La transition vers le « net zéro » va « coûter très, très cher »

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La course vers le « net zéro » dans laquelle se sont jetées les pays développés pour lutter contre le CO2 va coûter cher au citoyen lambda – très cher. C’est ce qu’a déclaré, sans pour autant le déplorer, l’ancien économiste en chef du Fonds Monétaire International (FMI), Olivier Blanchard, qui vient d’être auditionné par la commission des affaires économiques de la Chambre des Lords au Royaume-Uni. La transition vers une économie à faible émission de carbone est « nécessaire », selon l’économiste, « mais elle coûtera beaucoup plus cher que les gens ne se l’imaginent ».

Il a précisé la cible de cette mise en garde : pour parvenir à « quelque chose qui commence à ressembler sérieusement au net-zéro », a-t-il dit, il y aura une « mise de fonds fiscale élevée ». Avis aux contribuables, d’aujourd’hui et de demain !

Aujourd’hui chargé de cours à l’Institut Peterson d’économie internationale à Washington DC, Blanchard ne s’alarme pas tant du prix à payer que de ce fait : « Le public ne croit pas, ou on ne lui a pas fait comprendre, que cela va lui coûter cher. Cela va coûter cher et il faut que ce message soit diffusé. »

 

La transition vers les émissions net zéro, une drôle d’ardoise !

Cela dit, il a un début de solution miracle. Puisqu’il n’est pas politiquement envisageable, à son avis, de financer l’opération par la seule augmentation des impôts, l’ancien analyste du FMI estime que les gouvernements devraient emprunter davantage.

« Je pense que, de manière réaliste, nous devons accepter le fait que, pendant un certain temps, il faudra financer cela par la dette, ce qui veut dire que le déficit primaire devra être un peu plus important en conséquence. Je pense que pour les prochaines années, une augmentation de 0,5 % constitue le minimum absolu nécessaire », a-t-il déclaré. Le covid et son « quoi qu’il en coûte », le choc des prix de l’énergie, l’inflation et les autres problèmes auxquels font face les économies développées, pour la plupart des gens endettées jusqu’au cou, ce n’est donc pas assez.

Pour preuve qu’il n’y a pas d’autre solution que d’emprunter encore et encore, il a cité l’exemple de la France et de l’Allemagne, où les protestations des agriculteurs contre l’élimination progressive des subventions au diesel et contre d’autres réglementations environnementales de l’Union européenne illustrent parfaitement les défis politiques inhérents à l’élimination de l’énergie dite fossile.

 

Décarboner coûte cher, bien plus qu’on ne le dit

Au Royaume-Uni comme ailleurs, on avance l’idée que la transition énergétique engendrera ses propres économies. Ainsi l’Office for Budget Responsibility (OBR) britannique a-t-il évalué le coût de ce bouleversement à 1.400 milliard de livres sterling (près de 1.650 milliard d’euros) sur 30 ans, avec une date butoir en 2050. Mais il assure qu’on réalisera en même temps 1.100 milliard d’économies, pour un coût net de quelques 300 milliards de livres.

Sir Dieter Helm, professeur d’économie à l’Université d’Oxford et ancien conseiller de Boris Johnson, n’est pas d’accord. Rappelant qu’il a toujours dit que la transition vers le net zéro était nécessaire, il a pour sa part déclaré aux Lords qu’il est « illusoire de penser » que l’opération s’amortira d’elle-même. A l’instar d’Olivier Blanchard, il a ajouté que celle-ci « serait beaucoup, beaucoup plus coûteuse que ce que les gens imaginent ».

Mais il ne croit pas à l’endettement. Il a jugé « erronée d’un point de vue intergénérationnel » l’idée de « faire payer la prochaine génération ». Et pour mieux culpabiliser ses concitoyens, il a ajouté que cela ferait porter sur ses épaules le prix du remplacement du « système polluant que nous avons exploité et avec lequel nous avons pollué leur environnement ».

Rappelons que le CO2 dont il est question ici n’est en aucun cas un polluant mais une composante normale de l’atmosphère, nécessaire à la vie qui plus est. La manipulation du langage est un élément constitutif de la grande peur du climat… quand on peut y ajouter un peu de dialectique et de lutte des jeunes contre les vieux, c’est encore mieux.

 

Net zéro : plus d’impôts, plus de dette… ou les deux

Et on ne parle même pas du chiffre avancé par l’OBR. Sir Dieter a précisé : « Les clients et les contribuables vont devoir financer, d’une manière ou d’une autre, des coûts plus élevés qu’ils ne l’avaient supposé, et que l’OBR et d’autres ne le supposent, parce qu’ils se trompent sur les coûts des nouvelles technologies et que les proportions de cette erreur sont très importantes. »

Les Britanniques – qui, Brexit ou pas, sont soumis aux mêmes contraintes que les pays de l’Union européenne en matière de zéro émissions nettes – aiment bien le concept du « net zéro », a déclaré pour sa part à la commission des Lords Charles Goodhart, membre du Comité de politique monétaire de la Banque d’Angleterre, mais ça, « c’est tant qu’on ne demande pas aux gens de payer ».

Il faudrait dire plutôt : tant qu’on ne leur explique pas pourquoi ils font face à des hausses de dépenses déjà importantes et tant qu’on ne les avertit pas des nouvelles augmentations qui les attendent.

Les gouvernements n’y ont aucun intérêt. C’est pourquoi ces informations doivent circuler. Tout comme celles, plus importantes encore, montrant qu’il n’y a pas de lien de causalité entre l’augmentation du CO2 dans l’atmosphère et le réchauffement climatique.

 

Anne Dolhein