Posant la première pierre de la longue route qui mène au Bureau ovale de la Maison Blanche, les caucus de l’Iowa ont traduit le mécontentement des électeurs américains à l’égard de l’Establishment, déjouant tous les sondages. Chez les Démocrates, l’ancienne secrétaire d’Etat Hillary Rodham Clinton est arrivée nez à nez avec son opposant Bernie Sanders, sénateur trotskyste du Vermont. Ce dernier a su rallier au cri de « Ça suffit ! » les déçus de la vie politique sur un très large spectre de l’électorat. Chez les Républicains, les candidats usant de la rhétorique anti-Establishment sont arrivés en tête : le sénateur du Texas Ted Cruz a coiffé à l’arrivée le milliardaire Donald Trump. Plus de la moitié des électeurs de l’Iowa ont ainsi soutenu des candidats considérés comme en dehors du système. L’Establishment peut maintenant se considérer comme averti.
Les promesses des caucus de l’Iowa seront-elles tenues ?
Ted Cruz a fait campagne en promettant de contrôler Washington, notamment au moyen de son plan en cinq points visant à démanteler l’IRS, les départements de l’Education, de l’Energie, du Commerce et du Logement et du Développement urbain. De son côté Donald Trump courtise les électeurs exaspérés avec son discours anti-immigration, la remise en cause de l’ObamaCare et la promesse de réforme du département des Anciens combattants, entre autres.
Mais seront-ils vraiment en mesure d’appliquer ce qu’ils prônent, en cas d’élection de l’un ou de l’autre à la présidence américaine ? La liste est longue des candidats à la présidence qui, une fois installés dans le bureau ovale, n’ont pas respecté leurs engagements de campagne. Jimmy Carter a reconduit ceux-là même qu’il dénonçait durant sa campagne. Georges W. Bush a augmenté les impôts alors qu’il avait promis de n’en rien faire en tant que candidat à la présidence. Barack Obama promettait le « changement » dans sa course à la première de ses mandatures. Au final, il aura pioché dans le même cercle d’initiés de Washington pour s’entourer. Ted Cruz pourrait bien ne pas faillir à cette sinistre tradition dans la mesure où ses plus proches conseillers sont des pontes néoconservateurs issus du CFR (Council on Foreign Relations).
Effondrement ou simple vacillement de l’Establishment américain ?
Les électeurs américains commettent deux erreurs majeures. Premièrement, ils se focalisent sur l’élection présidentielle alors que le véritable pouvoir réside au Congrès. Deuxièmement, leur attitude par rapport au candidat élu n’est pas la bonne : au lieu de dire « Voyons ce qu’il est capable de faire », ils devraient s’exclamer « Faisons en sorte qu’il fasse ce qu’il a promis ». Tout l’enjeu du renversement de l’Establishment réside dans cette seconde attitude.