L’inauguration officielle, jeudi, du nouveau système de défense balistique américain en Roumanie, par des représentants des États-Unis et de leurs alliés de l’OTAN, a provoqué une vive réaction de la part de la Russie qui y voit un dispositif de nature à augmenter le risque de guerre nucléaire. Un porte-parole du Kremlin, Dmitri S. Peskov, a déclaré aussitôt lors d’une conférence de presse que le bouclier antimissile représente une menace directe pour la sécurité de la Russie.
De nombreux commentaires sur les sociaux russes allaient plus loin, annonçant qu’un conflit nucléaire pourrait bien être déclenché en Europe, avec la possibilité que la Roumanie soit un jour « réduite en cendres ».
Du côté du Kremlin, le ton est moins apocalyptique mais Peskov a annoncé que « des mesures sont prises actuellement pour assurer à la Russie un niveau de sécurité suffisant ». Et d’ajouter : « Le président lui-même, permettez-moi de vous le rappeler, n’a cessé de demander contre qui est dirigé ce système. »
Le bouclier antimissile américain installé en Roumanie
Les États-Unis n’ont quant à eux cessé d’affirmer que le bouclier antimissile a pour seul but de les protéger, ainsi que leurs alliés, des « Etats voyous » comme l’Iran, et qu’il est loin d’avoir la force de frappe nécessaire pour contrer l’arsenal nucléaire russe, beaucoup plus important. C’est possible. Mais on ne manquera pas de souligner l’ironie d’une situation où l’OTAN se défend contre un pays comme l’Iran sous l’égide des Etats-Unis, qui ont été en première ligne pour imposer un accord nucléaire au bénéfice de… l’Iran.
La base de Deveselu en Roumanie accueille donc désormais une plate-forme de lancement qui se trouvait jusqu’à présent en pleine mer. « Aegis Ashore » sera rejoint par une deuxième base dont les États-Unis ont annoncé la construction depuis ce vendredi en Pologne. Elle devrait devenir opérationnelle en 2018. Malgré cela, un haut responsable du Pentagone, Robert Work, a répété jeudi qu’il « n’existe aucun plan » en vue de renforcer ce parapluie balistique pour assurer la protection face à la Russie.
Les Etats-Unis menacent-ils la Russie ?
Une porte-parole du ministère des affaires étrangères russes, Maria Zakharova, assure de son côté que cela n’est pas vraisemblable dans la mesure où les plates-formes de lancement sont capables d’accueillir des missiles de croisière Tomahawk à plus grande portée que celles autorisées par le traité de 1987 avec l’Union soviétique, visant à bannir les missiles de moyenne et de longue portée dont la rapidité augmentait le danger d’un conflit en réduisant le temps de réflexion à propos d’une éventuelle riposte.
Tout redéploiement de missiles nucléaires en Europe centrale recréerait une situation extrêmement volatile comme celle que le monde a connue au cours des années 1980, selon le discours russe. « Nous devons annoncer cela de manière nette, sans formulation diplomatique supplémentaire, nous sommes en train de parler d’une violation de ce traité », a déclaré Mme Zakharova. Vladimir Poutine avait déjà annoncé qu’en cas de déploiement du bouclier antimissile américain, la Russie se retirerait du traité.
Dans le même temps, les États-Unis accusent la Russie d’avoir violé le même traité en manquant à leur obligation de faire part de la vraie portée de plusieurs types de missiles dont elle dispose. La Russie elle-même a laissé entendre qu’elle dispose déjà de possibilités de riposte militaire à Aegis Ashore, sous la forme d’un drone sous-marin équipé de têtes nucléaires. Celui-ci serait capable de déclencher un tsunami radioactif en explosant dans des zones côtières, au détriment de toute activité « économique ou militaire ».