornographie mettant en scène des enfants, librement accessible dans les boutiques pour adultes entre 1972 et 1977. Ce relâchement tient en partie au déclassement de l’homosexualité de la liste des maladies mentales en 1973.
Promotion synergique de l’homosexualité et de la pédophilie
En Europe et en France, pédophiles et associations homosexualistes marchaient officiellement la main dans la main. Le FHAR, le front homosexuel d’action révolutionnaire unissait ses efforts à ceux du CARP, le comité d’action pédérastique révolutionnaire. En mai 1977, Libération annonçait la naissance du FLIP, le Front de libération des pédophiles, et son directeur, Serge July, publiait des textes où la pédomanie s’ornait de viols, d’orgies et de copromanie. En 2009, il devait vertueusement dénoncer « les lupanars pédophiles incrustés au cœur des écoles chrétiennes ».
Ne pas exonérer les homosexualistes de leur responsabilité
Aux Pays Bas sévissait un parti pédomane qui voulait dans un premier temps ramener la majorité sexuelle à douze ans puis la supprimer, et il existe toujours. Bien sûr, tous les pédophiles n’étaient pas pédérastes, il faut le dire, et tous les pédérastes n’étaient bien sûr pas pédophiles, loin de là, mais les revendications de tous allaient dans le même sens. Une part notable des militants portaient d’ailleurs double casquette. Même s’il ne leur plaît pas qu’on le dise aujourd’hui, des associations gays sont objectivement à l’origine de la banalisation de la pédophilie. Aujourd’hui, grâce aux efforts d’autres associations, le regard de la société a changé, et Daniel Cohn Bendit affecte d’avoir parlé pour rire quand il se vantait de ses exploits pédomanes.
Que Dieu ouvre les yeux au pape François, ou qu’il les lui ferme
La lettre du pape François au peuple de Dieu reçoit un accueil favorable dans la presse. Ainsi en va-t-il de toute trahison de l’Eglise. Le successeur de Pierre reprend à la lettre les erreurs et les violences des ennemis de l’Eglise contre la Barque dont il a la charge. Il accuse le cléricalisme, comme un franc-maçon de base le ferait, pour exonérer l’homosexualité, comme le ferait un militant LGBT. Et il est d’une étonnante mansuétude pour son ami Godfried Danneels, cardinal émérite de Malines que Benoît XVI avait écarté, qui a couvert son collègue de Bruges, Roger Vangheluwe. François l’a pris à côté de lui lors de son intronisation et lui a donné un rôle dans le synode de la famille. Bref, l’attaque contre le cléricalisme (qu’une intelligence aussi vive que celle du pape François ne peut pas croire fondée) ressemble à une défense de l’homosexualité dans l’Eglise. On ne peut que prononcer pour le pape François cette prière que faisait une paroissienne désolée à propos d’un homme politique vieillissant : « Que le Seigneur lui ouvre les yeux, ou qu’Il les lui ferme ».