Alors que les éleveurs entamaient mercredi leur quatrième jour de mobilisation, accentuant la pression et multipliant les actions sur les routes, le gouvernement, à l’issue du conseil des ministres, proposait une série de mesures que, manifestement, le monde agricole n’a pas jugé suffisante et qui ne lui semble être, en définitive, qu’un effet d’annonce.
En pratique, ces mesures ne sont en réalité que des mesurettes, insuffisantes pour régler la crise qui secoue le secteur, puisqu’elles ne consistent, pour l’essentiel, qu’à proposer des délais pour payer cotisations et impôts.
Le gouvernement va débloquer plus de 600 millions d’euros pour aider les professionnels agricoles à alléger leur trésorerie : 100 millions d’annulations de charges et cotisations, et 500 millions de reports d’échéance de paiement de l’impôt sur le revenu, de remboursements anticipés de TVA, d’exonérations de taxes foncières, etc. Par ailleurs, le fonds d’allégement des charges est porté de 8 à 50 millions d’euros. Au total, une vingtaine de mesures. « Nous entendons l’angoisse des éleveurs », a déclaré Manuel Valls.
Des annonces gouvernementales…
Apparemment, cela n’a pas suffit aux éleveurs qui, non seulement n’ont pas abandonné, pour la plupart, leurs actions, mais les ont multipliées – même si, ponctuellement, certains sont rentrés chez eux. Outre le Nord, la Normandie et la Bretagne, des actions étaient ainsi en cours un peu partout depuis que le premier ministre et leur ministre de tutelle se sont exprimés : à Lyon, dans le Lot et Garonne, en Picardie, aux Sables-d’Olonne, Poitiers, etc.
Et les déclarations se succèdent. Le président de la FDSEA du Calvados, Jean-Yves Heurtin, considère que, « a priori, les mesures annoncées ne sont pas suffisantes ». Avant même les propositions gouvernementales, le président de la FNSEA, Xavier Beulin, avait expliqué que des « mesurettes » ne sauraient être suffisantes. « Il y a une sorte d’exaspération et de colère qui monte depuis des semaines et des semaines. Ce n’est pas faute d’avoir prévenu », avait-il ajouté.
De fait, il ne suffit pas de parler de « plan d’urgence » pour que les questions soient réglées.
… sans lien avec la dure réalité du monde agricole
Peu après les interventions de Manuel Valls et de Stéphane Le Foll, le porte-parole national de la Confédération paysanne, Laurent Pinatel assurait qu’il n’y avait « pas de volonté de remettre à plat le système ». « On remet de l’essence dans la voiture, mais la voiture fonce toujours dans le mur ! », a-t-il ajouté.
Malheureusement, il y a encore bien pire que le manque de volonté. Il y a l’incapacité à agir. Lors que François Rebsamen, ministre du Travail et de l’Emploi, affirme : « Cela fait longtemps que Stéphane Le Foll a dépeint ce qui était en train de se passer. On partage la détresse des agriculteurs, les causes de la crise sont multiples. Plutôt que d’avoir la droite qui jette de l’huile sur le feu, on devrait tous agir », il est manifeste qu’il s’agit d’un aveu d’impuissance. Un ministre n’est pas là pour faire des constats. Mais voilà à quoi Bruxelles, le dogme intangible de l’ouverture des frontières et les accords internationaux de libre-échange réduisent aujourd’hui la politique nationale.