L’une des plus grosses banques d’affaires mondiales mise sur le « oui » du Royaume-Uni au maintien dans l’UE en soutenant la campagne Britain Stronger in Europe. Goldman Sachs vient de faire un don considérable, « à six chiffres », sans que la banque d’affaires ou le groupe constitué en vue de la campagne contre le Brexit aient voulu donner de précisions ni même confirmer la nouvelle. Une source proche du dossier parle de « centaines de milliers de livres » destinés à financer une campagne pour un référendum dont la date n’est même pas fixée, même si The Guardian évoque le mois de juin.
« David Cameron aimerait que le référendum se tienne en juin afin d’éviter l’éventualité d’une couverture (médiatique) prolongée de la fuite de réfugiés vers l’Europe », écrit le « quotidien de référence », qui comme Le Monde penche à gauche. Il ajoute que l’annonce semble avoir été faite pour coïncider avec l’intervention du Premier ministre à Davos où de nombreux responsables de l’industrie et de la finance britanniques sont également présents.
Goldman Sachs a intérêt à ce que le Royaume-Uni se maintienne dans l’UE
La nouvelle est en tout cas parfaitement vraisemblable puisque de hauts responsables de Goldman Sachs se sont publiquement exprimés en vue du maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne, « dans l’intérêt de tous » comme l’a dit le co-président de Goldman Sachs International, Richard Gnodde, dans la presse allemande en juin. « La Grande-Bretagne doit continuer de faire partie d’un bloc économique plus vaste. Toute autre situation serait dommageable à la fois pour l’économie au sens large ainsi que pour le secteur financier. »
La banque américaine, dont la démarche est perçue comme un « soutien » à David Cameron par le Financial Times, n’est pas la seule institution de la haute finance à plaider activement contre le Brexit. Le journal affirme que d’autres banques américaines ont pu contribuer à la campagne de Britain Stronger in Europe. Il est vrai qu’à travers leurs opérations à Londres et les règles du « passeport unique », elles ont un accès direct aux marchés de l’ensemble des 28 pays de l’Union, qui représente 500 millions de personnes.
Si certaines banques ont fait savoir qu’il n’était pas question pour elles de faire un don direct en vue de la campagne, d’autres ont refusé de réagir. Mais les menaces fusent : le président de Morgan Stanley, Colm Kelleher a déclaré à titre personnel en novembre que « si le Royaume-Uni devait quitter l’UE, il y aurait des conséquences négatives significatives pour Londres en tant que centre financier global ».
Une grande banque d’affaires finance la campagne contre le Brexit
Les dépenses de campagne, pour et contre le Brexit, seront limitées à 7 millions de livres pendant les 10 semaines précédant le scrutin ; les deux groupes seront également tenus de déclarer les sommes réunies avant le début de la campagne officielle.
On a ainsi appris en novembre dernier que le fondateur de l’institution financière Winton Capital Management, David Harding, donnerait à lui seul « plusieurs millions de livres » à Britain Stronger in Europe, et rejoignait son conseil d’administration.
En face, chez les partisans du non, on peut moins compter sur le monde des multinationales et de la haute finance qui ont un clair intérêt à ce que l’économie mondiale soit livrée au libre-échange. Arron Banks, le millionnaire britannique qui soutient le parti euro-sceptique de Nigel Farage, UKIP, a réagi en affirmant que le groupe Leave.EU (« Quittons l’UE ») n’accepterait jamais un tel don de la part de Goldman Sachs.
« Ce n’est pas une surprise pour tous ceux d’entre nous qui disons depuis le début que ce référendum sera une campagne du peuple britannique contre l’establishment des banquiers internationaux, des sociétés multinationales adeptes de l’évasion fiscale et des politiques en rupture de réalité. Nous avons besoin de voir la Grande-Bretagne reprendre le contrôle de ses lois, de ses frontières, de ses impôts et des banquiers qui peuvent transférer leur argent du Luxembourg vers les îles Caïman sans la moindre honte, et qui ne sont en rien amis du peuple britannique. Ce seront les milliers de petits pelotons de gens ordinaires qui donneront leur billet de cinq ou de dix qui financeront la campagne du peuple pour la sortie de UE et c’est pour cela que nous gagnerons. Si Goldman Sachs avait proposé à Leave.EU une somme de six chiffres nous leur aurions dit où la mettre », a-t-il dit, truculent.
“Britain Stronger in Europe” accepte l’argent de Goldman Sachs
En même temps que la haute finance prêche contre le Brexit, des autorités catholiques ont également encouragé le Royaume-Uni à demeurer dans l’Union européenne. Mgr Paul Gallagher, secrétaire du Saint-Siège aux Relations avec les Etats, s’est dit favorable au « oui » à l’UE : « Le Royaume-Uni est mieux dedans que dehors », a-t-il déclaré à ITV dans un entretien qui doit être diffusé ce mercredi soir, exprimant le point de vue du pape François.
Un porte-parole de Leave.EU a réagi fortement en demandant en que l’appartenance à l’UE pouvait être du ressort de l’Eglise catholique, soulignant que ce point de vue pouvait « difficilement être tiré des Ecritures » : « C’est un problème qui ne relève pas de la foi et bien des catholiques dévots n’y verront au mieux qu’une manière pour Mgr Gallagher de s’occuper de ce qui ne le regarde pas. »
De fait, la distinction bien comprise entre spirituel et temporel laisse aux laïcs la responsabilité et le droit de juger des affaires de la cité.
Le site britannique express.co.uk s’amuse en tout cas de cette ingérence vaticane qui aligne le discours du pape sur celui de Goldman Sachs. Mais est-ce si drôle ?