Brexit – Pour Boris Johnson, la victoire de Bruxelles est certaine si Londres ne renonce pas au « plan de Chequers » de Theresa May

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Si l’on a vu le négociateur de l’UE Michel Barnier annoncer enfin des propositions la semaine dernière pour un accord avec Londres sur les conditions du Brexit, c’est aussi parce que le fameux « plan de Chequers » de Theresa May garantit désormais à Bruxelles une abdication quasi-complète du Royaume-Uni face à l’UE. La menace d’un Brexit « dur » sonne en effet creux de la part de Londres, dans la mesure où, comme le confirme l’ancien gouverneur de la Banque d’Angleterre, les préparations faites par le gouvernement de Mme May en vue de ce scénario sont tardives et entachées d’incompétence. Dans ces conditions, Boris Johnson, l’un des deux ministres qui ont démissionné du gouvernement de May après la réunion de Chequers, dénonce une fois de plus dans les colonnes du Telegraph le drapeau blanc agité par le gouvernement de Sa Majesté au moment d’engager la bataille avec Bruxelles. Et ce partisan du Brexit a des propositions pour remédier à la situation. Cela tombe bien, car une majorité de ceux qui ont voté pour la sortie de l’UE voudraient le voir devenir premier ministre à la place du premier ministre.
 

Boris Johnson accuse « certains dans le gouvernement britannique » d’avoir tout fait pour éviter un vrai Brexit.

 
Confirmant ce qui avait été déjà dénoncé par un secrétaire d’État du ministère pour la Sortie de l’UE, Boris Johnson affirme qu’» il est désormais clair que certains dans le gouvernement britannique n’ont jamais voulu de solutions » au problème de la frontière en Irlande, qu’ils ont au contraire « voulu utiliser pour stopper un vrai Brexit » car « ils voulaient rester à l’intérieur [de l’UE] » et organiser une sortie de l’UE qui n’aurait de Brexit que le nom. Car selon cette figure du camp du Brexit qu’est Boris Johnson depuis la campagne référendaire de 2016, la nécessité d’avoir des contrôles à la frontière en cas de sortie du Royaume-Uni de l’union douanière européenne est un mythe puisqu’il existe, indépendamment de l’UE, une Zone commune de voyage entre le Royaume-Uni et l’Irlande. Pour ce qui est du commerce de biens, la vérité, explique M. Johnson, c’est qu’aujourd’hui déjà le Royaume-Uni et l’Irlande ne contrôlent qu’une faible proportion des biens arrivant de pays extérieurs à l’UE. Cette proportion est de 4 % pour le Royaume-Uni et de 1 % pour la République d’Irlande. En outre, les contrôles douaniers concernant les marchandises ne sont pas nécessairement réalisés à la frontière et, de toute façon, le commerce entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord ne représente qu’une petite partie des échanges pour les deux parties de l’île.
 
Mais au lieu de régler la question de la frontière entre les deux parties de l’Irlande, accuse l’ancien ministre des Affaires étrangères, Londres et Bruxelles ont cherché à instrumentaliser cette question pour justifier le maintien du Royaume-Uni dans le Marché unique. La première chose à faire, estime Johnson, c’est donc de soulever à nouveau la question de la frontière entre République d’Irlande et Irlande du Nord et de négocier des solutions pratiques, ce qui permettra au passage de trouver des solutions pour éviter de voir apparaître d’énormes files d’attentes de camions entre Douvres et Calais.
 

Le « plan de Chequers » de Theresa May pour dissuader les futurs candidats à une sortie de l’UE ?

 
Dans le cas contraire, prévient le rival de Theresa May, c’est-à-dire si les Britanniques maintiennent les propositions du « plan de Chequers », cela voudra dire qu’ils renoncent à la vision de la place du Royaume-Uni dans le monde « si superbement articulée par le Premier ministre dans son discours de Lancaster House du 17 janvier 2017 ». Le Royaume-Uni n’aura pas alors repris le contrôle de son destin mais il l’aura au contraire perdu, il « restera dans le taxi, mais enfermé dans le coffre, sans avoir son mot à dire sur la destination ». Et Johnson d’ajouter très justement, car c’est bien là le but poursuivi à Bruxelles comme chez les élites européistes londoniennes : « Nous serons un avertissement pour tout autre pays de l’UE qui envisagerait de changer sa relation avec Bruxelles : que même le Royaume-Uni, avec la cinquième économie du monde, a été incapable de se libérer de la force d’attraction de l’UE et a été contraint de chercher à obtenir des conditions humiliantes ».
 

Olivier Bault