Le Brexit ne fera pas forcément du tort à l’économie britannique, selon Neil Woodford, gestionnaire de fonds

Brexit économie britannique Neil Woodford
Pro et anti-Brexit s’affrontent.

 
Alors que la pression monte au Royaume-Uni pour créer la panique autour d’une possible sortie de l’Union européenne, un hommes d’affaires de premier plan vient d’affirmer qu’aucun argument économique crédible ne pouvait être avancé en faveur du maintien du pays dans l’UE – pas plus, d’ailleurs, qu’en faveur du « Brexit ». Neil Woodford, gestionnaire de fonds, réagissait à l’antenne de la BBC aux propos de plusieurs hommes d’affaires qui ont publié, mardi, une lettre ouverte dans le prestigieux Times de Londres pour dire tout le tort que ferait le Brexit à l’économie britannique.
 
Neil Woodford estime que la question du Brexit n’est pas d’ordre économique mais se doit d’être envisagée sous l’angle de la politique et de la souveraineté. Un article publié parallèlement sur le site de sa société montre que les estimations à propos des retombées du Brexit varient entre une baisse de 9 % du PIB, et une augmentation de 10 % du même produit.
 

Nul ne sait si le Brexit fera du tort ou non à l’économie britannique

 
Se prononcer dans un sens ou dans l’autre, assure-t-il, relève de la pure « spéculation ».
 
Woodford fait partie des nombreux grands acteurs de la vie économique britannique qui refusent de s’exprimer dans le sens du gouvernement de David Cameron qui fait campagne contre le Brexit. Les signataires de la lettre du Times représentent ainsi une minorité des cent principaux directeurs dont les sociétés sont cotées au FTSE : ils ne sont que 36, les autres ayant décliné.
 
Il ne s’agit même pas d’une initiative de leur part : le texte de la fameuse lettre a été rédigé par de hauts fonctionnaires alors que David Cameron n’avait même pas fini de négocier à Bruxelles. Les autorités avaient tablé sur la signature de 80 des responsables de sociétés sur 100 ; elles ont dû se contenter des miettes…
 
Parmi les refuzniks, Peter Hargreaves, directeur de Hargreaves Lansdowne, qui s’était déjà dressé contre la propagande gouvernementale l’an dernier en déclarant au Financial Times : « Les europhiles accusent les eurosceptiques de mener une campagne axée sur la peur, mais c’est le contraire. Cette peur que nous puissions soudain perdre des millions d’emplois et des millions de livres en échanges commerciaux, ce sont de complètes balivernes. »
 

Neil Woodford rejoint par de nombreux responsables de sociétés pour démonter la peur face au Brexit

 
Les responsables des grandes chaînes de magasins, comme Next, Sainsbury’s, Morrisons et Tesco se sont également abstenus de signer l’appel dicté par le gouvernement. Comme l’a dit un porte-parole de Tesco : « Le référendum sur l’appartenance à l’UE porte sur une décision qui revient au peuple du Royaume-Uni. Quelle que soit cette décision, nous nous focaliserons sur le service de nos clients. »
 
Mais comme en France lors du référendum de 2005 sur l’UE, le discours officiel consiste à prédire l’apocalypse. En France, cela n’avait pas suffi. Et le « non » à l’UE l’avait emporté – en vain, en raison du tour de passe-passe de Nicolas Sarkozy imposant d’autorité le traité dit « simplifié ».
 
C’est d’une telle manœuvre que les Britanniques peuvent déjà se méfier, même s’il y a fort à parier qu’ils ne se laisseraient pas faire…
 

Anne Dolhein