La crise de la transmission de la foi, qui est fondamentalement une crise du catéchisme, n’en finit pas de manifester ses dégâts. Aux termes d’une enquête menée par le Centre d’Investigation appliquée à l’apostolat de l’Université jésuite de Georgetown (CARA), publiée le 26 septembre dernier, plus d’un catholique sur deux aux Etats-Unis n’a aucune idée de ce qui constitue le dogme eucharistique, soit 51 %, alors même que 64 % des catholiques américains affirment croire en la présence réelle de Notre Seigneur sous les espèces du pain et du vin consacrés.
L’enquête s’est déroulée en 2022 auprès de personnes adultes qui se désignent elles-mêmes comme catholiques, sous forme de questions de différents types, ouvertes et fermées, portant sur la manière dont les sondés entendent l’enseignement de l’Eglise au sujet de l’Eucharistie.
La majorité des catholiques américains pensent que Eucharistie est symbolique
Invités à choisir la meilleure formule résumant la doctrine de l’Eglise, 49 % d’entre eux ont coché la case : « Jésus-Christ est réellement présent sous l’apparence du pain et du vin. » Les 51 % restants ont préféré cette fausse définition : « Le pain et le vin sont des symboles des actions de Jésus au cours de la dernière Cène, ce qui signifie que Jésus n’est présent que symboliquement dans le pain et le vin consacrés. » Cela veut dire une majorité de catholiques ne sait pas ce qu’enseigne l’Eglise, avec ce corollaire évident : il est probable que cela ne leur ait jamais été correctement enseigné.
Mais il est vrai que l’exemple vient de haut…
L’enquête avait pour objectif de clarifier et de vérifier les constats d’une enquête menée en 2019 par le Pew Research Center selon laquelle un tiers seulement des catholiques des Etats-Unis sont d’accord avec l’Eglise pour dire que l’Eucharistie est réellement le Corps et le Sang du Christ : dans cette enquête, 69 % des sondés avaient déclaré penser qu’il s’agit là uniquement de symboles.
Ce résultat catastrophique avait conduit les évêques des Etats-Unis à mettre en place le programme « Renaissance eucharistique nationale » qui doit aboutir en juillet prochain un congrès eucharistique national à Indianapolis.
S’ils ignorent leur foi, à qui la faute ?
Le centre CARA cherchait à démontrer notamment que les questions posées en 2019 avaient pu être source de confusion pour les personnes interrogées. L’enquête de 2022 comporte une question ouverte invitant celles-ci à répondre avec leurs propres mots à la question : « Que croyez-vous qu’il arrive aux dons du pain et du vin après la consécration pendant la messe ? »
Si les résultats sont nettement meilleurs, la disparité entre la réponse sur la Présence réelle et celle sur le contenu du dogme montre qu’il subsiste une confusion ; par ailleurs, il va de soi que la majorité de ces catholiques, quand elle va à la messe, n’a pas forcément conscience d’assister au renouvellement non sanglant du sacrifice du Christ, enseignement encore plus « enfoui » par les temps qui courent.
En tout cas, Mgr Andrew Cozzens de Crookston (Minnesota), président de la Commission d’évangélisation et de catéchèse de la Conférence des évêques des Etats-Unis, ne se satisfait pas de ce « mieux » statistique. « Ce ne sont toujours pas de bonnes nouvelles », a-t-il déclaré. Commentant le fait que seuls 17 % des catholiques interrogés s’affirment pratiquants (-7 % par rapport à l’avant-covid), il a regretté : « Ce que cela révèle… c’est qu’il y a des personnes qui disent croire en l’Eucharistie mais qui ne vont pas à la messe. En ce sens, il est évident qu’ils n’ont jamais eu une vraie rencontre avec Jésus dans l’Eucharistie. »
La baisse de la pratique va de pair avec la méconnaissance de l’Eucharistie
Cela dit, 95 % des sondés qui se disent pratiquants, assistant au moins une fois par semaine à la messe, connaissent l’enseignement de l’Eglise sur le sacrement de l’Eucharistie et y adhèrent. Ceux qui affirment assister à la messe au moins une fois par mois sont 80 % à partager cette foi.
Rappelons qu’en France, la pratique religieuse des catholiques est largement inférieure. Selon une enquête de l’INSEE publiée en 2023, seuls 8 % des 18 à 59 ans des catholiques auto-désignés se disent pratiquants ; c’est-à-dire, selon la définition retenue par l’Institut statistique, qu’ils assistent à la messe « au moins une fois par mois ». Que croient-ils ? C’est encore une autre question…