L’Allemagne a fortement profité de la crise grecque, selon Institut Halle qui évoque le chiffre de 100 milliards d’euros

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L’un des principaux organismes de recherche économique en Allemagne, le Leibniz-Institut für Wirtschaftsforschung Halle (IWH) connu comme l’Institut Halle, vient de publier un rapport de 24 pages indiquant que l’Allemagne a fortement profité de la crise grecque. Les bénéfices ont été substantiels pour le secteur public, selon le rapport publié lundi, dans la mesure où l’Allemagne a profité de taux d’intérêt réduits du fait que les investisseurs sont à la recherche d’investissements sûrs : ce qu’on appelle « la fuite vers la qualité », vers les valeurs-refuge. C’est, en somme, l’insécurité créé par la crise grecque qui a permis à l’Allemagne d’emprunter à moindre coût.
 
Selon les analystes de l’Institut Halle, l’Allemagne a profité de 1999 à 2007 d’une politique monétaire « optimale ». Par la suite, celle-ci est devenue trop accommodante à l’aune des intérêts allemands, pour répondre aux disparités européennes au moment de la crise. Mais combiné avec sa position de « sanctuaire » économique, ce facteur a permis à l’Allemagne d’économiser plus de 100 milliards en dépenses d’intérêts entre 2010 et la mi-2015. Même si la Grèce devait faire défaut sur l’ensemble de sa dette à l’égard de l’Allemagne, soit 90 milliards dus via le Mécanisme de stabilité européenne, le FMI et directement, l’Allemagne serait encore gagnante, assurent-ils.
 

Plus la crise grecque s’est aggravée, moins l’Allemagne a payé d’intérêts : l’économie se chiffre à 100 milliards d’euros

 
Plus les choses allaient mal en Grèce, plus l’Allemagne a profité de la situation, selon l’Institut Halle. Les incertitudes sur le marché ont poussé les investisseurs à concentrer leurs portefeuilles sur des actifs sûrs : c’est ainsi que les pays bénéficiant de bonnes appréciations de la part des agences de notation ont attiré les fonds, en même temps que les actifs les plus faciles à échanger : la « fuite vers la liquidité ».
 
L’analyse des chiffres par l’Institut Halle montre que les obligations allemandes ont systématiquement monté en valeur (et que les taux ont donc baissé) chaque fois que les accords avec la Grèce semblaient ne pas devoir se réaliser et que le Grexit se profilait ; en revanche, elles ont perdu de leur valeur (et les taux ont augmenté) lorsque les accords semblaient devoir se faire. Sur la période de 10 ans envisagée, les déclins cumulés de la valeur des obligations allemandes se chiffre à 1,5 %, avec un taux à peu près inverse sur les périodes où les choses allaient mal en Grèce, et donc mieux en Allemagne.
 

L’Institut Halle estime que l’Allemagne a fortement profité de la crise grecque

 
Pour comparer ces variations avec ce qui se serait passé si la crise n’avait pas eu lieu, l’Institut Halle a retenu plusieurs méthodes d’estimation qui l’amènent à dire, en analysant le comportement de la BCE sur la période antérieure, que le taux d’intérêt eût été « bien plus élevé » aujourd’hui qu’il ne l’est effectivement à la suite de la crise, ce qui l’aurait fait correspondre aux réalités de l’économie allemande comme précédemment.
 
Se basant sur les obligations émises par l’Allemagne, l’Institut Halle calcule des économies de 4 % en moyenne sur les paiements effectués jusqu’en 2020 à la faveur de la situation favorable que lui vaut la crise. Les gains totaux, selon les scénarios hypothétiques en l’absence de crise, varient de 93 milliards d’euros au moins à 126 milliards au plus, avec des bénéfices qui continueront de tomber sur le moyen et le long terme grâce aux obligations émises avec un très faible taux d’intérêt qui continueront de profiter à l’Allemagne même en cas de résolution de la crise grecque. Et si la Grèce devait alors rembourser la totalité ou au moins une partie de sa dette, l’Allemagne y gagnerait encore.
 
Selon le communiqué de presse publié par l’Institut Halle à propos de son rapport, d’autres pays ont bénéficié de ce mécanisme, tels les Etats-Unis, les Pays-Bas et la France, mais dans une mesure significativement moindre.
 

Anne Dolhein